J'avais prévu de réapparaître le jour des festivités. D'abord caché derrière d'épaisses lunettes et une fausse moustache. Puis aux yeux de tous, à la sortie de l'église, comme quand les jeunes mariés reçoivent les félicitations. Cela aurait eu du panache si tout avait marché comme prévu.
Vint donc le grand jour. Un entrefilet dans le journal de la veille m'avait donné l'adresse de l'église. J'arrivai en avance, afin d'en profiter au maximum. Cette journée m'appartenait, j'avais travaillé dur pour obtenir un tel privilège.
Je m'étais même préparé pour le moment pénible : voir ma femme en deuil, terrassée par la douleur, soutenue par mon fils, solide et digne, lui. Ma disparition laissait un grand vide, c'est sûr. A ce stade, je devais déjà avoir été canonisé, avec les ailes et l'auréole. Entre nous, mieux vaut tard que jamais. Je la vis arriver de loin, dans sa voiture d'un noir de circonstance. Elle se gara comme elle put, aucune raison que cela change aujourd'hui.
A dire vrai, je la trouvai en forme. Elle distribuait des sourires pincés, embrassait ses proches. Je l'aurais crue plus affectée. J'imaginais un visage rendu disgracieux par la peine, le lit des larmes encore tracé sur ses joues creusées. Elle me paraissait même plus belle qu'une semaine auparavant. Mon fils fumait d'un air détaché. De mon vivant, il n'en avait jamais eu le droit ; de fumer, pas d'être détaché bien sûr. Et quand je dis de mon vivant, on se comprend.
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Aux dernières loges de mon enterrement
Storie brevi« La première fois que je suis mort, cela m’a fait tout drôle. Pas tant de mourir finalement, mais parce que c’était nouveau. Je suis décédé de mon plein gré, avec une part d’égoïsme assumée : je voulais voir à quoi ressemblerait mon enterrement. J’...