9 juillet
Cela me brisait le cœur de la voir ainsi. C'est à peine si elle arrivait à sourire sans fermer les yeux de douleur. Ma vision à rayon X me le montrait bien, sa maladie s'étendait dans son cerveau. Cela en était effrayant, comme si il essayait de prendre possession de l'esprit de notre sauveuse, mais elle continuait de sourire en se promenant tranquillement dans son lieux préféré, la bibliothèque.
–Judith..? Vous allez bien? Demandais-je inquiet.
–Bien évidemment, dit-elle en souriant d'un air fatigué.
Elle mentait, c'était évident, elle me prenait encore pour un enfant à protéger. Je ne pouvais pas lui en vouloir, c'était Judith après tout. Une religieuse au yeux de la société, une sorcière pour d'autres, mais dans nos cœurs, elle était une mère.
Une semaine s'était passée depuis l'arrivée de Raphaëlle et Jason. Depuis, l'état de notre mère adoptive s'était énormément dégradé, bien plus rapidement que dans les derniers mois. Même Maëlys, la guérisseuse, d'ordinaire confiante et sans faille, laissait percevoir des onces de peur et d'inquiétude.
–Bon, s'il vous plaît, venez c'est l'heure de l'histoire, déclara Xavier.
D'un coup, tous les enfants se réunirent autour de mon ami alors qu'un silence majestueux s'installa. Il faisait partie de ceux ayant de l'influence dans la maisonnée, tels que Maëlys et Kiran. En retrait, je me mit à compter mes petits frères et soeurs, mais il y avait un problème. Il en manquait deux, les pires, je sentais déjà que ma sécurité était compromise.
Soudainement, de l'eau glacée se déversa sur ma tête. Frigorifié, je n'osais pas bouger, tous me fixèrent. Les enfants rigolaient, Xavier et Kiran me regardaient avec pitié en se retenant de rire et Judith tant qu'à elle regardait au-dessus de ma tête. En levant les yeux également, je vu les deux bambins perchés sur le haut d'une étagère de la bibliothèque. Félix et Pascale, les deux apprentis-diables en chef, mes pires cauchemars. Ils choisissent toujours leur moment pour s'en prendre à moi. Je pourrais leur dire que c'est mal, qu'ils allaient se blesser si ils tombaient, mais je ne disais rien. J'étais prêt à tout pour leur sourires, leur bonheur. Ils ne sont pas idiots, les plus jeunes voient Judith se dégrader, sa santé se fragiliser, donc si j'arrivais à un seul moment dans la journée à les faire sourire, je le ferai. Encore et encore, même si je vois des aiguilles sur ma chaise, des insectes dans mon lit, où un trou dans la cour. Même si j'étais fatigué de me faire marcher sur les pieds, je continuerai, pour ma famille.
–Félix, Pascale! Descendez avant de tout faire tom..
Judith n'eut pas le temps de terminer sa phrase qu'elle glissa sur l'eau étendue sur le sol. Dans un fracas, elle se cogna la tête sur le plancher de bois sous les cris des bambins effrayés. Sous panique, tous les enfants se précipitèrent vers la dame qui s'occupait d'eux, même les démons descendirent de leur perchoir pour rejoindre la blessée.
–Poussez-vous n'ayez crainte, tout va bien..
–Judith, vous êtes sûr? questionna Kiran.
–Persuadée, conclut-elle en se levant avec l'aide des enfants qui voulaient tous l'aider.
Je la regardais inquiet. Elle mentait, encore, parce que les enfants étaient là. Elle ne voulait pas leur faire peur, mais cela avait l'effet inverse. Tout le monde était terrorisé.
–Jaco… fît une petite voix derrière moi.
En me retournant, j'aperçus Maïka, une jeune fille calme et discrète. Elle était du genre à rester en retrait, c'était également la seule jeune qui n'éprouvait aucun plaisir à me jouer des sales tours. Je me pencha à sa hauteur et lui demanda.
–Qu'est qu'il y a Maïka?
–C'est que… j'ai vu.. Dans la tête de Pascale..
Elle ne put terminer sa phrase puisqu'elle explosa en larme, la pauvre petite avait un pouvoir bien particulier. C'était la malédiction des sorciers, au contraire de ce que l'on pouvait croire, on ne pouvait pas pratiquer une très vaste branche de magie. Mise à part avec l'âge ou un don qui permet d'être polyvalent comme Judith. Les enfants maudits comme nous naissent bien souvent avec un pouvoir qui sera le seul qu'il puisse maîtriser jusqu'à la fin de leur jour. Moi par exemple, je suis née avec la capacité de voir à travers le rouge. J'ai réussi à développer mon don pour me permettre de pouvoir modifier ma vue à ma guise. Vision thermique, nocturne, rayon X ou même aiguisé, plus rien de cela n'avait de secret pour moi. Pour en revenir à Maïka, elle est née avec un don d'intrusion mentale. En définition, cela signifiait qu'elle pouvait s'introduire dans la tête de n'importe qui, y trouver le moindre secret, le moindre souvenir, la moindre pensée.Elle pourra probablement les modifier, et aller même jusqu'à les effacer. C'était un don pratique, extrêmement puissant, mais incontrôlable. Même à mon âge, elle n'aura probablement toujours pas appris à maîtriser son pouvoir. Si elle arrive à le contrôler un jour, elle pourra se considérer surdouée.
–Calme toi, qu'as- tu vus dans la tête de Pascale pour te mettre dans un tel état?
–Pascale… dans l'une de ses visions,... a vu Judith… mourir,... dans la nuit 31 Août… 1622… Sanglota l'enfant.
–C'est-à -dire,...
–Dans 53 jours…
A mes mots, elle éclata de nouveau en larmes. Xavier qui était derrière moi s'approcha de la petite avant de la prendre dans ses bras. Même avec ses 182 cm et sa capacité de voyager où se cacher dans les ombres, mon ami avait une facilité déconcertante à calmer les enfants. Sauf avec Maïka…
–Tout va bien aller, Maïka, on va pas laisser Judith mourir, tu vas voir…
–Même si c'est Yoann qui l'achève? L CHE MOI JE VEUX JACO! Hurla l'enfant.
Pris de court tout comme moi, je pris Maïka dans mes bras en regardant mon ami. Cette fois-ci, les rôles seront inversés. Alors que je m'occuperai des enfants, il préviendrait les aînés. Une réunion s'imposait.
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Tout pour la sauver
ParanormalUn orphelinat caché, une bande de sorciers peu âgés, une mère qui est en train de succomber... Les enfants de l'orphelinat vivaient paisiblement, dissimulés de ceux qui souhaitaient les brûler. Vivant dans les années 1622, il n'est guère facile pour...