CHAPITRE I

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𝐊𝐄𝐍𝐍𝐄𝐓𝐇


Allongé sur une paillasse sale posée à même le sol, les poignets entravés par des chaînes en acier, il lui semblait entendre des éclats de voix au loin. Il n'en était pas sûr, ça pouvait tout aussi bien être le bruit du vent.

Les yeux grands ouverts, il fixait le plafond sans le voir. Il faisait noir dans sa cellule, il y faisait toujours noir. Il avait froid, mais il ne bougea pas. Il n'essaya pas de se réchauffer en rapprochant ses genoux contre lui ou en frictionnant ses côtes avec ses bras. Kenneth avait mal partout, même respirer lui faisait mal et chaque souffle ravivait un peu plus la douleur de ses blessures. Il en avait reçu des nouvelles, aux jambes. Ses geôliers avaient trouvés amusants de lui retirer des lambeaux entiers de chair, et même s'il avait fini par crier tant la douleur était insupportable, il n'avait pas pleuré. Il ne leur avait pas fait ce plaisir et ne les avaient pas non plus suppliés d'arrêter, ça ne servait à rien de toute façon, ils ne le faisaient jamais. Il avait fini par perdre connaissance et à son réveil, il était de retour dans sa cellule. Kenneth entendit soudain le cliquetis des clefs dans la serrure, puis la porte s'ouvrir dans un grincement sinistre. Il se raidit, redoutant le pire. Ils avaient pour habitude de lui laisser plusieurs jours de répit avant de recommencer, s'ils revenaient maintenant, ce n'était pas bon signe pour lui.

« Kenneth ? Kenneth, tu m'entends ? »

Il ferma brusquement les paupières. Il ne savait pas comment ils avaient fait, mais cette fois-ci, ses gardiens venaient le torturer avec la douce voix de sa sœur. Mais ça ne pouvait pas être elle, ce n'était qu'une illusion, parce qu'elle n'était pas là. Feyra n'était pas là. Elle était partie. Ils l'avaient emmené plusieurs semaines auparavant et depuis, il n'avait plus eu aucune nouvelle. Il avait attendu son retour pendant des jours. Elle lui avait promis de revenir, mais plus le temps passé et moins il y croyait. Elle était peut-être morte et c'était sûrement le sort qui l'attendait lui aussi.

« Kenneth ? Kenneth c'est moi. C'est Feyra. »

Il perçut des bruits de pas tout près de lui et, l'instant d'après, il discerna la faible lueur d'une flamme au travers de ses yeux clos. Quelqu'un avait allumé une torche. Un sanglot étranglé résonna alors contre les murs de sa cellule et il sentit une présence se pencher au-dessus de lui.

« Mon dieu Kenneth ... Qu'est-ce qu'ils t'ont fait ? Réponds-moi, dit quelque chose ... »

Il serra des dents, c'était un véritable supplice de ne pas lui répondre tant il percevait l'effroi et l'inquiétude dans ses mots. Sa voix vibrait d'une émotion non-dissimulée. Il ne résista pas plus longtemps à la tentation. Il voulait la voir, il voulait voir le visage délicat de Feyra, elle qui ressemblait tant à leur mère, ou du moins, au souvenir qu'il en avait.

Il ouvrit les yeux et battit plusieurs fois des cils pour s'habituer à la lumière, puis il tourna lentement la tête vers la droite. Elle était là, à genoux près de lui, les joues baignées de larmes. Feyra était là, et pendant un moment, il se dit que ce n'était pas possible, que sa sœur ne pouvait pas être ici, dans cette caverne lugubre avec lui. Je dois être mort ou en train de délirer à la cause de la fièvre, ça doit être ça, pensa-t-il platement. Feyra posa une main rassurante sur sa joue puis sur son front, balayant ses boucles emmêlées. Il se détendit imperceptiblement à son contact. Elle essaya de lui sourire, mais son expression ressemblait plus à une grimace qu'autre chose. Elle laissa échapper un sanglot.

« Je suis désolée Kenneth. Je suis tellement désolée ... C'est de ma faute, tout est de ma faute. »

Elle pleura de plus belle et Kenneth fit un effort surhumain pour bouger son bras, réprimant difficilement un sifflement douloureux. Il posa sa main sur la sienne dans un tintillement métallique à cause ses chaînes, et ses pleurs cessèrent aussitôt.

𝐒𝐎𝐑𝐂𝐈𝐄𝐑𝐄  ⬪  [Lance x OC]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant