D'amour ou de gloire [EN COURS]

Chapitre 4 : La rencontre

Ça y est. Assise en face de mon reflet, un sentiment de fierté m'envahit en la voyant aussi belle et déterminée. Si toutes les versions précédentes de Luna pouvaient la voir aussi, en robe de soie, ses cheveux longs ondulés tombant en cascade, son smoky eye fumé mettant en valeur ses yeux noisettes et prête à affronter sa plus grande peur pour réaliser son rêve, elles auraient toute une réaction différente... La toute petite Luna serait vraiment impressionnée et la considérerait probablement comme une princesse. La Luna de l'école primaire voudrait la présenter à toutes ses copines. Celle du collège serait peut-être un peu jalouse mais rassurée de savoir que son acné passerait un jour. La Luna timide et réservée du lycée n'y croirait sûrement pas et se frotterait les yeux à plusieurs reprises. Et enfin la Luna adulte, terre à terre, essaierait de la dissuader et voudrait qu'elle retourne sur les bancs de la fac. Mais après quelques instants à méditer cette question, je réalise que cette Luna, c'est bien moi. Je me prépare à faire quelques vocalises quand quelqu'un toque à la porte.

— Entrez.

Je m'attendais à voir le directeur artistique de Magical Records mais je ne cache pas ma surprise en apercevant le visage de Jules Foster dans le miroir. Il s'est changé lui aussi. Il porte un jean boyfriend déchiré aux genoux et une chemise blanche dont les trois boutons du haut sont ouverts et laissent entrevoir un bout de son torse surplombé par deux chaînes en argent. Cet homme est objectivement à tomber. Mais il me faut plus qu'un physique d'Apollon pour me déstabiliser. Une voix incroyablement envoûtante par exemple, me chuchote ma petite voix.

— Hey, excuse-moi de te déranger, t'aurais une laque à me prêter ? Je n'arrive pas à faire tenir cette mèche et ma coiffeuse n'en a plus...

Bizarre comme raison pour entrer dans ma loge mais pourquoi pas, je veux bien lui laisser le bénéfice du doute. Je dois admettre que lui rendre un service me donne l'impression d'être son égale. Comme si cela rattrapait l'immense fossé entre nous. Je me lève pour attraper mon vanity posé sur une étagère et mets quelques secondes avant de trouver la fameuse laque, durant lesquelles je sens son regard posé sur moi.

— Euh, oui, tiens, bafouillé-je.

Je lui tends l'objet et au moment où il l'attrape, nos mains se touchent et nos regards se croisent pour la troisième fois aujourd'hui. D'aussi près, je peux enfin en apprécier leur couleur. Mais ce n'est pas tant cela qui m'impressionne que leur forme, les cils qui les entourent ou la tristesse qu'ils laissent transparaître.

— Merci, répond-t-il en prenant ma place pour se coiffer devant le miroir.

— Fais comme chez toi surtout.

— C'est pas comme si c'était toi qui faisait ma première partie.

Il marque un point.

— Haha, t'as pas tort.

— Bon, Luna c'est ça ?

— Ouais, sauf que le u ne se prononce pas « ou » mais bel et bien « u ».

— Luna ?

— Exactement. Enchantée.

— Moi c'est Jules Foster.

— Sans déconner ? je feins la surprise en écarquillant mes grands yeux et en ouvrant la bouche. Ce qui ne semble pas lui provoquer le moindre rictus. Il continue à se coiffer pendant que je fais mine de répondre à des messages sur mon téléphone portable.

— Alors comme ça, t'es dégoûtée de la vie toi aussi ?

— Hmm, j'ai pas l'impression d'en avoir dit autant non.

— Pourtant tes chansons sont plutôt sombres.

— Ah, tu les as donc écoutées...

— Faut dire qu'il n'y avait pas mieux à faire à cet instant, dit-il en vaporisant une autre mèche de ses cheveux.