Chapitre 13

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Il faisait froid ce matin là. C'était peut-être à cause du vent, qui faisait danser les vagues plus sauvagement que d'habitude. Les embruns s'échappaient de l'écume qui s'écrasait contre le rivage et s'envolaient dans l'air comme des fines gouttes de pluie.

Hermione les sentait s'échouer contre son visage. C'était surement de là que venait le goût de sel qui recouvrait ses lèvres, ou bien était-ce ses larmes ? Elle avait arrêté d'essayer de les essuyer, ou même de les retenir. Elle ne sentait pas non plus les bras de Ron qui l'entouraient, simplement la chaleur qui irradiait de son corps, dans son dos. Il faisait si froid ce matin. Hermione n'entendait pas non plus le son des vagues, pourtant si proches. Tout ce qu'elle entendait, c'était le bruit sourd de la pelle qui creusait le sable, inlassablement. Chaque coup était plus fort que le précédent et résonnait dans sa tête, les échos s'emmêlant à l'infini, vibrant jusque dans son cœur qui avait accordé ses battements à la macabre mélodie.
Ses yeux, eux, étaient vides et fixes. Quelque chose se trouvait à terre, plus bas sur le sable, mais elle refusait de le regarder. Elle avait l'impression que, si elle le faisait, son souffle se couperait pour ne plus jamais revenir. A la place, elle fixait la nuque de Harry, qui était recouverte de petite gouttes de sueurs. Il creusait depuis si longtemps. Presque une heure peut-être. Le sable qu'il soulevait se mêlait aux embruns virevoltants et disparaissait dans la périphérie de la vision de la jeune Gryffondor. Elle l'entendait pleurer, aussi. Au début si fort qu'on pouvait entendre son coeur se déchirer. Au bout d'un moment, des râles implorants. Maintenant, des simples reniflements qui entrecoupaient sa respiration saccadée.

- Tiens bon. Tiens bon, hein ? Tiens bon. D'accord ? On va arranger ça. Hermione. Tu n'as pas ... Dans ton sac. Hermione, vite ! Aide moi !
- C'est un endroit ... magnifique... pour être avec des amis. Dobby est heureux... d'être avec son ami.... Harry Potter

Ron la serra plus fort contre lui, alors Harry planta la pelle dans la dune avant de s'immobiliser plusieurs secondes au milieu du trou. Il releva le regard vers ses amis. Quelques mèches de ses cheveux noirs collaient son front, ses mâchoires étaient contractées en un rictus douloureux alors qu'il reprenait son souffle, des larmes s'échappant silencieusement de ses grands yeux verts. Il observa Hermione, mais elle fût bien incapable de bouger le moindre cil, ou même de lui accorder le moindre sourire réconfortant. Elle était paralysée, et le vacarme des coups de pelle résonnait encore dans son esprit. Son visage était pâle, s'accordant à la couleur grise du ciel matinal sans nuage dans lequel le soleil brillait déjà au dessus de l'horizon, sans émettre la moindre chaleur.
Harry releva les yeux vers Ron, dont la tête était appuyée contre celle d'Hermione. Ce dernier opina du chef. Le brun s'extirpa alors du trou qu'il venait de creuser et la jeune femme sentit de nouveau le froid humide du vent dans son dos. Ron se tenait à côté d'elle maintenant, et elle se blottit contre lui alors qu'il enveloppait ses épaules d'un bras protecteur. Hermione savait ce qui allait se produire, mais ses yeux ne pouvaient se concentrer sur ce qui se déroulait devant eux. Les dunes étaient une vue beaucoup plus douce.

- On devrait lui fermer les yeux, tu ne crois pas ? Voilà, maintenant c'est comme s'il dormait.

Harry passa devant elle et s'accroupit aux côtés de la forme qui reposait au sol. Après quelques secondes, il se releva, et Hermione sentit son cœur défaillir lorsqu'il repassa devant eux. Son corps semblait si petit dans les bras de son ami. Il était enveloppé d'un linge blanc. Dans le champ de vision de la jeune femme, ce n'était qu'une tâche immaculée et inerte, pourtant, elle ne discernait que cela. Lorsque Harry descendit au creux de la dune, elle ferma les yeux.
Si elle fermait les yeux, peut être les rouvrira t'elle ailleurs. Peut-être que la journée serait déjà terminée. Il fallait juste attendre. Attendre et supporter le bruit sourd et inlassable de la pelle.
Supporter et chasser la nausée qui lui tordait l'estomac. Chasser son instinct qui lui ordonnait de partir en courant sans se retourner. Pourtant, lorsqu'elle rouvrit les yeux, elle se trouvait toujours sur la dune. Et Dobby n'était plus là. Seulement sa tombe.

PARA DOXA | DramioneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant