Chapitre 1 - Le pensionnat

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Ce n'est qu'après avoir mené une longue guerre contre de féroces créatures que les sorciers de l'ancienne époque purent enfin annoncer à Tarvaris – l'unique continent de ce monde – que la menace était pour de bon éliminée. Cependant, au travers toutes ces années d'acharnement, de nombreux guerriers aux pouvoirs surnaturels s'effondrèrent sous les assauts ennemis, ne laissant aux prochaines générations que bien peu de leurs descendants.

Deux seuls siècles parvinrent presque à rayer la sorcellerie de la carte. On ne retrouvait ses traces que dans les récits historiques devenus, avec le temps, des contes et légendes à l'avis mitigée que l'on n'osait plus raconter. Seuls quelques chanceux pouvaient s'estimer heureux d'en être les dignes héritiers.

Voyant leur art s'éteindre peu à peu, les plus grandes familles de sorciers se mirent à ouvrir leurs portes aux enfants qui possédaient l'aura – une enveloppe invisible qui recouvrait les êtres surnaturels. Elle n'apparaissaît que qu'aux yeux des plus sages de ce monde. Ceux s'étant élevés à une conscience spirituelle incomprise.

Ainsi, partout sur Tarvaris, des maisons se dressèrent et enseignèrent à la relève l'art d'utiliser leurs dons. Les gouverneurs de chaque pays s'entendirent pour financer le sérieux  projet à titre d'essai, mais l'un d'entre eux hésita longuement à donner son accord.

  La sorcellerie, bénéficiant ceux qui l'emploient, ne devait pas semer la crainte au cœur des peuples. Ils leur promirent donc de surveiller de près le progrès de leurs écoles respectives, se réservant tous droits les concernant. Personne ne souhaitait revivre un ère où des renégats servaient leurs propres intérêts sans ne connaître de réels obstacles.

Le dirigeant d'Osvalt, Lincoln Duford, fut le dernier à autoriser son pays à pratiquer de telles activités. C'est ce qui donna naissance à la première institut de sorcellerie du territoire, le plus original de toutes nations confondues. Il s'agissait d'un pensionnat régi par un certain Daniel, le tuteur et professeur des huit enfants qui y résidaient depuis maintenant six années.

Sorcier de renommée, Daniel prit bien soin de choisir ses disciples un par un. Entres autres capable de ressentir l'aura d'autrui, la recherche des synergies lui fut simple. Il n'accepta, par contre, uniquement des élèves en bas âge qui ne seraient pas arrachés à leurs parents ─ pour leur paix d'esprit, formant ainsi les Orphelins de Waverlock, que la région connaissait plutôt bien.

C'était un petit village situé au creux d'une vallée où l'entourait de larges montagnes enneigées aux demeures se voisinant de plusieurs lieues. À ce temps-ci de l'année, le vent d'automne soufflait doucement sur la rougeoyante forêt de ce coin reculé, ne devançant que de quelques semaines la venue des premiers flocons.

Le pensionnat s'assoyait aux rebords d'une falaise, sur une plaine rocheuse à l'orée de la forêt d'arbres géants et dos à la mer. Chaque matin, les élèves avaient la chance de se réveiller sous les rayons d'un soleil reflété par l'océan à perte de vue, attendant bien au chaud ce que chaque nouvelle journée avait à leur apporter.

Elles étaient souvent très chargées, puisque chacun d'entre eux devait donner son maximum – et quiconque avait un pouvoir savait qu'il devait suer pour le maîtriser. Même s'ils cohabitaient sous le même toit, ils n'étaient pas amenés à se voir ensemble régulièrement. Quelques équipes récurrentes s'étaient donc créées pendant ces six années. Adam, le plus jeune des garçons, âgé de seulement neuf ans, était mystérieusement capable de connecter son esprit avec celui de ses frères et sœurs, sans toutefois que Daniel ne comprenne comment. Ses courts cheveux blonds retombaient délicatement sur le côté, rendant son visage plus innocent encore qu'il ne l'était déjà. Même s'il fut le dernier à être accueilli ici, il se vit offrir l'amitié sincère d'Horace, un grand maigrichon maladroit qui portait une crinière hérissée vers l'arrière. Âgé de quinze ans, il était le plus vieux des disciples et avait la capacité de manipuler les flammes. Les deux seules filles, elles, avaient tous les deux quatorze ans et portaient une élégante chevelure attachée au bas du dos. Les cheveux rougeâtres de Jade harmonisaient parfaitement son air de gentille-fille, ce qui l'aidait particulièrement puisque étant la diplomate du groupe, elle avait souvent à prendre les devants. N'ayant jamais pu développer quelconque pouvoir pour le moment, elle apprit à utiliser les langues pour se débrouiller à tout moment. Emma avait les cheveux noirs et était la plus robuste des deux. Ses bras maniaient un sabre comme un homme et lui permettait de rivaliser contre Evan avec plus de facilité que celui-ci voulait l'admettre. Inconsciemment, il cachait sa honte derrière ses longs cheveux foncés. Il n'était pas bien agile contrairement à Emma, qui pourtant partageait le même âge, mais il s'entraînait avec acharnement pour y remédier. Il passait le plus clair de son temps avec Wilton, un étrange personnage qui recevait des pensées de gens qui n'étaient pourtant pas présents près de lui. Il était le seul à se raser chaque semaine pour conserver un crâne lisse. Il y portait fièrement ses tatouages tribaux depuis treize ans, sans encore réellement savoir ce qu'ils signifiaient, ni même d'où ils venaient. Le dernier de cette bande de trois se nommait Walter et avait le même âge que les filles. Ses cheveux châtain pâle qu'il remontait et faisait tenir sur ses oreilles lui donnait un petit air bohème qui lui allait bien. Il ne faisait que très rarement partie du trio puisqu'il s'absentait souvent. Daniel lui permettait d'aller rejoindre les meutes de loups lorsqu'elles passaient, puisqu'il en était lui-même un. Le dernier orphelin n'était pas très bavard. Du haut de ses quatorze ans, il était quelque peu arrogant et demandait beaucoup de temps en privé avec le professeur pour parfaire la maîtrise de son pouvoir. Il remontait ses courts cheveux noirs vers l'arrière et le groupe ne savait pas grand-chose à propos de lui. Ils s'étaient évidemment croisés à de nombreuses reprises au pensionnat, mais personne ne connaissait l'étendue des pouvoirs de Jacob. Daniel lui avait fait promettre de ne s'en servir qu'en dernier recours.

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