Où le chevalier ne tombe pas amoureux de la princesse...

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Je talonnais mon cheval, le lançant au trot. D'autres chevaliers allaient nous rejoindre dans notre quête. Ils nous attendaient à l'orée de la forêt, avant de pénétrer dans le Royaume Maudit. Je menais l'expédition avec ferveur, nous devions triompher du Mal, libérer la Princesse et dissiper les ténèbres. Je brandissais mon épée en l'air et invitais mes chevaliers à me suivre dans ce périple, les ralliant dans un cri de guerre. 

Nous dévalions la colline à vive allure, laissant derrière nous que l'effluve de notre passage, de la terre battue sous les sabots de nos chevaux et la gloire aux bouts des bras. La citadelle maudite se dressait devant nous, sa plus haute tour nous narguait, embrumée par une fumée opaque . Des sortes de voiles noirs tournaient autour, comme si des démons se métamorphosaient pour prendre forme. Les habitations étaient presque toutes détruites, on apercevait au loin des bâtisses décharnées, en proie aux flammes, servant de perchoir aux démons. 

Mais l'horreur commença réellement lorsqu'on pénétrait dans la Citadelle. Elle était maudite et même en tuant tous les démons et les mages qui y rôdaient, elle le serait pour toujours. Tout avait brûlé, les corps des habitants étaient calcinés, à moitié arrachés, servant de nourriture aux démons. J'entendais deux de mes chevaliers, derrière moi, se retenir pour vomir. Une population entière réduite en cendres et en chair à démons. On apercevait le premier, perché sur le toit d'une ancienne maison bourgeoise. Nous mettant en garde, on sauta tous pieds à terre et envoyait nos chevaux rejoindre la prairie. Il était hors de question de les sacrifier aux démons. Nos montures partirent rapidement au galop en entendant le cri assourdissant du démon. Il nous avait repéré et il comptait bien se servir de nous comme dîner. 

La bataille commença dans un bruit sourd d'épées qui s'entrechoquent contre de la chair de démon, des cris de ses bêtes difformes et affreuses, qui tentaient d'aspirer nos âmes, de mordre notre chair et de nous arracher la tête. Les cris du premier démon en avaient rameuté d'autres. On luttait avec bravoure, nos boucliers nous protégeant de leurs attaques, nos épées, haches et lances frappant, encore et encore jusqu'à ce qu'ils ne bougent plus. 

Le combat continuait, faisant rage, nos cellules en ébullition, l'envie de vaincre dans nos êtres et la colère de venger tout ce peuple massacré. Ma rage redoubla lorsque le premier de mes alliés tomba à terre, massacré par un démon. Je sautais, épris d'une sourde envie de massacre et de plusieurs coups d'épée, je lui arrachais la tête, envoyant valser le reste de son corps difforme à quelques mètres. 

Une petite bande de mages vint à notre rencontre, alors qu'on avançait de plus en plus vers le palais royal, ne perdant pas de vue notre objectif premier : libérer la Princesse et la ramener à son père, le Roi Lazar. Les mages semblaient surpris de tomber nez à nez avec une troupe de chevalier, couverts de sang de démons, la haine au ventre et l'envie de venger les leurs. On les massacrait avant qu'ils ne puissent nous jeter un sort. Avancer devenait de plus en plus pesant, les mages étaient sur leur garde et se battaient avec vigueur. Mes compagnons et moi-même fatiguions. La bataille se déchainait, laissant couler les heures... 

J'avais perdu quatre de mes compagnons d'armes, j'étais blessé au dos, griffé par un démon et mon bras gauche me brûlait étrangement. Mes doigts enserraient mon épée avec une telle force que trancher, trancher et trancher semblait être aussi normal que respirer. Elle était le prolongement de mon corps. On parvenait au pied de la plus haute tour et les autres chevaliers me dirent d'y monter, qu'ils me couvraient et qu'ils me rejoindraient dès qu'ils auraient butter tous les démons des environs. 

La stratégie la plus simple était de grimper à flan de tour, sur la paroi extérieure et de me hisser jusqu'au sommet. Prendre les escaliers à l'intérieur et devoir me battre contre mages et sortilèges dans un endroit clos, sans possibilité de fuite, était bien plus risquée que de faire de la grimpette. J'attachais mon épée, saluant mes camarades d'un regard amical, leur souhaitant bonne chance et commença l'escalade. Mes gants de cuir étaient d'une excellente adhérence et je remerciais cette bonne amie de me les avoir offerts. Mon bras me lançait, des sortes de vagues de douleur étrange, cuisante presque mais je serrais les dents. 

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