[CHONI] CONTRE TOUTE ATTENTE

10

Nous montons dans ma voiture et Cheryl balade son regard sur ma tenue.

- J'aime cette facette de toi, Toni.
- Je voulais essayer quelque chose de nouveau.

À peine démarré que je me faufile dans la circulation. Le bruit des klaxons fuse de tous les côtés. Cheryl regarde nerveusement dans le rétroviseur extérieur et s'enfonce dans son siège.

- Finalement, l'aventure sera ta conduite !
- Je crois que je vais prendre ça comme un compliment.
- Tu es énergique, c'est déjà ça.
- Ce n'est pas si effrayant que ça en a l'air. La ville, la campagne, c'est la même chose.

Elle me sourit à moitié, mais ne conteste en rien mes propos.
Je prends une sortie qui se trouve à ma gauche et tombe dans les bouchons. Je vois les yeux de ma passagère se fermer lorsqu'un taxi passe à toute vitesse.

- Je déteste vraiment la circulation dans toutes les villes !
- Donc tu ne conduis jamais toi-même, Cheryl ?
- Non et je ne changerai pas cela. Pour rien au monde.
- Peut-être que c'est une bonne chose que tu t'en tiennes à être passagère.
- Et pourquoi ça ?
- Comme ça je peux frimer et avoir le luxe d'avoir le volant.
- C'est ce que tu es en train de faire, Toni ? De frimer ?

Je change soudainement de file et passe entre deux voitures. Ses mains se crispent aussi rapidement que mon changement de voie.

- Tout va bien, Cheryl ?
- Ouais, ça ne peut pas aller mieux.

Je lui souris, mais celui-ci s'efface quand je vois tout le monde s'arrêter.

- Eh bien, tu n'es pas près de t'arrêter de stresser.
- C'est dans des situations comme ça qu'il y a des accidents.
- Pas si tu es une experte.
- Donne-moi une seule bonne raison de faire confiance à ta conduite...
- Ne t'en fais pas jolie rivale dans ma voiture, tu arriveras entière.

Ses yeux sont remplis d'espoir malgré que les voitures autours freinent. À mon second coup d'œil vers elle, ses yeux sont clos et ses lèvres bougent silencieusement.

- Tu pries ?
- Non ! Je compte, je me concentre sur autre chose pour oublier les bouchons. Je croyais que tu avais des talents ? Pourquoi sommes-nous encore coincé ici ?
- Je n'ai pas le choix que d'attendre, on est complètement coincé.

Une voiture tente un changement de voie audacieux et manque de se faire percuter.

- Visiblement, tu as raison. Dit-elle les yeux écarquillés.

Nous sortons de cette situation au bout de deux heures. C'est seulement près des bois et loin des grattes-ciels que Cheryl se détend. Je baisse ma fenêtre pour avoir un peu d'air.

- C'est bien mieux.
- Il n'y a personne ici, c'est ennuyant.

Les heures passent, le soleil tape contre le pare-brise. Une chanson que j'aime passe à la radio alors, je monte le son pour chanter. Cheryl coupe mon solo en me montrant du doigt un petit chemin. Je suis son indication et nous nous enfonçons dans un champ.

- C'est une ferme laitière ?
- Ouais, en quoi c'est intéressant, Cheryl ?
- Des vaches aussi jolies que douces !
- T'es qui toi ? Elle est où Cheryl Blossom !
- Je ne sors jamais de la grande ville. On entend parler des vaches, mais on ne les voit jamais. Comme les lutins ou la petite souris.

Je la regarde quelques secondes et prends la sortie pour cette fameuse ferme.

- On y va vraiment ?
- Le voyage peut attendre. Ç'a l'air de te donner envie.
- Tu n'es pas obligé, il ne faut pas qu'on prenne du retard.
- Nous avons le temps, Cheryl, je t'assure.
- Alors merci.