On lui chuchote à l'oreille, ou peut-être qu'on crie, parce que la musique est assourdissante. Une Monster à la main, rallongée à la vodka, elle est étendue dans une vieille causeuse au velour défraîchi. C'est Quentin qui lui parle, son haleine alourdie par la tequila s'écrase contre sa joue, et elle rit brusquement. L'alcool ralenti ses pensées et le monde l'amuse, soudain.
Des lèvres sur les siennes. Humide, un goût de tequila, une langue joueuse. Elle passe une main dans les cheveux courts de son ami, avant d'envoyer la tête en arrière dans un rire à gorge déployée. Il lui fait un clin d'œil, puis se tourne vers Bryan qui chevauche l'accoudoir droit de la causeuse. « Dis mec, on s'embrasse ? », et à nouveau la langue de Quentin n'est plus dans sa bouche. Jules regarde la scène, d'un œil plus intéressé que jaloux, et c'est ce qui la décide à partir.
L'air du garage réaménagé en bar est enfumé, les stroboscopes projettent des halos d'arc-en-ciel dans les volutes de fumée. C'est soirée privée cette nuit à l'AR, réservée aux habitués et aux amis. Exceptionnellement, Lise a accepté qu'on fume à l'intérieur, et les vapeurs psychotropes rendent l'air opaque.
Elle finit sa canette, et marche jusqu'à la poubelle d'une démarche flexueuse, zigzaguante. Puis, elle rejoint la piste où elle se lance à corps perdu. Une épaule, un dos dans le sien, une odeur moite de sueur, de parfum et de beuh. Les mains en l'air, elle se déhanche avec ardeur, soutenu par les corps qui se pressent au sien, le regard extatique tourné vers les lumières irisées.
Plus tard, ses membres sont fatigués, elle se sent poisseuse de sueur. Elle s'isole de la foule doucement, on lui propose un joint. Elle ne reconnaît pas l'autre homme, mais elle fait confiance à ceux qui sont ici. Elle l'attrape, et le briquet qu'il lui tend avec, un sourire jouant sur ses lèvres. Elle le dévisage, des lunettes rondes, des cheveux bruns, une moustache discrète. Elle doit lever les yeux, il est un peu plus grand qu'elle.
À nouveau dans un canapé, elle rit. Son nouvel ami lui a dit son nom, mais elle l'a oublié, ou peut-être ne l'a-t-elle jamais entendu. L'effet planant de la beuh est merveilleux, mais c'est ce qu'il lui a donné après qui est le meilleur. Pas ce qu'elle a goûté de meilleur à ingérer, mais elle lui a fait confiance et moins d'une vingtaine de minutes plus tard, elle vit son meilleur trip. Quand son rire s'achève, elle dévisage à nouveau cet inconnu.
Elle a cru qu'il avait des lunettes mais non ! Ses yeux sont cerclés de pétales de fleurs de toutes les couleurs et c'est magnifique. D'un doigt, elle trace la naissance des pétales en riant, et il rit avec elle.
« Mec, t'es une fleur !
— Évidemment, et toi aussi ! Regarde, on est tous des fleurs ! »
Elle regarde la foule et sourit béatement. Les basses font vibrer sa cage thoracique pourtant le son semble venir de si loin, comme étouffé. Sur ce qu'elle a cru être une piste de danse, c'est une kyrielle de fleurs printanières qui agitent leurs pétales, et elle rit. C'est si bon.
« Barbara... Barb'... Tu devrais pas t'appeler comme ça, c'est supra nul comme prénom. T'as même pas de barbe en plus et...
— Eh ! Laisse mon prénom tranquille espèce de... de, euh... c'est quoi comme mot ça déjà ? Tu sais quand on... 'Fin quand tu mets ton dans... T'es qu'un ponceur de fesses !
— Quoooi ? Nan... Me dit pas que c'est enculé le mot que tu cherchais ? T'es supra vulgaire Barb... Barba.. Barbapapa !
— Ma vulgarité t'emmerde, ponceur de fesses va ! Et ne m'appelle pas Barbapapa !
— Je ne suis pas un ponceur de fesses enfin ! Je suis un... un... un poète ! Un ponceur... de fleurs ! Nous sommes tous des fleurs, Barbapapapapapa ! »

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Alliance Raibow
FanfictionBonus d'In the Street, parce qu'ils méritaient un peu plus que d'être des personnages secondaires. L'Alliance Rainbow, bar gay étudiant, comme théâtre de fond. Un peu trop d'alcool, une fin d'été, des relations qui s'emmêlent, s'éloignent et se rej...