Prélude

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Un triangle sur mesure

Froufrou! Froufrou! Le bruit du drap que caresse une main tremblotante coupe le souffle de Oumou. Elle reste aux aguets. Elle le sent approcher. Elle l'appréhende, mais l'espère. Elle s'exite puis devient frustrée. Elle s'impatiente et ne peut plus attendre longtemps. Elle veut être touchée, sentir son cœur bruire comme les feuilles au vent par les caresses de cette main peu audacieuse à son goût.

N'est ce pas pour lui, qu'elle a posé la sienne sur le lit comme une astueuse et discrète invite.
"- Merde! Aggripe moi la main et sens comme elle t'es acquise, c'est pas trop compliqué, non!", pense t-elle tous bas.
Et le courant qui peut revenir à tout moment. L'occasion est trop belle pour la manquer. Elle est propice aux retrouvailles et aux effusions intimes.

Oumou avait besoin que Hakim saute sur le moment pour implorer son pardon et qu'il puisse l'aimer à nouveau tendrement et passionnément dans une étreinte animée. Son cœur le réclamait, son corps en avait besoin.

L'esprit de oumou s'agite. Il s'échauffe et agresse ses traits bien trop fins pour autant de pression.
Devrait-elle tendre un peu plus sa main pour encourager Hakim? Non. En plus il ne pourra pas la voir dans l'obscurité ambiante qui baigne toute la pièce. Que peut-elle faire de plus? Lui attraper sauvagement la main comme pour la punir d'avoir trop tardé et ensuite la guider à travers monts et merveilles. Non! C'est à lui de faire le premier pas. C'est à lui de s'excuser même s'il n'a pas tort, même si c'est bien elle Oumou la fautive dans cette énième dispute qu'elle a elle même provoqué. Mais peut-elle simplement agir autrement?

Les hommes sont d'invétérés coureurs de jupon. Ils mangent à tous les râteliers, guidés par le mat perfide pendant scrupuleusement entre leurs cuisses jamais reconnaissantes. On n'en trouve pas un pour rattraper l'autre. Ces propos sont de Naïna, sa confidente et désormais meilleure amie, belle et coquine, terreur de la gente masculine. Elle est une redoutable influenceuse qui tient une page sur les relations conjugales intitulée, l'art de la guerre 2.0. Dire qu'elle ne l'a jamais rencontré en personne.

Malheureusement pour Oumou, à cet instant même, son corps brûlant de désir l'empêche d'articuler ses pensées. Sa poitrine se souléve par à coups et sa bouche est à moitié ouverte.

Pourquoi Hakim ne se dépêche t-il pas de faire le premier pas? Ne l'a t-elle pas trop accablé cette fois-ci en restant froide et distante toute cette semaine. Il semble désarçonné et bien trop hésitant dans ses mouvements.

Pourtant son souffle haletant et sa respiration saccadée s'entendent clairement dans cette pénombre aux relents complices.

Oumou le savait, c'était le signal, le prélude d'une nuit d'ébats et d'étreintes entraînantes. Après tout, c'était cela leur routine depuis le jour premier de leur mariage. Après la pluie, le beau temps. Après les disputes, le lit.

Hakim se confondait en excuses et le corps réceptif et tressaillant de Oumou pardonnait. Hakim rendait hommage aux délicieuses courbes de sa femme blottie sous lui et la pétale secrète de Oumou exultait intérieurement. Son corps en extase submergé par une marée de caresse et de coup salvateur demandait plus et obtenait mieux.

Mais, aujourd'hui,  oui aujourd'hui, son Hakim chéri, l'exutoire de son désir est d'humeur craintive. Fallait-il même que ça tombe aujourd'hui. Elle l'a quand même bien fait mariner. Mais c'était pour mieux attiser sa reconnaissance de pouvoir rendre grâce à une suave nymphe comme elle.

Oui, une femme a le devoir de se faire désirer. Une femme ne doit jamais être prise pour acquise, sinon son homme peut aller câliner ailleurs.

Neanmoins, le doute en habile usurpateur s'insinue en elle. Ces propos sont-ils bien les siens, ou sont-ils ceux de Naïna? Même s'ils ne sont pas d'elle, ils restent quand même vrai, n'est-ce pas, se demande t-elle, comme pour s'en convaincre.  Son esprit est gagné par la confusion. Elle ne peut même pas réfléchir avec les palpitations de sa voie intérieure qui ne demande qu'à être satisfaite.

Normalement, Hakim devait se jeter à ses pieds maintenant. Elle l'a bien travaillé au corps toute la semaine, tout en maintenant cette petite distantnce froide entre eux.

C'était pour lui rappeler que le droit de la posséder doit être un honneur. Sa gratitude ne doit en être que plus expressive. Pourtant, c'est bien  ainsi que se comporte Hakim à son égard. Alors, pourquoi était elle en colère contre lui? Pourquoi même?

"Ah oui! Il ne faut pas aussi que j'oublie que son regard était bien trop insistant sur les courbes de cette catine qu'on a croisé la dernière fois".

En y repensant, elle lui semble quand même que c'est bien cette femme qui essayait de le charmer bien malgré sa présence, alors que lui semblait de marbre. Quel culot? En voilà une qui perdra définitivement l'envie de vouloir chiper la propriété d'autrui. Telle une tigresse, toutes griffes dehors, elle lui a fait fait ravaler sa morve hautaine. N'eut été Hakim elle l'aurait mise en lambeaux.

Eh bien nous y voilà, c'etait pour ça qu'elle en voulait à Hakim. Pourquoi l'avait-il retenue?  C'est ainsi qu'ils se sont disputé sur le chemin du retour ou plutôt qu'elle l'a disputé.

Si ses souvenirs sont bien exacts c'est elle qui criait alors que Hakim calmait le jeu,  comme c'est souvent le cas. Elle doit défendre son territoire. Son homme est à elle et à elle seule. Elle doit tuer dans l'œuf toute velléité de pensée actuelle ou de tentation future de regarder ailleurs.  Sinon c'est lui même qu'elle va tuer.

Triangle sensuelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant