Centième fois

30 5 0
                                    


La centième fois que je t'ai vu, c'était un samedi, je crois.

Le ciel était rempli de nuages noirs gorgés d'eau.

J'avais envie de pleurer.

Juste, pleurer.

Pleurer tant et si bien que j'aurai pu me noyer dans mes larmes.

Mais je ne pouvais pas. Tout simplement pas.

Ma mère se donnait tant de mal pour ne pas craquer, que je ne pouvais tout simplement pas me le permettre.

Alors je lui ai raconté des blagues pourries, j'ai dit que papa veillait sur nous, depuis là-haut.

J'ai fait tout ça pour elle, et aussi pour moi. J'avais juste besoin de me convaincre que tout allez bien.

Que le monde avait continué de tourner, que rien n'avait changé.

Le monde des autres peut-être.

Pas le mien.

Mon monde s'est brisé en mille morceaux jusqu'à ce que tu te ramènes avec de la colle extra forte, que tu me le recolles et que tu l'agences différemment.

Maintenant, c'est toi qui est mon soleil, celui qui m'illumine.

Mon père est toujours là. Avec maman, ils forment le ciel.

Mais ce jour-là, je n'avais pas pensé à cela.

Ce jour-là, je me suis habillé comme le jour de notre première rencontre.

Je suis allé acheter des bonbons, plus par habitude que par envie.

J'avais mal.

Tellement mal.

Je voulais juste me fondre dans le silence et tout oublier.

Quand je t'ai vu, je n'ai même pas eu la force de sourire.

Moi qui pensait que tu ignorais mon existence même, j'ai été bien surpris lorsque je t'ai vu te figer.

Tu m'observais. Tes yeux passaient à toute vitesse de mes cernes aux coins de ma bouche qui pendaient vers le bas.

Et puis, tu as rougi brusquement et tu es parti aussitôt vers la boulangerie.

Et cette réaction, même si je ne la comprenais pas, m'a fait sourire.

When I saw you for the first timeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant