Veillée pour un Enfant de Salaud

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Il fait déjà nuit noire quand j'arrive en face de la petite maison de Steve Aaron, l'éternel bras droit de Darick avant que je ne bute ce dernier. Ils ne m'ont pas encore inculpé du meurtre, c'est pourquoi je me permets de me pointer ici. Maison américaine, c'est les mots pour décrire la baraque de Aaron. C'est simple, vous prenez la maison des Simpson, vous la vieillissez un peu et c'est bon. Elle est clôturée par des planches de pin tout autour, un petit jardin à l'avant et un grand à l'arrière, avec quelques jouets d'enfants tels qu'un tracteur à pédales, deux ballons , ce genre de conneries. Il y a quelques lampadaires dans la petite rue résidentielle qui font des tâches jaune orangé dans l'obscurité. Je vois des gens qui avancent vers la porte d'entrée, je me décide à les rejoindre sans vraiment savoir ce que je fais. De toute façon même si j'avais le malheur de poser les questions qui fâchent, ils oseraient pas descendre un pauvre type devant tant de monde... si ? J'aurais dit que si je mourrais j'aurais quand même aimé que la police punisse mes agresseurs, avant de me raviser en pensant que c'est grâce à leur incapacité que j'ai pu tuer autant de personnes sans me retrouver sous les barreaux. C'était plus une réunion familiale qu'une commémoration, les liens entre Aaron et McCorben s'étaient détériorés avec le temps, et visiblement assez pour que ce dernier ne soit pas au courant des agissements de son propre gang. Enfin bref, je me dirige vers ce qui semble être la cuisine, avant de demander où se trouve Aaron à la personne qui m'apparait comme la plus sociable et la moins menaçante possible, en l'occurrence une femme d'environs trente-cinq ans, blanche avec des cheveux châtain. Elle appelle son mari, un gros bras bien évidemment -je pouvais pas les éviter de toute façon...- qui m'indique qu'il se trouve dans le salon. Les gens discutent, boivent, et il s'entend même un petit air de musique -Creedence Clearwater Revival si je ne m'abuse, bien leur genre, enfin bref- l'ambiance me surprend malgré les visages assez graves pour certains, car cet état de deuil ne semble pas avoir touché tous les membres du club. Quand j'arrive enfin devant Aaron, je suis surpris d'approcher enfin cet homme que j'ai vu en de nombreuses occasions sans jamais pouvoir étudier sa physionomie de près. C'est un homme chauve, d'une quarantaine d'années, avec une bonne grosse barbe, et bien baraqué évidemment. En fait, sa ressemblance avec l'écrivain du Word, Warren Ellis, me laisse sans voix. Quoi, me dites pas que vous ne connaissez pas Ellis ! Bande d'immondices incultes, vous osez lire ce genre de bouquins sans intérêts et vous n'avez jamais rien lu de Warren Ellis ? Bons dieux... Enfin bref, Aaron était avachi sur son canapé, la tête baissé, visiblement un peu saoul et fatigué. Trop secoué pour réfléchir, je ne prends pas le temps d'être terrifié à l'idée d'aborder un sous-chef qui avait visiblement plus d'influence que le caïd pour lequel il travaillait. Il lève ses yeux vers moi, assez indifféremment, il semble perdu dans ses pensées.

"-Bonjour Monsieur Aaron, je suis Ron Custer, toutes mes condoléances pour... voilà. Je sais que vous étiez très proches à une époque.

-Merci, je regrette qu'on soit restés fâchés depuis un certain temps mais... Ce gars me manque pas tant que ça à vrai dire. Il a vraiment cherché la merde parfois.

-Je vois...

-Sans vouloir vous brusquer, qu'est-ce que vous faites ici ? Vous êtes un flic, un journaliste ?

-Non, juste un... citoyen honnête qui aurait aimer comprendre ce qui se passe chez lui.

-C'est tout à votre honneur.

-Merci.

-Qu'est-ce que vous auriez aimer savoir ?

-Hier, avant le... meurtre de votre boss, Jimmy Cromwell et ses amis se sont fait descendre par des membres des Iron Angels, et quand la police est arrivée...

-Attendez attendez quoi ? J'ai jamais demandé à mes gars de buter Jimmy !

-Ah...

-Oh, qu'est-ce qu'il a encore fait ce vilain garnement ?"

Je mets un peu de temps à tilter. Je me retourne et je vois la femme de Steve Aaron, Amanda, une ravissante jeune afro-américaine, les cheveux attachés en queue de cheval, portant dans ses bras tant bien que mal un petit gars d'une dizaine d'années, même pas, portant un pull noir visiblement trop grand pour lui. Tout le monde était habillé en noir ici. Sauf moi. Elle lui répond en souriant.

"-Il te réclamait, il était vraiment impatient de te voir.

-Hahaha c'est vrai Eddie ?"

Le petit bout d'homme reste muet en me dévisageant avec de grands yeux, une main dans la bouche et l'autre derrière la tête. C'est vrai que ça doit pas être facile de vivre avec un père biker.

"-Mais ça n'aurait pas pu être, genre... deux-trois membres dissidents qui auraient voulu s'en débarrasser ?

-On est pas un club si grand que ça vous savez, comment vous saviez que c'était des membres de chez nous ?

-Ils portaient vos blousons, sur vos Harley ou tout comme donc...

-Et comment ça se fait qu'on en ai pas entendu parler jusque là de la mort de ces trois types ?

-Et bien la police a..."

Bordel de merde. Je viens de comprendre.

Je regarde Steve Aaron entrain de jouer avec le petit Edward. Ils ont l'air autant insouciants l'un que l'autre. Puis je vois Amanda Aaron qui me regarde avec un petit air d'étonnement qui semble me demander si je vais bien. Je suis bouche bée, au ralentit.

Il faut que je sorte d'ici.

Iron Cold Dark CountryOù les histoires vivent. Découvrez maintenant