4. L'𝘌𝘵𝘳𝘦 insoutenable

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suisei__

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Parfois, je le déteste.

Souvent, je me déteste.

Et ça m'exècre, ça m'étouffe aussi. C'est ici, là-bas ; dans chaque recoin de mon âme je croise son regard. Et je me dis : Putain Jungwon, toujours pas foutu d'être bien. Bien dans mes bottes, dans mon corps, dans mon être. Pas foutu d'être comme lui. L'être que j'aimerai jouer, ce rôle qui semble cent fois plus soutenable que le mien. Puis ça se mélange, ça devient compliqué. J'ai pas envie d'être lui, je veux être moi. Je veux être moi comme il est lui. Ça paraît simple ; c'est d'une odieuse complexité. Je veux savoir comme il semble savoir, me connaître comme il semble se connaître. Et ce qui est idiot, c'est que je ne pourrais jamais me connaître en lui. Lui est un autre. L'autre semble comme moi pourtant ; comme moi mais en mieux. Une version accomplie de moi-même, terminée - quoi que, ce terme est effrayant quand on parle d'existence -, confortable. C'est ça. Son rôle a l'air plus confortable que le mien. Je sais pertinemment que jamais je ne pourrais changer de rôle. On ne joue même pas dans la même pièce. Une partie de moi ne cesse de me prouver le contraire, que sa pièce est en tout point comme la mienne, qu'elle pourrait l'être tout du moins. Si seulement j'étais comme lui. Comme moi.



Parfois, Yeonjun semble heureux.

Souvent, je pense l'être.

Le doute fait partie de la vie, j'en suis convaincu - devrais-je l'être ? -, alors pourquoi ne semble-t-il pas faire partie de la sienne ? C'est idiot, je me le répète. L'autre aussi a des doutes. L'autre aussi a sûrement des faiblesses, des drames, des pertes, des échecs. Pourquoi leur perspective semble moins douloureuse que ma propre expérience de la vie ? Sûrement parce qu'encore une fois, lui est un autre. L'autre n'est pas moi. Il ne l'est que dans une certaine mesure. Une mesure assez translucide et métamorphe. Une mesure qui ne dépend ni de lui ni de moi, mais un peu tout de même. Mais alors, son bonheur est-il différent du mien, ou ne suis-je jamais réellement heureux ? Pourquoi mon bonheur devrait avoir quelque chose en rapport avec le sien ? Parce que lui est un autre. Et que lui, ça aurait pu être moi. Sauf que je suis moi, et qu'il est lui. Son bonheur semble plus en être un que le mien. Suis-je réellement heureux si je ne le suis pas comme il l'est ? Le simple fait d'en douter ternis la sensation de joie qui tente de m'envahir. Alors, peut-être devrais-je ne pas songer à son bonheur pour pouvoir véritablement être heureux. Peut-être oui.

Pourtant, je ne le fais pas. Aujourd'hui encore je me compare à lui. Je le compare à moi. Aujourd'hui encore Yeonjun semble heureux, et mon sourire superposé au sien semble bien moins sincère, lumineux, cohérent. Il est comme ça Yeonjun ; c'est une sorte de monument, d'idéal si j'ose dire.

Prisme | Recueil collaboratifOù les histoires vivent. Découvrez maintenant