IX

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Sirius est une poule mouillée.

James et Peter aiment le lui répéter depuis près d'une semaine. Il trouve ça un peu exagéré. Bon, certes, il refuse catégoriquement d'inviter Remus à sortir malgré ses allusions plus que flagrantes, mais alors ? Il prend son temps, voilà tout.

— Tu n'as rien tenté du tout, lui reproche Peter.
— Et je fais quoi là !? S'énerve Sirius.
— Chut !

Les trois comparses sont entassés sous la cape d'invisibilité de James et se faufilent à travers les couloirs sombres.

— Désolé, mais aller voler des feuilles de mandragore en plein milieu de la nuit, ça m'a l'air d'être une grande preuve d'amour, continue Sirius.
— C'est pas la même chose, rétorque James. C'est une preuve d'amitié. Tu n'as rien tenté romantiquement parlant.

Il pousse la porte qui mène aux serres et fait signe à ses amis d'entrer à sa suite. Le clair de lune illumine la pièce, ils n'ont donc pas besoin de leurs baguettes.

— Là !

James sort de la cape et trottine jusqu'aux mandragores. Il coupe minutieusement trois feuilles avant de les tendre à ses amis.

— Dans la bouche jusqu'à la prochaine pleine lune, indique-t-il.

Sirius et Peter hochent la tête à l'unisson et récupèrent leur propre feuille.

— C'est désagréable, fait remarquer Peter.
— On fait ça pour Remus, dit résolument Sirius.

Le château est encore silencieux et le soleil se lève à peine lorsque Sirius se faufile hors de la tour Gryffondor. James et Peter dorment toujours, il est le le seul réveillé. Il aime être le premier à voir Remus, les matins de pleine lune.

— Moony, chuchote-t-il.

Remus est allongée dans un lit étroit de l'infirmerie, ses plaies fraîchement bandées. Madame Pomfresh est visiblement retournée dans son bureau.

— Moony ! Répète-t-il un peu plus fort.

Remus ouvre les yeux et un sourire qui fait fondre Sirius creuse ses joues.

— Salut, murmure-t-il.
— Salut.

Sirius s'assoit sur le bord du lit. Il tressaille lorsque Remus fait courir ses doigts jusqu'aux siens.

— Comment ça s'est passé ?
— Pas trop mal. J'ai connu pire.
— Cool.
— Cool.

Sirius est un peu déconcentré par leurs mains liées. Il regarde les cicatrices blanchâtres qui s'entortillent et disparaissent sous la manche de son pyjama.

— On trouvera une solution, Moony. Promis.
— Il n'y a pas de solution, Sirius, tu le sais très bien.
— Au moins un moyen de rendre tes pleines lunes plus supportables.

Remus secoue la tête avec un petit rire.

— Si tu le dis.
— Je le dis.

Ils se regardent en silence, un peu perdu dans le regard de l'autre. Remus finit par refermer les yeux.

— Je suis épuisé. J'aimerais dormir un peu avant les cours, murmure-t-il. Mais tu peux rester près de moi, s'il te plaît ?
— Oh oui. Oui, bien sûr, murmure Sirius à son tour.

Remus froisse un énième parchemin avec lassitude. Ses notes n'ont aucun sens. Les étapes sur la métamorphose d'un hibou en jumelles de théâtre sont trop souvent entrecoupées par le mot Sirius. C'est purement accidentel, et ça l'agace beaucoup.

— Tout va bien, Remus ? Chuchote Dorcas lorsque le professeur Mcgonagall a le dos tourné.
— Bof.
— Qu'est-ce ce qui se passe ?

Remus fait la moue et trempe sa plume dans l'encrier.

— Sirius est un imbécile.

Dorcas a un rire attendri et couvre sa bouche avec sa main pour être discrète.

— Qu'a t-il fait encore ?
— Il ne m'invite pas à sortir même avec mes signaux évidents. Peut-être que je me suis trompé et qu'il ne m'aime pas.
— J'ai connu ça.

Remus cesse d'écrire et se tourne vers Dorcas.

— Avec Marlène ?
— Avec Marlène. Tout était si clair et pourtant rien ne se serait passé entre nous si je n'avais pas fait le premier pas.
— Je n'aurais jamais pensé qu'elle était si..
— Trouillarde ? Oh, ne m'en parle pas. Heureusement que je suis là.
— Ouais. Avec des trucs comme le coup des elfes en..
— En tragédie grecque ? Oui, c'était du génie. Bref, ce que je voulais dire c'est que ce n'est pas parce qu'il ne bouge pas qu'il ne t'aime pas. C'est juste une grosse poule mouillée.
— T'es sûre ?
— Fais moi confiance.

Remus est décidé à faire le premier pas. Sirius n'en est pas capable ? Très bien, il le fera par lui même, en tragédie grecque si c'est nécessaire.
Il monte quatre à quatre les escaliers du dortoir. Sirius y est probablement – seul, qui plus est.

— Oh, Moony.

Sirius est debout devant le miroir, visiblement en train de se recoiffer.

— Il faut que je te parle, commence Remus.
— Oui, moi aussi.
— Très bien. Commence.
— Non, toi.
— Non, vraiment j'insiste, commence.

Le cœur de Sirius est décidé à jouer des cymbales, son courage quant à lui, est parti se cacher quelque part au fond de son estomac. Il danse d'un pied sur l'autre, gêné

— Heu, Moony.. Tu veux sortir avec moi ?
— Bien sûr. Pour aller où ?

Remus a fait exprès de ne pas comprendre. Ce n'est pas très gentil, il l'avoue, mais voir la mine déconfite de Sirius est beaucoup trop tordant pour passer à côté.

— Heu.. Je ne sais pas. Pré-au-lard peut-être ? Propose Sirius, qui ne se démonte pas.
— Ok. Samedi, quatorze heures. C'est un rendez-vous, j'espère.

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