Chapitre 2 : Perry

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Le visage paisible, ma mère est allongée dans ce lit d'hôpital, reliée par des câbles à de nombreuses machines. Elle inspire, puis expire. Son visage est encore plus pâle qu'à l'accoutumée, mais je n'ai jamais vu ces traits si sereins. Et soudainement, elle n'inspire plus, et je sais que c'est fini. Mon souffle se coupe à son tour et je ne sais plus comment faire entrer l'air dans mes poumons. Je l'observe, le bruit strident de la machine dans les oreilles, avec la cruelle impression que le monde est mis sur pause. Pourtant les secondes continuent de s'écouler, et ma vie continue à tomber en ruine. Vu la relation conflictuelle que j'entretenais avec ma mère, je me suis déjà demandé comment je réagirais quand elle mourrait. Je pensais avoir tellement plus de temps.

Et avec cette pensée je reprends doucement conscience que les minutes passent et que les machines continuent de s'affoler. Les infirmières accourent et me poussent afin de constater la mort de ma mère. Et je me réveille.

Plus d'un mois que cette vision tourne en boucle dans ma tête à n'importe quel moment de la journée ou de la nuit. Ou plutôt plus d'un mois que je revis cette scène. Il me faut seulement quelques secondes pour prendre conscience que désormais je suis seule, et qu'en plus d'avoir perdu ma mère, j'ai perdu l'espoir de connaitre mon deuxième parent.

Un mois que je me sens morte moi aussi, car sans le peu d'espoirs que j'avais je ne suis plus rien. Je n'ai plus de but dans la vie.

Je ne vais plus au club et malgré les appels d'Henri, je ne donne pas signe de vie. Je me rend au travail en pilote automatique et je rentre dans la maison de ma mère avec la sensation que quelque chose d'horrible va arriver chaque jour. J'ai la mauvaise sensation d'être épiée et observée. Je n'ai jamais eu ma place dans cette maison et dans cette famille, mais je me sens comme une intrue désormais. 

Le soir de sa mort, il semblerait que ma mère ait foncé de son propre chef dans le vide. Suicide. Pas de trace de drogue ou d'alcool dans son sang. C'est bien la dernière personne que j'aurais imaginé faire ça. Elle qui était toujours si forte et résolue à avancer. 

Le lendemain, je suis retournée à l'hôpital afin de me renseigner sur ces obsèques, et on m'a appris que son corps avait été emmené. Quelques jours plus tard, le notaire m'a appris que c'était dans le testament de ma mère. Elle aura réussi à m'exclure même de son enterrement. La pilule a été très dure à avaler. Elle avait également veillé à vider son compte en banque, et on m'a appris qu'elle n'avait aucune entreprise à son nom. 

Je n'ai plus rien, mais je n'ai jamais vraiment rien eu à moi concernant ma mère. La pilule est tout de même dure à digérer, car j'espérais découvrir que je m'étais trompée toutes ces années et que ma mère avait en fait une grande affection pour moi. 

Les journées se ressemblent et se succèdent et je ne sais plus à quoi me raccrocher désormais. Ma vie était déjà merdique avant mais maintenant elle est merdique et n'a pas de sens.

-Tu es sûre que tu ne veux pas prendre des vacances Perry ?

La voix lointaine de mon patron me ramène à la réalité et je réalise que ça doit bien faire 5 minutes que je suis plantée avec mon plateau à la main au milieu du bar. Il me laisse vivoter depuis le décès de ma mère. Je secoue la tête et reprends mon chemin pour amener les verres à destination. 

Si je n'arrive pas à m'accrocher à ce travail je n'aurai vraiment plus rien d'ici peu. car la seule chose qui ne soit pas réglée, c'est la maison, et pour le moment il faut payer les factures. Je n'ai pas une grosse somme de côté, car ma mère me prenait une grande partie de mon salaire. 

En arrivant à la table je remarque le jeune homme qui récupère sa commande en me souriant de façon appuyée. Ses amis gloussent de façon idiote après une remarque déplacée qu'ils pensent que je n'ai pas entendu.

The Bounce - Perry [Terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant