Malgré le soleil haut dans le ciel, la lumière qui baignait la ville, et le beau temps qu'il y avait, il faisait plutôt sombre dans cette maison. Même en ouvrant grand les rideaux, peu de lumière passait à travers les fenêtres. Les murs de la maison étaient épais, étroits, les pièces petites, bien que nombreuses, et les vitres n'étaient pas grandes non plus. Cette maison avait l'apparence d'une cage, d'une prison, dont on ne pouvait espérer sortir. Pourtant c'était juste une maison, une simple maison.
Il n'y avait personne pour l'instant, excepté Kazutora. Ses parents étaient tous les deux au travail, mais lui, il était entré dans sa période de vacances alors il n'était plus en cours depuis trois jours. En temps normal, il serait dehors, en train de passer du temps avec ses amis, ou alors chez Baji, chez qui il passait le plus clair de son temps. Mais en ce moment, il refusait toutes les invitations qu'on lui proposait, alors il restait seul chez lui.
Le jeune homme grimpa difficilement dans les escaliers. Il n'arrivait pas à faire beaucoup d'efforts en ce moment, c'était sûrement dû à sa sous-alimentation. Kazutora ne l'avait pas remarqué jusqu'à ce que son meilleur ami s'en aperçoive et lui dise, mais il sautait de plus en plus de repas, et maintenant qu'il y réfléchissait, il ne se souvenait pas avoir vraiment mangé depuis un moment. Il pouvait jeûner comme pendant plusieurs jours, sans ressentir de faim, sans même penser à de la nourriture. Il n'aimait pas manger en réalité, alors ce devait être pour ça qu'inconsciemment, il s'était mis à sauter des repas. Ça avait commencé petit à petit.
Il n'avait jamais eu un gros appétit, et puis ses parents ne le nourrissaient pas plus que cela. Mais avant, il mangeait normalement. Et un jour, il avait sauté le dessert. Et le lendemain, il avait aussi sauté l'entrée. Il avait arrêté de prendre des boissons. Des apéritifs. Il avait diminué ses portions de nourriture. Et puis, il avait commencé à ne plus prendre de collation à quatre heures. À ne plus grignoter hors des repas comme il pouvait le faire avec ses amis. Il avait commencé à dormir plus longtemps, pour sauter le petit-déjeuner d'abord, et ensuite pour sauter le repas du midi. Il pouvait volontairement s'endormir plutôt, pour ne pas manger le soir. Il pouvait vomir lorsqu'il sentait quelque chose dans son estomac. Mâcher un bout de nourriture pour se donner l'impression de remplir son restaurant, avant de toute recracher, sans rien avaler. Tout ça sans jamais ressentir le besoin de manger.
Ça avait commencé comme ça, par de petites choses auxquelles on ne faisait pas attention. « Je n'ai plus faim, alors je ne prends pas de dessert. », pas grave, ce sont des choses qui arrivent. « Je me suis levé tard, c'est plus l'heure de manger. », oui, c'était normal. « Je n'ai pas très faim aujourd'hui, je ne vais pas beaucoup manger. ». Ce n'était pas grave, ça arrivait aussi. « J'ai déjeuné tard aujourd'hui, ou bien j'ai beaucoup manger ce midi, alors je ne vais pas manger ce soir. », ça n'avait rien de bizarre. Et toutes ces petites choses qui pouvaient arriver avaient fini par devenir le quotidien de Kazutora. Elles s'étaient immiscées dans sa vie jusqu'à en faire pleinement partie, comme ça, discrètement, sans que personne n'y fasse attention. C'était venu au fil du temps, ces petites choses s'étaient installées dans sa vie jour après jour, sous les yeux de tous, et personne ne l'avait remarqué.
Au final, est-ce que c'était vraiment grave ? Kazutora aimait ça, même s'il ne le faisait pas volontairement au départ. Il aimait sentir son ventre vide, creux, léger, sans rien dedans pour alourdir son corps. Ça le rassurait, ça l'aidait à se sentir bien. Manger le dégoûtait de plus en plus, il avait beau essayer, la nourriture avait un goût de moisi dans sa bouche, la texture pâteuse le répugnait, sentir les aliments passer dans sa gorge, déglutir, avaler, remplir son estomac, tout cela le dégoûtait. Parfois, lorsque l'on mange trop, on peut avoir l'impression de sentir la nourriture au fond de sa gorge et qu'on pourrait presque vomir, « avoir les dents du fond qui baignent » d'après l'expression. Mais ça, Kazutora le ressentait dès qu'il réussissait à avaler quelque chose, même si ce n'était qu'une infime part de nourriture. Alors il ne mangeait pas, et ça lui convenait très bien, même si ça lui prenait toutes ses forces.
Kazutora réussit à arriver à l'étage et se dirigea vers la salle de bain. Il entra dans la pièce en traînant les pieds, ferma la porte derrière lui, et s'approcha du lavabo pour croiser son reflet dans le miroir. Ses mèches blonde et noire étaient désordonnées et tombaient négligemment sur son visage pâle. Ses joues s'étaient creusées depuis un moment, et ses yeux semblaient plus éteints que jamais aujourd'hui. Son corps tremblant peinait à tenir debout, ses longs doigts effilés étaient crispés sur le lavabo, et ses fines jambes menaçaient de céder sous son faible poids. Kazutora se dévisagea longuement, avec un regard aussi dégoûté que s'il était en face d'un véritable monstre répugnant. Mais non, il ne faisait que se regarder. Le jeune homme rassembla ses forces pendant quelques minutes, son corps était presque paralysé, pas par le manque d'énergie, mais par le manque de volonté. Bouger pouvait être une véritable épreuve pour lui, surtout en ce moment. Se lever pouvait lui demander plusieurs minutes, même des heures. Il pouvait se réveiller à huit heures et ne réussir à sortir du lit qu'à midi. Et encore, parfois il réussissait juste à se redresser, à avancer dans sa chambre, avant de s'écrouler au sol en larmes.
Mais le jeune homme finit par réussir à bouger. Il se laissa tomber au sol, près de sa baignoire, et s'assit là un moment. Même s'il n'avait rien mangé depuis un moment, il avait l'horrible envie de vomir. Son cœur battait à toute vitesse dans sa poitrine, si bien que s'en était douloureux. Il frappait ses côtes en faisant résonner chaque coup dans tout son corps, jusqu'au bout de ses doigts, dans sa tête, ses tempes, son cou, ses jambes. Sentir son cœur battre ainsi l'effrayait, il ne comprenait pas ce qu'il lui arrivait.
Fébrilement, le jeune homme défit les cordons de son jogging serré au maximum, il le baissa jusqu'à l'enlever complètement, et le jeta près de lui. Il remonta légèrement le tissu de son caleçon vers son bassin, puis il glissa sa main sous le tapis et tata le carrelage froid un moment, jusqu'à ce que ses doigts se posent sur un petit objet rectangulaire. Il l'attrapa immédiatement et retira sa main sous le tapis, tenant la lame de rasoir entre ses doigts. Il passa ensuite ses mains sous ses cuisses, et tata sa peau près de son entrejambe. Ses doigts finirent par effleurer plusieurs cicatrices, il tourna alors la lame pour la poser sur sa peau et la coupa d'un coup sec.
Une vive douleur crispa sa jambe, mais Kazutora ferma les yeux et soupira de soulagement. Mais si c'était physiquement douloureux, c'était un soulagement mental. Au moins maintenant, il savait pourquoi il souffrait, pourquoi il faisait tout cela. Parce qu'il était incapable d'être heureux comme tous ses amis, parce qu'il n'était pas l'enfant qu'auraient voulu avoir ses parents, parce qu'il était si faible qu'il n'était pas capable de se défendre lorsque son père levait la main sur lui, parce qu'il n'était pas capable de dire à Baji qu'il allait mal, parce qu'il n'était pas capable de demander de l'aide, parce que la seule chose qu'il réussissait à faire, c'était dormir, dormir, dormir, dormir et dormir.
Parce qu'il n'y avait que ça au final, il n'y avait que son sommeil déréglé, ses nuits irrégulières et fragmentées de cauchemars, ses troubles alimentaires qui détruisaient son corps, ses larmes, sa douleur, ses bleus sur le corps, ses cicatrices entre les jambes, ses vomissements, son anxiété, sa gorge qui se serrait, son corps qui se paralysait, et juste sa putain de dépression dans laquelle il s'enlisait un peu plus chaque jour, dans laquelle il tombait, dans laquelle il sombrait, s'étranglait, se perdait et mourait. Juste ça ! Il n'y avait que ça ! Parce qu'au final, il n'y avait que sa dépression.
Il se noyait dedans et s'étouffait avec, il rêvait d'elle, pensait à elle, agissait avec elle, vivait avec elle. Parce qu'il n'y avait que ça dans sa vie, la dépression, la dépression, la dépression, la dépression et seulement la dépression.
Il ne se résumait plus qu'à ça. Son monde tournait autour de ça et il ne pouvait plus vivre correctement. La dépression le faisait dormir la journée pour ne pas vivre, elle le tenait éveillé la nuit pour l'enfermer dans sa solitude, à pleurer dans son lit sans savoir pourquoi pendant des heures, elle le faisait s'enfermer dans son sinistre monde et refuser de voir ses amis, elle le faisait vomir jusqu'à cracher du sang, elle le faisait cracher tout ce qui entrait dans sa bouche, elle le faisait se paralyser jusqu'à ne pas réussir à bouger, elle le faisait enchaîner les crises d'angoisses dès qu'il devait faire quelque chose. Elle le faisait aller tellement mal qu'il ne savait même plus pourquoi est-ce qu'il était comme ça, et comment il en était arrivé là, elle le faisait se sentir plus bas que terre, faible, comme un déchet laissé au bord de la route, comme une petite bête abandonnée qui faisait plus pitié qu'autre chose. Elle le détruisait chaque jour à grand coup d'angoisse, elle lui donnait des crises de larmes sans raison, elle lui tordait le cœur jusqu'à le réduire en miettes. Elle le faisait se sentir vide, comme une coquille abandonnée, comme une fleur fanée.
Il était une fleur de cerisier tombée de son arbre, qui périssait lentement près de celui qui lui avait donné la vie, et sous les autres fleurs qui continuaient de s'épanouir. Et oui ! Il était comme ça ! Kazutora mourrait lentement, comme un petit feu cesserait de crépiter et de faire des étincelles. Kazutora mourrait, au milieu de ses amis, qui eux vivaient pleinement, qui souriaient, qui riaient, qui s'amusaient. Et lui il était là, bloqué, à juste aller mal et à se perdre dans sa douleur.
Il était bloqué dans le labyrinthe qu'avait créé sa dépression, et aujourd'hui, il ne pouvait plus en sortir. C'était comme ça, il n'y avait pas de remède.
La seule chose qui pouvait le soulager, c'était de faire ça. De prendre une lame de rasoir, et de tracer des lignes rouges entre ses cuisses, de faire couler son sang sur le carrelage blanc, de se faire perdre toutes ses couleurs, de faire jaillir sa vitalité de ses veines pour se sentir vivant, et de se faire du mal lui-même. Parce qu'enfin, il savait pourquoi il faisait ça, et il savait qu'il le méritait. Ça donnait un maigre sens à sa souffrance, et ça le faisait tenir.
Mais aujourd'hui ce n'était plus assez. Depuis un moment, son addiction à la mutilation n'était plus suffisante, et ça ne le soulageait plus autant qu'avant. C'était juste trop. Tout dans sa vie était trop, et des coupures ne pouvaient pas mettre fin à ses problèmes ou lui faire oublier.
Kazutora s'endormait à l'envi de ne jamais se réveiller, et chaque fois qu'il ouvrait les yeux, des larmes tombaient sur son visage, parce que oui, il était toujours en vie. Il ne pensait plus qu'à cela en ce moment. Mourir, mourir, mourir. Cette pensée horrible était devenue obsédante et rassurante. Il en avait besoin, il n'en pouvait plus de cette vie. De devoir se lever chaque jour. Partir à l'école et sourire à ses amis. Essayer de se concentrer et de travailler. Voir cette lueur d'inquiétude de plus en plus présente dans les yeux de Baji. Lui répéter en permanence que tout allait bien, alors qu'il était secrètement en train de s'effondrer. Rentrer chez lui et attendre le retour de ses parents dans l'angoisse. Voir sa mère arriver en première, la voir atterrée, anxieuse, et presque déçue de le voir encore là. Voir son père revenir.
Le voir lever sa main sur lui. Sentir ses coups. Entendre ses mots aussi blessants qu'une lame acérée. Être humilié. Recevoir des objets en pleine figure. Se recroqueviller sur soi. Fermer les yeux et attendre que ça passe. Retourner dans sa chambre. Se couper. Pleurer. Et dormir en espérant ne pas se réveiller.
C'était trop pour Kazutora, il ne pouvait plus supporter de vivre cet enfer, il n'avait pas les nerfs assez solides pour ça. Il n'y arrivait plus, il ne voulait pas continuer. Il voulait juste se reposer...
Le jeune homme hoqueta à travers ses larmes. Il leva ses mains couvertes de sang devant lui, ses doigts tremblaient tellement qu'ils en lâchèrent la lame. Il était agité de spasmes, hystérique, et il ne voyait presque rien à travers ses larmes, alors qu'une vague de pensées sombres déferlait dans son esprit. Il reposa ses mains à l'intérieur de ses cuisses et chercha ses coupures, il griffa sa peau, agité de sanglots, et ouvrit davantage ses blessures en se mettant à hurler de douleur.
Mais ce n'était toujours pas suffisant. Tous ses sentiments s'entrechoquaient violemment en lui, il se sentait explosé de l'intérieur, et plus aucune de ses pensées n'était compréhensible. Le jeune homme finit par tourner la tête vers le meuble près de lui. Il ouvrit d'un geste brusque le tiroir du bas et attrapa le pot qui contenait des calmants. Sans réfléchir, il ouvrit le pot et remplit sa main de cachets, avant de soudain tout avaler d'un geste désespéré. Il n'avait plus rien en tête, juste de la douleur, terriblement forte, et l'envie de s'endormir pour toujours.
— KAZUTORA, hurla soudain quelqu'un.
Le jeune homme sursauta violemment et tourna la tête vers l'entrée de la salle de bain. Il ne voyait presque rien à travers ses larmes, et son cerveau ne parvenait plus à réfléchir, mais il réussit à voir une chevelure noire se précipiter vers lui et le visage de son meilleur ami se dessiner en face du sien. Avant qu'il n'ait le temps de réagir et de comprendre ce qu'il se passait, Baji lui arracha le pot des mains et le jeta à l'autre bout de la pièce. Il frappa le mur et se brisa en mille morceaux, alors que des pilules blanches se répandaient au sol.
— QU'EST-CE QUE T'AS FAIT, hurla Baji en prenant son visage entre ses mains.
Kazutora ne réussit pas à répondre. Ses forces le quittaient déjà, il comprenait à peine ce qu'il lui disait. Baji le tira alors vers lui avec hystérie et le traîna de force vers les toilettes, qui se trouvait dans la même pièce. Kazutora se débattit du mieux qu'il put, mais son meilleur ami le redressa avec puissance et mit sa tête au-dessus de la cuvette.
— LÂCHE-MOI, hurla-t-il en le frappant pour se débattre.
— KAZUTORA RECRACHE TOUT DE SUITE CE QUE T'AS AVALÉ, hurla Baji en maintenant bon sa prise.
— DÉGAGE, s'égosilla le jeune homme à travers ses larmes. DÉGAGE, DÉGAGE, DÉGAGE, DÉGAGE, DÉGAGE !
— RECRACHE ! PUTAIN RECRACHE !
— NON ! LÂCHE-MOI, ME TOUCHE PAS !
Baji ne le laissa pas parler. Il le força à ouvrir la bouche et enfonça ses doigts dedans pour le forcer à vomir. Kazutora se débattit avec hystérie, mais sa réaction fut immédiate. Il se mit à vomir aussitôt, Baji le serra contre lui en tenant ses cheveux en arrière, alors que le jeune homme pleurait violemment et secouait la tête.
— Je veux pas, je veux pas, gémit-il en essayant de se reculer. Laisse-moi, je veux pas, je veux pas...
— Allez encore une fois, dit Baji d'une voix tremblante. Tu dois tout recracher...
— Non... NON, A-ARRÊTE, hurla Kazutora en s'agitant comme une furie.
Mais Baji enfonça de nouveau ses doigts et il ne put s'empêcher de vomir une nouvelle fois. Il sentit les pilules remonter dans sa gorge et ressortir d'un coup de sa bouche, suivit de violent toussotement.
— E-Encore un peu, t-t'y es presque, dit Baji en pleurant à son tour.
Il appuya de nouveau au fond de sa gorge et le fit de nouveau vomir. D'autres pilules tombèrent dans la cuvette, mais Kazutora était loin d'avoir tout recraché. Il repoussa son meilleur ami avec toute la force qu'il avait et se releva en chancelant. Il se précipita vers les pilules et les bouts de verre qui jonchaient au sol, mais Baji le rattrapa et le ceintura violemment pour le paralyser.
— DÉGAGE, ME TOUCHE PAS, DÉGAGE, DÉGAGE, cria Kazutora en le frappant.
— Kazutora calme-toi...
Le jeune homme réussit à le pousser au sol. Il se précipita vers les pilules, le corps tremblant, et les attrapa une à une pour tenter de les avaler. Mais son meilleur ami revint à la charge, il attrapa son bras et le tira brutalement en arrière pour l'obliger à lâcher les pilules. Kazutora tenta de résister, mais Baji avec beaucoup plus de force que lui, et il fut forcé de lâcher les pilules au sol. Baji attrapa ensuite son torse avec puissance, il le traîna de force en arrière et réussit à les faire sortir de la pièce. Il ferma difficilement la porte derrière lui et se plaqua contre, en continuant de ceinturer le jeune homme.
— LÂCHE-MOI, cria Kazutora alors que sa tête commençait à tourner. JE VEUX PAS, JE VEUX PAS, je veux pas...
Ses forces le quittaient, il n'arrivait plus à tenir debout, son sang continuait de couler abondamment sur ses jambes, et ses larmes lui prenaient ses dernières forces. Il s'écroula lentement contre son meilleur ami en l'entraînant dans sa chute, et ne put que pleurer douloureusement contre lui. Baji l'enlaça en lui murmurant des paroles réconfortantes, il caressa sa tête en sortant discrètement son téléphone, et appela l'hôpital d'une voix tremblante.
— Ça va aller, je suis là, murmura-t-il lorsqu'il eut terminé l'appel. Je suis là...
— Je te déteste, réussit à crier Kazutora entre deux sanglots. T'as tout gâché, je te déteste ! Je te déteste !
— Tout va bien Kazutora, tout va bien..., murmura son meilleur ami en caressant ses cheveux.
— Tu m'as enlevé la seule chose à laquelle je pouvais m'accrocher, cria Kazutora en frappant sa poitrine. La seule putain de chose qui me faisait aller bien, LA SEULE !
— Je sais... j-je sais...
— Je te déteste..., murmura Kazutora avec ses dernières forces. Je te déteste...
Baji ne répondit pas. Il le serra contre lui avec force, comme s'il cherchait à le réchauffer de ses bras, et posa sa tête contre la sienne. Lui aussi sanglotait, Kazutora pouvait sentir ses larmes couler abondamment sur son visage et tomber sur ses propres cheveux, il sentait son cœur battre vite, contrairement au sien qui ralentissait. Il avait du mal à réaliser ce qu'il se passait, il ne comprenait pas, il n'était même pas sûr de vivre tout ça. Il ne sentait plus rien, tout ça lui paraissait lointain. Il ne sentait même plus le sang qui coulait entre ses jambes.
Les deux jeunes hommes restèrent longtemps comme ça. Kazutora finit par s'immobiliser, bloqué dans un étrange état entre le conscient et l'inconscient. Il était toujours éveillé, mais il n'était plus vraiment là. Il partait lentement, toutes les pilules qu'il avait avalées étaient toujours là, même s'il en avait recraché, il y en avait encore trop dans son ventre.
Et Baji continuait de le tenir, pleurant silencieusement. Ses larmes semblaient ne plus pouvoir s'arrêter, et il tremblait tant qu'on pourrait croire que c'était lui qui était en train de partir. Il était en total état de choc, incapable de réfléchir, il ne pouvait plus que se répéter qu'il était en train de perdre son meilleur ami. Et malgré cela, il continuait de le serrer dans ses bras, de le tenir avec force, et de le rassurer autant qu'il le pouvait.
Ce n'est qu'après un moment qui lui sembla interminable que des sirènes se firent entendre.
Kazutora ne bougea pas, et Baji eut du mal à réintégrer son corps. Mais lorsqu'il vit des hommes en blouse blanche apparaître dans les escaliers et se précipiter vers lui, il réussit à se redresser et à lâcher son meilleur ami. Il le confia aux secouristes pour qu'ils l'allongent sur une civière, puis il les suivit dans les escaliers, sans quitter une seule fois Kazutora des yeux, et on le conduisit dans l'ambulance qui était arrêtée devant la maison des Hanemiya.
Baji était ailleurs. Il ne se rendait plus compte de ce qu'il se passait autour de lui, il ne comprenait pas les questions qu'on lui posait, tout se bousculait dans sa tête, et il était juste totalement bloqué. Il n'arrivait pas à parler, ni à être vraiment là. Il pouvait seulement regarder le corps inerte de son meilleur ami, ses paupières qui clignaient faiblement, les larmes qui avaient tracé de longs sillons rouges sur ses joues, sa peau d'une horrible pâleur, et le sang qui couvrait ses jambes. Il y avait tellement de sang, et tellement de coupures... tellement...
Les médecins finirent par abandonner les questions. Ils voyaient bien que Baji n'était pas capable de répondre, qu'il était en plein état de choc. Ils le firent alors s'asseoir près de son meilleur ami et posèrent un masque à oxygène sur leur visage, ainsi qu'une couverture de survie sur leur corps, avant de brancher une perfusion dans le bras de Kazutora.
Baji leva une main tremblante et caressa les cheveux de son meilleur ami. L'air qu'il recevait lui faisait du bien, et sa couverture lui tenait chaud, mais il n'arrêtait pas de trembler pour autant et il pleurait toujours.
— Qu'est-ce qu'il m'arrive, murmura Kazutora d'une voix lointaine.
— On va prendre soin de toi, réussit à répondre Baji.
— Oh... je... J-Je suis désolé... de te faire ça...
Baji secoua la tête, faisant tomber des larmes sur son visage.
— C'est pas grave, dit-il d'une voix étranglée. Je t'en v-veux pas...
Kazutora regarda un instant autour de lui, l'air totalement ailleurs.
— Je me sens pas bien, finit-il par chuchoter.
— Je sais... Je sais...
Baji fondit en larmes sans réussir à tenir bon devant son meilleur ami. Il sentit à peine la main d'un infirmier se poser sur son épaule, alors que Kazutora lâchait finalement prise et sombrait dans l'inconscient.
Qu'était-il en train de leur arriver...─────── ༻𖥸༺ ───────
C'est parti pour une nouvelle histoire, j'espère que vous aimerez même si c'est sombre 👀
Zoubi zoubi
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Le fil de ta vie
FanfictionIl s'agit là d'une petite histoire tirée de ma fic Insta Tokyo Revengers, mais vous pouvez comprendre même si vous ne l'avez pas lu :) Ces quelques chapitres les moments douloureux qu'ont vécu Baji et Kazutora lorsque ce dernier a essayé de se suici...