Chapitre 8 - Kurt

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- La déco' te plaît ? Lui demandé-je.

Si ma présence l'a surprise, elle n'en montre rien. Son corps reste parfaitement immobile, seule sa main qui s'apprêtait à saisir un des nombreux livres ennuyants de cette bibliothèque est retombée lentement le long de son corps. Un corps si parfait que je le pilonnerais bien si elle n'était pas... elle. Lorsqu'elle se retourne et que ses yeux, tellement similaires au sien, me percutent, je serre les points. Les yeux sont le miroir de l'âme semble-t-il, la sienne est salie par les mains de son père. J'exècre cette arrogance dans son regard qui me donne envie de l'étrangler à chaque instant. Pour autant, je ne dois rien montrer, autrement l'intégralité de mon plan tomberait à l'eau et ces années de patience n'aurait servi à rien.

Je me languis déjà de la réponse qu'elle s'apprête à me donner. Chacun de ses manques de respect à mon égard est mémorisé et comptabilisé. Et, plus il y en aura, plus je pourrais légitimement me montrer violent.

-  Je mentirais si je répondais pas l'affirmative, c'est... fade.

Son arrogance m'amuse autant qu'elle me gonfle. Pour toute réponse, je hausse un sourcil et me dirige vers le bar sur lequel je saisis deux bières que je décapsule à l'aide de ma chevalière. Alors que je lui en tends une, elle hausse à son tour un sourcil. Perchée sur ses talons vertigineux, elle me passe devant et se saisit d'une nouvelle bière qu'elle décapsule elle-même avant de la porter à ses lèvres, m'adressant au passage un clin d'œil se voulant provocateur. Maligne.

- Ma douce, la drogue, je la fais payé. Je n'en fais que très rarement cadeau. Tu joues ? Lâché-je en me dirigeant nonchalamment vers le billard.

Beck

J'essaie tant bien que mal de ne rien laisser transparaître. La pièce qui me paraissait oppressante semble maintenant se refermer sur nous et me prendre au piège. Lorsque je le regarde, tous les pores de ma peau suintent de rage. Il me renvoie sans même le savoir à des années de ma vie que je préférerais oublier. Cette confiance en lui, ce magnétisme, cette aura malsaine me rappellent des hommes que je voudrais ne jamais avoir connu. Ils sont tous si semblables.

Alors qu'il se dirige vers le billard, je me surprend à le suivre. Je peux faire tourner cette soirée à mon avantage si je me montre assez maligne. Lui faire baisser sa garde ne devrait pas être une chose aisée. Néanmoins, mon instinct me souffle que cet homme est joueur.

- Très bien, mais laisse moi modifier quelques règles, répondé-je en me saisissant de l'une des queues restantes accrochées au mur.

D'un simple levé de menton, il me pousse à m'exprimer.

- À chaque bille rentrée, le joueur a l'obligation de répondre à une question posée par l'autre, idem pour chaque bille manquée.
- Connais-tu seulement les véritables règles de ce jeu, ma douce ? Me demande-t-il en me transperçant de son regard.

Sa question est à double sens, c'est évident. Il parle tant des règles du billard que des miennes. Obtenir des réponses à mes questions à un prix. Suis-je vraiment prête à le payer ?

- À toi l'honneur, répondé-je simplement.

Cet homme n'est pas du genre à se faire prier. Posant au préalable sa bière non loin de lui, il se saisit de sa queue, de billard, ainsi que d'une craie posée juste à côté. Alors qu'il frotte minutieusement son bleu sur l'extrémité de celle-ci, son regard se lève en direction du mien. De longues secondes s'écoulent avant qu'il ne se décide à ouvrir la bouche.

- Sais-tu à quoi ça sert ?
- Serais-tu entrain de me sous-estimer ?
- Loin de moi l'idée de dévaloriser une femme, simplement je m'assure que nous sommes tout deux sur un pied d'égalité.
- Cela permet d'éviter les fausses queue. La queue ne glissera pas de façon incontrôlée et les coups seront maîtrisés. Mais si tu veux mon avis, tu frottes bien trop fort. Il faut plutôt en caresser le bout, terminé-je vicieusement.

Je ne sais pas vraiment à quoi je suis entrain de jouer, mais le provoquer de la sorte me plait un peu trop. Loin d'être impressionnée, mon discours semble l'avoir amusé. Son visage reste néanmoins impassible.

Sans un mot de plus, il repose sa craie où il l'a trouvé, et se saisit d'une boîte carrée posée sur une étagère en bois sombre. Intriguée, mon attention se porte sur ladite boîte en cuir noir. Lorsqu'il l'ouvre, des frissons parcours l'intégralité de mon corps, sans que j'en comprenne les raisons. Ce n'est autre que la bille qui permettra de débuter le jeu. Celle-ci, en temps normal blanche, est grise, il y est gravée une étoile, en dessous de laquelle est inscrit "les étoiles filent".

Il dépose la bille sur le tapis noir du billard, recule de quelques pas et pose cette fois-ci sa main, écartant légèrement ses doigts, relevant son pouce. Lorsque le premier coup part, sans aucune hésitation, le son résonne dans la pièce, semblable à une détonation. Je retiens de justesse un sursaut, me contentant d'observer une des billes transparentes rentrée avec facilité. Les transparentes sont donc les siennes.

- Quel est ton nom ? demande-t-il sans préambule.
- Beck, me contenté-je de répondre.
- Ton nom complet ?
- Une question à la fois, ne soit pas pressé.
- Très bien, rétorque-t-il en rejouant et faisant entrer une autre de ses billes, percutant par la même occasion une des miennes, dès lors en position parfaite.
- Becky Jones.

Menteuse.

Visiblement satisfait de ma réponse, il rejoue, percutant cette fois-ci seulement une des miennes. A mon tour. En ne le lâchant pas des yeux, je me saisis de la craie et l'utilise. D'un geste net et précis, je percute la boule qui avait été déplacé, et en entre deux d'un coup. Parfait.

- Qui es-tu ?
- Ne me connais-tu donc pas ? Tu serais bien la seule, répond-t-il, un demi-sourire moqueur aux lèvres.
- Contente-toi de suivre les règles, et répond moi.
- Tout le Monde m'appelle Kurt, mais mon prénom est Nolan. 
- Que faisais-tu chez moi, Nolan ? demandé-je ensuite.
- Moi qui pensait que ce serait ta première question. Et bien, disons que je suis... poli et accueillant, répond-il simplement en haussant les épaules. Puis... poursuit-il, mon petit doigt m'a dis que tu avais un penchant pour les petites pilules. 

Mon sang se glace. Je n'en montre rien. Mes chevilles, autour desquelles sont accrochés mes couteaux, camouflés par un pantalon habillé ample, me démangent. Je le lui couperais volontiers, ce petit doigt. Feignant l'étonnement, je détourne mon attention de lui. C'est à nouveau à mon tour de jouer et, cette fois, une seule bille rentre, percutant deux des siennes dans la foulé.

- Pourquoi cet étranger est-il mort ? 
- Il foulait un territoire qui ne lui appartenait pas, souffle-t-il en ne me lâchant pas du regard.
- Ton territoire ? pouffé-je.

Faisant claqué sa langue sur son palet, il m'intime de continuer de jouer. La partie est presque terminée et je n'ai pas appris grand chose de plus. Il n'a pas joué franc jeu, j'en suis persuadée. Selon ses dires, il bosse dans l'import/export au côté de Derek, au sein de la boite familiale. D'origine inconnue, il aurait été adopté par un couple américain vivant au Royaume-Uni pour leur travail. L'appartement est le sien - sans grand étonnement.

Le meurtre de l'Australien ne résulterait que d'un règlement de compte auquel il n'était pas partie. Et, concernant l'ignorance des hommes du Unicorn, je cite, "il s'agirait de prendre du recul sur sa propre personne et d'entendre qu'il n'est pas aisé de plaire à tout le monde".

Il ne reste plus que la bille doré sur le tapis. Alors que c'est à moi de jouer, je contemple ladite bille sur laquelle, comme sur la grise, est inscrit quelque chose. Lorsque je parviens à le lire , je reste perplexe.

"La lune s'incline".

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💬

Hm, le billard...

"Queue" et "boules", sympa le champ lexical de ce jeu...

D'ailleurs, enchantée Nolan ! Ravie d'enfin faire ta connaissance. Je me demande bien à quoi tu ressembles... Des idées ? 

(PS : Tout avis est bon à prendre... Alors, à vos commentaires 📲)

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Prenez soin de vous, et ne prenez surtout pas exemple sur mes personnages 🫶🏻

Détestables (Tome 1) [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant