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Rachid serrait les dents. Ça lui tirait les chairs encore plus que d'habitude.

Le plan était simple pourtant : Casser la gueule au nouveau codétenu en guise de bienvenue, l'intimider agressivement du matin au soir, et en faire sa djadja. Le réduire à l'état de serviteur, de larbin prêt à exécuter le moindre de ses ordres sur un claquement de doigts, que ce soit pour planquer un téléphone à la vue des surveillants ou pour lui sucer les boules. Il bénéficiait en plus du soutien moral et ancestral de ses congénères maghrébins dans la cour de la prison ce qui rajoutait un appui de taille pour faire fermer sa gueule à son futur colocataire. Une logistique parfaite, rien ne clochait dans le protocole. Il suffisait de le mettre en œuvre. C'est donc avec un capital confiance en lui-même à budget illimité qu'il sauta dans ses Nike Tn lorsqu'il entendit le verrou de porte claquer sous l'assaut de la clefs du maton. Il avança en dandinant des épaules en direction du gardien tout en mastiquant du vide entre ses molaires. L'homme en uniforme fit un geste en regardant dans la coursive et annonça sur un ton monocorde.

« – C'est ta cellule. La promenade est dans quatre heures, bonne installation. » puis il montra le chemin d'un signe de la main.

Rachid était surboosté, remonté à bloc. Il avait même secrètement imaginé se faire tranquillement branler avant la prochaine promenade. Fantasmant faire comme les caïds de son acabit et disposer de sa boniche personnelle directement dans sa piaule.

Il avança encore d'un pas décidé puis s'écrasa le pif dans une montagne de muscle dont la barbe lui piqua son crâne rasé. Etonné, il recula mécaniquement d'un pas pour mieux comprendre dans quoi il avait buté. Derrière la porte claqua dans un tonnerre d'acier et le verrou la condamna.

Le colosse baissa les yeux pour les plonger dans les siens, impassible. Sa respiration était lente et silencieuse, ses dotations de linges de lit sous le bras. Rachid tenta quand même une intimidation en pointant durement son index sur la poitrine du nouveau :

« – Alors que je t'explique fils de pute, ici c'est moi qui comman... ».

Une torgnole vint cloitre subitement le plaidoyer. Le crane du mac en carton fut propulsé contre le mur de la cellule en béton armé et sonna illico la fin du round. Quelques coups supplémentaires envolèrent toute espérance d'une quelconque entente cordiale entre l'homme et la bête, puis Rachid eu le droit de boiter durant sa promenade.

C'était il y a trois mois. Et aujourd'hui, comme tous les jours, Rachid se retrouvait le pantalon sur les genoux, à quatre pattes et la gueule dans l'oreiller à se faire sodomiser par le colosse qui en avait fait son vide-couille. L'énorme bite façonnait l'anus du caïd de quartier à chacun de ses coup de reins. Parfois il prenait son temps, parfois c'était juste un coup comme ça, pour se détendre. Il lui fallait trouver un hobbies pour occuper ses douze années de prison à venir et le trou-du-cul de Rachid en fera un bon. Un accord tacite et silencieux entre les deux hommes disait que l'un serait la serpillère à foutre de l'autre au sein de la cellule, une fois celle-ci refermée. Et que l'autre ne dirait rien à personne en dehors de la cellule. Laissant Rachid s'imaginer une vie et sauver son honneur comme il le pouvait en promenade devant ses copains, même s'il chiait du sperme matin et soir.

« – Non mais dans la cellule c'est moi qui fait la loi. Mais comme il est gentil t'as vu, wallah je le laisse tranquille. ». Suait-il.

Ses amis acquiesçaient généralement d'un mouvement de tête même si secrètement ils mettaient sérieusement en doute la véracité des faits quand il voyait Gunter, en Rangers bouclée jusqu'au mollet, soulever deux fois plus lourd que quiconque sur le banc de développé couché installé en gymnase extérieur dans un coin de la cour. Ou bien massacrer le sac de frappe. Mais bon, en prison le silence est de mise.

Tellement d'ailleurs que parfois Gunter lui scotchait l'oreiller sur le visage pour qu'il ne fasse pas trop de bruit quand il lui enfonçait son énorme dard dans le cul entre deux sorties promenade. Le volume de la cellule étant relativement exiguë, la résonnance des cris le dérangeait.

Eternel recommencement qu'est la vie à l'instar d'un coup de bite qui s'enfonce et qui s'échappe d'un cul pour recommencer inlassablement la manœuvre l'instant d'après. Il y a le jonc qui bourre et il y a le cul qui est bourré. Le Dominant, le Maitre, l'Alpha qui peu importe la situation et le contexte, encule. Et il y a le Soumis, le Faible, la Lope qui se fera enculer.

Il y a les uns et puis il y a les autres.

Jean Surin



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Il y a les un puis il y a les autres.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant