04.

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𝐞𝐯𝐚𝐧𝐞



𝐓𝐖 : 𝐂𝐑𝐈𝐒𝐄 𝐃'𝐀𝐍𝐆𝐎𝐈𝐒𝐒𝐄.



Les images de Marin me fonçant dedans me reviennent comme des flashs. Elles arrivent toutes au même instant, sans me laisser le temps de les analyser ou même de tout bien visualiser. Je m'arrête d'un coup, me massant les tempes et fermant les yeux. Cela n'arrange rien. J'aimerais que mon cerveau ne m'en veuille pas autant, au point de me faire remémorer les moments qui font le plus mal. Quelques souvenirs viennent s'entrechoquer avec ceux datant d'il n'y a pas longtemps. Ce n'est clairement pas le bon moment

Je reprends une bonne fois pour toute ma respiration mais rien n'y fait : elle devient de plus en plus saccadée, au point où respirer est difficile. Ma tête être les mains, j'essaie de me calmer. J'essaie mais n'y arrive pas. J'essaie de penser à autre chose, sauf que tout vient petit à petit. Un banc est non loin, je m'y assois. Je pose mes coudes sur mes genoux et crie quelque chose que je ne comprends pas moi-même.

Le choc est puissant. Puis plus rien.

J'ouvre mes paupières, sentant une présence à mes côtés. C'est lui. Il est là, à ma droite. Il me sourit, me dit que tout va bien, que rien n'est grave.

Puis il disparait. Je veux le rattraper, le serrer dans mes bras. Je veux mais je ne peux toujours pas.

D'un coup, je tombe par terre, hurlant son nom. Seules les mouettes me répondent. Elles ont sa voix. Enfin, je crois. Quand je suis de nouveau maitresse de mon corps et de mon esprit, il me faut un moment pour me rappeler de ce qu'il vient de se passer.

Depuis quatre ans, ces crises se font de plus en plus fortes. Au début, ce n'étaient que de simples flash-backs. Maintenant, chaque instant de vie me met dans une nouvelle angoisse. Chaque personne que je peux croiser me fait me remémorer ce que c'était avant. Avant que ces deux minutes changent tout, à tout jamais.

Mais c'était avant et maintenant il faut que j'aille de l'avant. Cette phrase berce mes journées mais ne les impacte pas pour autant.

Le sourire provocateur de Marin m'apaise sans que je ne sache pourquoi. Ses fossettes qui se creusent, ses yeux bruns qui se froncent et ses boucles noisette brulées qui volent.

Il ne s'est même pas excusé. C'est ce qui tourne et retourne dans mon esprit à mesure que je marche vers la plage. Je lui en veux d'avoir fait naitre cette crise en moi. Il pensait peut-être que ce n'était rien, mais c'est bien plus que ça. Son comportement ne me plait pas malgré tout ce qu'il a pu comprendre, et je compte bien le lui montrer.

En quelques minutes, puis après de nombreux arrêts photos, j'aperçois enfin ma meilleure amie au loin, assise seule à même le sable, son regard vers la mer, comme toujours. Je souris immédiatement et tente d'accélérer, chose plus que dure sur le sable. À bout de souffle, je suis derrière elle. Kelly ne m'a toujours pas remarqué alors je la contemple et la trouve magnifique.

Kelly est ce que je suis fière d'appeler ma meilleure amie. On nous a souvent dit que les contraires s'attirent, mais qu'une blanche et une noire ne pouvaient pas se compléter. Parce que c'est bien comme cela qu'ils la nommaient, il y a quelques années. Elle était pour eux la noire de service, celle avec les cheveux volumineux dans lesquels on s'amuse à passer nos mains. Mais Kelly est bien connue pour ne pas se laisser marcher dessus. Elle les a vite remis à leur place, leur prouvant une nouvelle fois qu'ils ne sont pas supérieurs, eux, et leur couleur de peau basique terne.

Let Somebody Go T.1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant