~ Chapitre 6 : Petite frayeur et proposition ~

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~ Chapitre 6 : Petite frayeur et proposition inattendue ~

— Lily, Lily ! 

J'ai l'impression d'être assaillie de toute part et en viendrai presqu'à regretter de ne pas être partie en même temps que ma tante et mon fils, quand Gary et elle ont quitté les lieux après le feu d'artifice pour aller mettre mon petit bonhomme au lit, mais je me suis laissée convaincre par Jo et sa bande que ce serait trop dommage que je ne profite pas de mon anniversaire surprise jusqu'au bout de la nuit et que le groupe, qui allait monter sur scène après l'entracte, valait vraiment le détour. 

Ils ont eu raison. Ils étaient géniaux et je me suis bien amusée, jusqu'à ce que quelqu'un me reconnaisse sur le chemin de retour des toilettes.

J'aurais du rentrer direct au lieu de me laisser dicter ma conduite par ma vessie, mais disons que je l'ai mis à rude épreuve ce soir avec toute l'eau que j'ai avalé, même si j'en ai beaucoup éliminé à travers toutes les pores de ma peau.

J'avais pourtant enfilé un sweater à capuche par-dessus ma tenue de scène, ôté ces lentilles de contact que je supporte mal pour remettre mes lunettes et chaussé une paire de baskets à la place de mes bottines à talons, mais je n'ai pas fait attention où je mettais mes pieds. J'avais la tête ailleurs. Faut dire que j'ai aperçu Candy-man ce soir, dans le public, entouré de filles toutes plus sexy les unes que les autres, en train de tortiller des hanches et d'aguicher pas seulement les membres du Club qui l'accompagnaient. J'ai eu l'impression qu'il me fixait et ça m'a perturbé un instant, mais voir cette superbe black se coller à lui, une main posée sur son biceps, en train de le regarder avec envie, m'a rappelé trop de mauvais souvenirs et cela m'a mise en rogne.

Heureusement Gary m'a interpellé et le sourire lumineux de mon fils, qui gigotait dans ses bras, a réussi à détourner mon attention et atténuer un peu cette douleur, que je croyais profondément enfouie, resurgir d'un passé que j'aurai préféré oublié à jamais, mais qui ne s'est clairement pas assez estompé malgré ces trois dernières années écoulées à l'étouffer.

Pendant que je soulageais ma vessie, j'ai entendu deux filles parler d'un membre de son foutu Club et l'impatience qu'elles éprouvaient et la hâte qu'elles avaient à finir la soirée avec un certain Dumbo en n'épargnant aucun détail de son époustouflante anatomie et ses habituels exploits à celles qui, comme moi, avaient le malheur d'être enfermées en même temps qu'elles, dans une des cabines du bâtiment des toilettes publiques. Heureusement, il n'était à aucun moment question de Candy-man, mais cela a quand même fait remonter à la surface de ma mémoire, des scènes que j'aurais préféré ne jamais revoir défiler dans mon esprit.

C'est sans doute à cause de ça que je me suis faite bousculer par une des filles de la bande, qui venait en sens inverse au moment où je repartais rejoindre les autres, tout en croisant les doigts pour que je ne tombe pas sur Candy-man, ni aucun autre membre des Desert Devils qui m'ont humilié par le passé.

Dans le mouvement, ma capuche est retombée en arrière, exposant mon visage, de toute évidence trop reconnaissable, malgré mes lunettes sur mon nez.

Ils ne sont qu'une dizaine, mais c'est déjà neuf de trop.

On me dévisage. On m'interpelle de tout côté par ce qui semble être devenue mon nom de scène. C'est limite si on me m'apostrophe pas car je ne réagis apparemment pas comme ils le désirent, mais je suis trop abasourdie par ce truc de fou qui me tombe soudain sur le coin de la figure alors que je ne m'y attendais pas.

Je ne sais plus où donner de la tête. Comment réagir. Que dire. Que faire.

Certains me complimentent, d'autres m'acclament. On me demande quand je donnerai mon prochain concert, sans même me laisser le temps de répondre tellement ils s'excitent tout seul. On me sollicite pour faire des « Selfies », comme si j'étais une véritable vedette, alors que je suis juste une ancienne choriste, mis en lumière pour une soirée d'anniversaire éphémère. On va jusqu'à me tirer par les manches, me secouer par les épaules et je rattrape de justesse mes lunettes qui me sont presqu'arrachées du nez dans une bousculade. On envahit mon espace vital bien trop souvent à mon goût et sans aucune gêne, ni autorisation librement consentie et je commence à avoir l'impression de suffoquer sous les relents de bière et de transpiration qui émane du dessous de bras d'un gaillard qui me plaque contre son flanc et pense qu'il suffit de me dire que je suis trop bonne pour me faire sourire sur commande.

Bittersweet (- T3 chez les Desert Devils -)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant