Chapitre 2 - Mauvaise nuit à l'hôtel

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Dans la voiture, conduite par Irwan, Tanguy et Martial récapitulaient ce qu'ils savaient de l'affaire sur laquelle on les envoyait, prolongeant leur journée de travail alors qu'elle aurait pourtant déjà été normalement terminée – c'était parfois agaçant d'avoir une conscience professionnelle – mais cela ne représentait que peu d'informations.
Tout ce que Julie leur avait expliqué, ce qui représentait également tout ce qu'on lui avait transmis par téléphone, était qu'un homme, qui s'était présenté comme le gérant d'un hôtel, avait demandé de l'aide car il semblerait qu'un meurtre avait été commis dans une chambre de son établissement.
Il n'avait pas lui-même vu la scène de crime mais avait précisé que c'était une autre personne venue rendre visite au client ayant loué la chambre en question qui avait découvert le corps et, totalement bouleversée, en avait averti l'homme qui avait donc prévenu la police, en ajoutant qu'il ne pensait pas qu'il s'agissait d'une mauvaise plaisanterie, même si il n'était pas allé vérifier de lui-même, à en juger par l'état de la jeune femme qui l'avait poussé à téléphoner aux autorités.
Normalement, si l'homme avait correctement suivi les instructions données par Julie, et il n'y avait aucune raison pour qu'il ait agi autrement que comme ordonné, il ne s'était pas approché de la scène de crime dont il avait empêché l'accès à quiconque et avait retenu la personne qui avait découvert le crime pour qu'ils puissent l'interroger.
Suivant les indications du GPS dans lequel Irwan avait rentré l'adresse qu'on leur avait fournie, ils arrivèrent à déstination sans vraiment savoir ce qui les attendait. Comme le leur avait précisé Julie en leur confiant l'enquête, ils arrivèrent face à un petit hôtel sans prétention, sans en être au bouge pour autant, se situant en périphérie du centre-ville, comme il y en avait plusieurs en ville, rien de bien exceptionnel pour l'instant.
En revanche, ce qui était plus surprenant était la présence de caméras. En effet, ils remarquèrent immédiatement plusieurs groupes de presse équipés de différents appareils et tous semblaient se concentrer sur l'hôtel.
Les trois policiers échangèrent un regard circonspect en quittant la voiture, se demandant quelles étaient les raisons de cette foule de journalistes, mais tous ce qu'ils purent mutuellement se répondre fut des haussements d'épaules. Julie n'avait absolument pas évoqué les médias en leur partageant le peu d'informations qu'elle possédait sur le crime.
Le plus évident semblait que la presse avait été avertie entre l'appel au poste et leur arrivée sur les lieux mais passé par qui ? Et pour quelles raisons ?
D'ailleurs, pour que les médias soient présents avant même les autorités, ils devaient avoir flairé une grosse affaire.
La victime aurait-elle été connue ? Pourtant, le gérant de l'hôtel ne leur avait pas donné l'identité de son client.
Les réponses à ces questions viendraient certainement lorsqu'ils débuteraient véritablement leurs investigations et qu'ils auraient récolté des informations supplémentaires.
Pour l'instant, il leur fallait accéder à la scène de crime et, pour ce faire, ils devaient se frayer un passage à travers les journalistes. Ils préférèrent d'abord le faire discrètement sans se démarquer, souhaitant ainsi éviter d'être ciblés par les interrogations des médias.
Non seulement cela les ralentirait mais les mettrait également en mauvaise posture comme ils ignoraient tout de l'affaire pour le moment, certainement encore plus que les journalistes, sans compter que communiquer des informations à la presse agaçait fortement Martial, qui préférait qu'on les laisse se concentrer sur la résolution de l'enquête, et Tanguy portait le même jugement, ayant beaucoup fondé son comportement sur celui de son ancien formateur. Quant à Irwan, il n'avait qu'un poste de subordonné, il se contentait de suivre le mouvement que dictaient les deux inspecteurs.
Tous trois entreprirent donc de se glisser jusqu'à l'entrée de l'hôtel, cependant, alors qu'il traversait la foule, Irwan fut soudainement stoppé par une main qui se referma autour de son bras.
Sursautant à ce contact – il était plutôt tendu alors qu'ils avançaient ainsi vers les lieux d'un crime, d'ailleurs le premier meurtre sur lequel il se retrouvait à travailler – le jeune homme se retourna vivement vers la personne qui venait ainsi de le saisir et il découvrit un homme tenant un micro avec le logo d'une chaine d'informations en continu qui commença à le presser de questions sur ce qu'il s'était produit.
Irwan retint un grommèlement. Évidemment, il aurait dû se douter qu'atteindre l'hôtel à la suite de Tanguy et Martial ne serait pas aussi aisé pour lui puisqu'il était particulièrement repérable de part son uniforme, bien plus que Tanguy et Martial vêtus en civile.
Se dégageant, Irwan tenta d'expliquer qu'ils ne possédaient pour l'instant encore aucune informations à partager à la presse, qu'ils ne se prononceraient pas sur les faits avant les résultats des expertises et que ce ne serait pas aux meneurs de l'enquête de s'en charger mais que le service communication du poste de police ferait un communiqué dans quelques jours.
Cette réponse, qui était plus un moyen de s'esquiver en signalant qu'il était inutile d'insister auprès de lui, ne suffit pas à repousser la masse des journalistes qui avait commencé à se resserrer autour de lui à la recherche d'une parole inédite qui leur aurait permis de nourrir leur sujet en évinçant la concurrence, et le jeune homme se retrouvait coincé.
S'en apercevant, Martial, qui était à la porte de l'hôtel avec Tanguy, se retourna pour faire face à la foule en brandissant son badge de police le plus haut possible, le bras tendu au-dessus de son crâne, en clamant de sa voix forte, qui porta au-dessus du léger brouhaha s'élevant dans la rue :

Les Yeux du Pouvoir - Tome 5 : Bleu Police [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant