Le jour où Robin devint un rebelle

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Cette nuit-là, Louis Serra ne parvint pas à trouver le sommeil. Savoir qu'autour de lui se trouvaient tant d'inconnus et que les Estaffes venaient d'attaquer indirectement l'Élite, ajouté au fait qu'il ne pouvait pas rejoindre Armance, n'était pas fait pour le tranquilliser.

Ses trois nymphettes sillonnaient le dortoir, pour vérifier si les élèves étaient endormis, ce qui n'était malheureusement pas le cas. En son for intérieur, Louis maudissait tous les insomniaques, Helios et descendants d'Helios qui peuplaient le royaume astrien. Si tout le monde s'était décidé à dormir à la même heure, il aurait pu se risquer à sortir du dortoir et trouver un prétexte pour échapper à la surveillance des Cœurs Noirs, ou attendre la relève pour sortir. Hélas, ce n'était pas le cas. Le jeune garçon se tortura l'esprit toute la nuit, s'accordant à peine quelques heures de sommeil.

Au lever du jour, le Prétendant trouva enfin une solution au problème qui le tracassait tant. Il écrivit une courte lettre à sa bien-aimée pour s'excuser de son absence et surtout la prévenir qu'il ne pourrait pas la revoir tout de suite mais entrevoyait une solution. Après l'avoir relue, raturé quelques passages et corrigé une faute, il la tendit à Pimprenelle, qui s'en saisit, la roula et la glissa dans un petit tube cylindrique. Il s'agissait d'un tube vide de rouge à lèvres, appartenant justement à Armance Boidoré, que Louis avait conservé précieusement jusqu'à présent. Ainsi, les parents de la jeune fille laisseraient entrer la nymphette si par hasard Armance n'était pas chez elle, et ne la soupçonneraient pas.

Satisfait par son idée, il se rendormit pour quelques heures, avant d'être réveillé par le vacarme infernal des Prétendants et Apprentis qui allaient prendre leur petit-déjeuner. Les discussions allaient bon train. Une nouvelle annonce de la direction ou des Élitiens ?

Louis jeta un bref regard aux lits voisins du sien sur lesquels Julius et Robin dormaient encore. Les deux Prétendants n'avaient pas le sommeil léger, vu tout le bruit que produisaient les élèves. En fait, ils étaient presque les seuls dans la pièce à dormir encore. Le Prétendant se dirigea vers la sortie de la bibliothèque, qui était gardée par deux Cœurs Noirs. Les services secrets de l'Élite agissaient le visage couvert.

Alors qu'il arrivait vers la sortie, il constata que les élèves restaient agglutinés devant la porte sans vouloir sortir. La raison de ce comportement était en fait une affiche collée sur la porte, qui alimentait les discussions. Apparemment, elle avait été confectionnée par des nymphettes. Louis reconnut les majuscules dorées caractéristiques : l'affiche venait de la direction. Il était écrit :

NOUS AVONS L'HONNEUR DE VOUS INFORMER

QUE LA CÉRÉMONIE DES ÉPREUVES 

AURA LIEU APRÈS-DEMAIN À NEUF HEURES.

Le visage du jeune Prétendant s'éclaira : avec la réouverture du labyrinthe des Bannis, la venue des Cœurs Noirs et la mise en place du fil d'or, il avait cru un instant que les Épreuves seraient suspendues. Il remarqua cependant que cette nouvelle ne réjouissait pas tous les élèves. Si certains paraissaient ravis, d'autres auraient préféré être dispensés d'épreuves. 

En effet, l'École de l'Élite était une école très particulière. Plusieurs fois par an, chaque élève recevait une mission qu'il devait accomplir au service de l'école. S'il la réussissait, il gagnait une branche sur son arbre doré. Mais s'il échouait, en revanche, il était exclus et renvoyé chez lui sans autre forme de procès.

À côté de Louis, un Prétendant qu'il ne connaissait pas murmura :

-Est-ce qu'un jour les Cœurs Noirs vont nous laisser sortir? Je meurs de faim!

Les Quatre InfernauxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant