Conversation animée

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Au même instant, non loin de là, se tenait, dans le salon d'une demeure cossue, une conversation animée :

— Mon cher ami, vous ne pouvez continuer de la sorte ! s'exclama la propriétaire de la maison.

— Je n'ai pas le choix. Cela fait partie de notre plan, rappelez-vous ! rétorqua un homme, visiblement agacé.

— C'était avant de connaître certains détails que vous m'avez délibérément dissimulé. Il est évident que jamais je ne vous aurai permis une telle folie. C'est pourquoi nous allons revoir notre stratégie.

— Non, je refuse.

— Vous n'allez pas bien ! Pourquoi nier l'évidence ? Vous souffrez, mon ami. Vous souffrez et cela me fend le cœur.

— J'avais conscience des risques lorsque j'ai débuté ma mission. Et je la terminerai, comme prévu. Je vous suis reconnaissant de m'aider. Sans vous...

— Je suis heureuse de pouvoir encore me rendre utile. Naturellement feu mon époux désapprouverait. Mais, dieu merci, je n'ai point été sotte et ne lui ai jamais dévoilé mes activités délictueuses. Même si, de mon point de vue, elles sont d'une grande utilité.

— Je dois reconnaître que j'ai eu beaucoup de chance de vous rencontrer il y a quelques années.

— En effet. Sans moi, vous auriez connu la prison. Ou pire. Si vous avez un peu gagné en sagesse, je vous trouve malheureusement toujours aussi arrogant. Et fougueux.

— Je vous assure que je reste prudent. Je connais les enjeux. Nos intérêts communs sont plus importants que mes problèmes personnels.

— Mais parviendrez-vous toujours à les dissocier ? Dois-je vous rappeler dans quel état vous ai-je retrouvé il y a un mois ? N'avez-vous pas eu assez de temps pour réfléchir depuis lors ? Ce soir, il y a de grandes chances pour que vous assistiez une nouvelle fois à une scène qui vous accablera un peu plus. Un jour, vous commettrez une erreur. Vous le savez autant que moi.

L'homme détourna le regard. Il détestait se sentir vulnérable. Son interlocutrice avait le pouvoir de deviner tout ce qu'il ne lui confiait pas. Changer de plan maintenant reviendrait à reconnaître son erreur. Ce qu'il était incapable de faire. Son orgueil et son estime de soi avaient été durement touchés mais il resterait debout, coûte que coûte. Il y avait plus important que son bien-être personnel. Il ne se comporterait pas comme un égoïste. Jamais. S'il parvenait à ses fins, des dizaines de personnes, si pas plus, retrouveraient une certaine dignité. Et des criminels seraient condamnés pour leurs actes détestables. Oui, souffrir en valait la peine.

Pour se donner une contenance, l'homme saisit sa tasse de thé et avala une longue gorgée du breuvage amer. Son hôtesse l'observa sans aucune discrétion. Puis elle désigna un carton posé sur la petite table du salon :

— Vous n'ignorez rien de l'évènement qui doit avoir lieu dans quelques jours. Néanmoins, nous devons envisager que cela ne se déroule pas comme prévu.

— Que voulez-vous dire ?

— Le début de soirée se passera exactement comme n'importe quelle réception. Je saluerai les invités et accepteraient, à nouveau, leurs condoléances hypocrites. Vous, vous danserez avec quelques délicieuses jeunes filles.

— Est-ce vraiment nécessaire ? grimaça l'homme.

— Mon cher, vous devez tenir votre rang. Si vous commencez à fouiner et à poser des questions, nous échouerons. Une fois les formules de politesse expédiées, plus personne ne s'intéressera à moi.

— Pardonnez-moi mais je crains que vous vous trompiez. Bien au contraire, tous les regards seront braqués sur vous. Vous êtes parmi les sujets de conversation les plus fréquents. La saison vient à peine de débuter.

Symphonie irlandaise {M/M}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant