Chapitre 4 : Arrivée à Calais

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Anna avait été perdue dans ses pensées tout au long de la traversée. Qu'allait-elle trouver de l'autre côté de la Manche ? Parviendrait-elle à découvrir qui était son géniteur ? Voudrait-il d'elle après toutes ces années ? Toutes ces questions ne trouveraient de réponse que si elle était décidée à découvrir la vérité. Et elle le savait pertinemment : toute vérité n'est pas toujours bonne à entendre. Elle prenait le risque d'être déçue. Ne valait-il pas mieux rester dans l'ignorance ?

Elle fut tirée de ses pensées lorsque la cloche annonçant l'arrivée au port français retentit. Plus de retour en arrière possible : elle y était et elle devait se lancer dans cette quête pour son bien-être personnel. Elle sentit toutefois son estomac se nouer. Elle était partagée entre son excitation à l'idée de partir sur les traces de ses origines, mais aussi par l'appréhension de se retrouver seule en terre inconnue.

Elle sortit sur le pont pour découvrir les côtes françaises éclairées par le soleil chaud de cette belle journée d'été. Ce spectacle l'apaisa immédiatement. Elle était là où elle devait être : si elle ne trouvait rien, elle rentrerait simplement et sa mère ne le saurait jamais. Voilà son plan.

En attendant, elle suivit l'entrée du paquebot de passagers dans le port et fut admirative de la dextérité avec laquelle le capitaine manœuvrait le mastodonte pour le faire accoster pile au bon endroit. Aussitôt, les autres passagers se précipitèrent vers le pont inférieur pour monter dans leur voiture et sortir à l'air libre.

Elle fut soulagée de ne pas se retrouver dans ces embouteillages du débarquement et se dirigea vers la passerelle destinée aux voyageurs qui, comme elle, n'avait pas emporté leur véhicule. Ayant appris à conduire en Angleterre, elle aurait eu bien trop peur de devoir rouler à droite ! Elle s'arrêta un instant sur le quai industriel, essayant de deviner la ville qui se cachait derrière les grands bâtiments et les immenses parkings, mais ne put rien en apercevoir. Elle traversa ensuite le terminal des ferries pour déboucher sur un immense parking avant de monter dans la navette qui les attendait, elle et d'autres touristes. Tandis que chacun déposait ses bagages dans la soute, elle s'installa sur un siège le long de la vitre afin de pouvoir apercevoir le paysage. Elle fut étonnée de constater que l'ensemble des quais dont on apercevait les grues de déchargement étaient protégés par de grands grillages surmontés de barbelés. Les français ne badinaient pas avec la sécurité de leurs ports !

Quand le bus fut enfin au complet, le conducteur démarra et les conduisit vers le centre-ville de Calais. Ils laissèrent rapidement derrière eux les grandes entreprises portuaires pour se retrouver dans les faubourgs de la ville. Anna fut surprise par le nombre d'immeubles carrés serrés les uns contre les autres qui lui semblaient si différents de l'Angleterre et en même temps si communs. Ce qui la surprit le plus, c'était le manque flagrant de verdure. Tout semblait être fait pour optimiser l'espace. Cette partie de la ville lui sembla triste jusqu'à ce qu'elle aperçoive le phare. Cette longue flèche blanche semblait vouloir atteindre le ciel et elle se dit qu'ils ne devaient pas être loin du port de plaisance.

Elle se pencha un peu plus pour apercevoir les voiliers. Son cœur se mit à battre plus vite : le « Gasparine » était-il toujours amarré là ? Mais, à son grand regret, le chauffeur se dirigea vers le centre de la ville. Elle dut se dire que ce n'était que partie remise et qu'elle devait avant tout se trouver un hôtel. Elle avait noté l'adresse de quelques-uns d'entre eux qui correspondaient à son budget dans le centre-ville.

Anna posa la tête contre la vitre, pensive. Plus ils avançaient, plus les maisons de rangées aux briques rouges, typiques de la région du Nord, peuplaient les rues. Ils débouchèrent finalement sur une place aérée et agréable au centre de laquelle trônait le bâtiment imposant de la célèbre Notre-Dame de Calais qu'elle se promit d'aller visiter avant son départ.

Le chauffeur les déposa un peu plus loin devant un hôtel de standing qui ne lui correspondait pas du tout, mais dans lequel il devait avoir des actions vu comment il leur vendit les services que l'établissement proposait.

Après avoir récupéré son unique valise, Anna remercia le chauffeur avant de consulter l'application de son téléphone qui la guida vers un tout petit hôtel plus familial dans une ruelle avoisinante.

Elle fut accueillie par une femme d'un certain âge aux traits avenants.

- Bonjour mademoiselle. Que puis-je faire pour vous ?, lui demanda-t-elle avec un bon sourire.

- Je voudrais une chambre.

- Pour combien de temps ?

- Je ne sais pas encore... maximum trois semaines...

Son hôtesse consulta ses réservations avant de se retourner vers le tableau des clés derrière elle. Elle ne décrocha une et la lui tendit :

- Chambre 12. J'espère qu'elle vous plaira. Le petit déjeuner est servi entre 8 et 10 heures. Par contre, nous ne faisons pas restaurant, mais si vous le souhaitez, je peux vous en conseillez quelques uns qui vous accueilleront très bien.

Cela ne dérangeait pas Anna, son enquête allait l'amener à parcourir la ville et elle adorait découvrir les endroits typiques.

- Merci beaucoup madame, répondit-elle poliment.

- Appelez-moi Evelyne, lui dit-elle avec un bon sourire.

Evelyne ressemblait à la grand-mère du Petit Chaperon Rouge. Elle portait un tablier à carreaux qui lui servait sans doute à faire le ménage et de petites lunettes rondes lui tombaient sur le bout du nez. Elle lui proposa gentiment de lui montrer sa chambre.

Anna ne fut pas déçue en la découvrant. La pièce à la décoration épurée était petite mais fonctionnelle. Au centre trônait un lit double aux draps d'un blanc immaculé qui la rassurèrent immédiatement sur la propreté des lieux. Une petite salle de bain annexe complétait le tout dans des tons bleus et blancs qui rappelaient la mer toute proche.

- C'est parfait, annonça-t-elle à son hôtesse qui attendait avidement sa réaction.

- Très bien. Je vais vous laisser vous installer alors.

Tandis qu'Evelyne refermait la porte derrière elle, Anna déposa sa valise avant de se poster à la seule fenêtre de sa chambre. Elle observa un moment l'avenue arborée qui s'étendait face à elle.

« Calais, me voilà ! », se dit-elle pour se donner du courage.


Le poids du silenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant