Il y a les uns puis il y a les autres.
Le zigue se relevait difficilement en se frottant l'arrière du crâne. Il plissait lourdement les paupières. Ca tournait encore vivement dans son cortex et la bosse qu'effleurait sa main ne faisait que piquer encore un peu plus les nerfs de sa boite crânienne. De faibles faisceaux de lumière venaient de quelques interstices du mur, n'éclairant que très faiblement l'obscurité ambiante. Une masse inerte le frappa immédiatement, quelque chose de lourd et de froid l'étranglait, lui saisissait la gorge en lui compressant la trachée et l'empêchant de déglutir. La musique cinglante de l'acier trahis alors la présence d'une lourde chaine et son premier réflexe fut de tenter de s'extirper du carcan de ferraille en jetant ses mains à son propre cou. Mais l'épais collier forgé ne fit que faire tinter plus fort encore la colonne de maille qui le reliait au solide anneau scellé dans le mur froid et humide. Il tira dessus de toutes ses forces, fit chanter l'anneau sous ses assauts rythmés, tenta d'étirer au mieux qu'il le pouvait les mâchoires d'acier qui le retenait captif. Mais le cadenas ne bronchait pas. Pas même une rayure. Quelqu'un le retenait ici. Et il fallait s'y résoudre, il ne pouvait pas s'échapper de ce trou à rat.
Il était nu. Il commençait à avoir froid et ses efforts contre son fardeau lui avait provoqué un horrible mal de tête. Le sol lui gelait les pieds et le cul. Il n'en distinguait qu'une brève partie. Un mur fait d'épaisses planches de pins le séparait d'une autre pièce qu'il ne parvenait pas à distinguer malgré les petits écarts de fabrication entre le bois usiné. Qu'est-ce qu'il foutait là ? Comment avait-il pu finir dans ce clapier ? La dernière chose dont il se souvenait c'est d'un choc. Un choc terrible et sourd qui avait raisonné jusque dans sa colonne vertébrale. Un impact tellement puissant qu'il s'en était désarticulé. Il s'était senti sortir de son corps qui venait instantanément de se liquéfier pour venir se réveiller dans un corps meurtri et douloureux, complètement à poil et avec une laisse en métal qui le retenait dans ce cachot.
Hier soir pourtant tout se déroulait à merveille. Une maison, puis une autre dans ce lotissement de banlieue. En période de vacances d'été, la plupart des habitations vides offraient une véritable mine d'or pour ce voleur à la petite semaine. Il avait toujours fait ça. De petits larcins ci et là, des arnaques, des cambriolages. Il gagnait plutôt bien sa vie en dépouillant un peu celle des autres. Ça avait toujours fonctionné. Il ne s'était jamais fait attraper. Et pour cause, il était extrêmement précautionneux. Il ne chapardait jamais quelque chose de trop lourd, de trop cher ou de pas suffisamment revendable rapidement. Il avait visité trois maisons hier soir en l'espace d'un éclair. Des montres, du liquides, quelques bijoux, un peu de matériel informatiques. Les affaires tournaient. Puis il avait déjà bien entamé la quatrième baraque de la nuit qui d'ailleurs ne donnait vraiment pas grand-chose avec son mobilier certes de goûts et ses dressings de grand standing mais peu de choses empruntables. Rien dans les poches des vestes, rien de planqué sous l'évier et c'est en ouvrant silencieusement un tiroir quasi vide que tout se brouilla. Son cerveau se déconnecta et ne le rappela à l'ordre qu'une fois dans sa cellule. Il ignorait combien de temps il avait dormi, depuis combien de temps il croupissait là. Les nœuds des planches de résineux ne lui donnèrent aucune réponse. Le silence total. Il pouvait s'entendre penser. Les fesses sur le béton froid il ruminait sa peur.
Tout à coup un chahut se fit entendre à travers la pièce. Un grincement strident de bois vint effleurer l'échine de notre captif qui partit se recroqueviller dans un coin de la pièce obscure. Son collier de bagnard l'empêchait de rentrer totalement la tête entre ses jambes. Des bruits de pas raisonnaient de plus en plus fort sur un rythme lent et glaçant. Quelqu'un approchait. Des marches d'escalier probablement en bois, grinçaient sous chaque pression qu'elles subissaient, allant jusqu'à faire craquer toute la structure qui l'entourait. Un timbre sourd indiquait qu'IL venait de poser son pied sur le sol. Du fond de sa geôle, le prisonnier devinait une gigantesque forme humaine à travers les fissures de la palissade obstruant le peu de lumière qui y passait.
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Il y a les un puis il y a les autres.
General FictionUn cambrioleur à la petite semaine se réveille dans un cachot, nu et enchainé après avoir reçu un coup derrière la tête lors de son dernier cambriolage. Une porte grince, de lourds pas font trembler tout le plancher en bois miteux sur un rythme lent...