Chapitre 7

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Les mots qu'avaient dit le Prince Balldor, le Prince Elsis et la Princesse Adelina eurent l'effet escompté. Theobald était furieux. Il ne pouvait tout simplement pas accepté le fait que Alyssa soit traitée de la sorte. C'était pour lui la honte nationale ultime. Piqué au vif, il ne put s'empêcher de hausser la voix en s'adressant à ses aînés:

- Comment pouvez-vous dire cela à notre sœur ? Pourquoi mériterait-elle d'être traitée ainsi ? Elle ne vous a rien fait. Alyssa fait tout ce qu'elle peut pour se démarquer. Et vous, vous la traiter comme une sous-personne. Elle est née de la même mère que nous, respectez-la ! S'énerva Theobald.

Bien sûr, cette intervention n'échappa pas aux oreilles des personnes présentes dans la salle. Chacun était captivés par ce que le Prince Theobald faisait pour la Princesse Alyssa que l'on appelait "Le Corbeau". On avait l'impression de se croire au théâtre. Et où Theobald se trouvait mieux que sur une scène ? Il allait tourner la situation à son avantage. Il se rendit rapidement compte que cette intervention allait lui servir de tribune pour faire entendre ses idées et ses convictions. Au lieu de solliciter la clémence, Theobald allait choisir l'attaque.

- Voilà bien de beaux discours, mais ce que j'y vois moi, c'est une situation désespérée. Répondit le Prince Balldor.

- Je ne peux pas croire que ce "Corbeau" mérite le titre de Princesse. Elle ne fera que te gêner. Tu devrais penser à toi plutôt qu'à elle. Critiqua le Prince Elsis très remonté.

- "Le Corbeau", ne peut-il pas se défendre tout seul ? Il a besoin de ta protection ? Quand tu choisis une cause perdue, tu vas jusqu'au bout, Theobald. Rajouta la Princesse Adelina.

- Je vous interdit de l'appeler "Le Corbeau" ! Elle a un nom, et c'est Alyssa. La Quatrième Princesse Alyssa Cavendisch, Princesse de l'Empire Cavendisch, et accessoirement ma sœur jumelle ! S'énerva de nouveau Theobald.

A toutes les répliques que le Prince Balldor, le Prince Elsis et la Princesse Adelina lançaient, Theobald répondait par des harengs et des long discours. Ce qui était assez étonnant, c'était sa capacité à transformer une situation difficile en triomphe, talent que l'on ne lui avait jamais vraiment connue. Ceux qui regardaient, l'Empereur et l'Impératrice mais aussi Marianne et Lilus étaient surprit par une telle répartie et une telle ferveur de la part du quatrième prince. Cette humiliation pour sa sœur jumelle Alyssa, il en faisait une victoire en se posant en martyr et en sauveur. Et bien sûr, il recueillait les applaudissements du public dans la salle. On ne pouvait imaginer une meilleure tribune pour lui après cela. Theobald poursuivit:

- Ce que je vous dis aujourd'hui, je le fais pour le bien de la Princesse Alyssa, ma jumelle avec qui j'ai toujours vécu. J'ai peut-être toutes les chances contre moi, mais l'avenir me donnera raison.

- Mais enfin, Theobald. Ne te donne pas en spectacle de la sorte, je t'en prie. Intervint Alyssa.

- Ce n'est rien, ne t'en fais pas, Alyssa. Rassura Theobald. 

Alors que l'on s'attendait à ce qu'il revienne sur ses déclarations, pouvant le conduire à un jugement qui lui aurait valu une lourde sanction malgré son titre de Prince, il affirmait avec fierté, sa détermination: 

- J'en revendique à moi seul la responsabilité. Mais je ne suis pas fou pour autant. Si aujourd'hui, je me tiens devant vous comme un anticonformiste, c'est en tant qu'anticonformiste envers les inepties dites contre ma sœur. Il n'y a pas d'excuses contre ceux qui disent du mal de la princesse Alyssa. Enchaîna Theobald.

- Theobald... S'émerveilla Alyssa face à la répartie de son frère jumeau.

Theobald défendait sa sœur jumelle, avec des diatribes enflammées. Tout d'abord, il mettait en doute la position de ses aînés vis-à-vis d'Alyssa qui la dénigrait publiquement et dont il remettait en question ces derniers. Il prenait cela pour une insulte. Mais ce n'était pas tout ce que Theobald, affirmait, un dessein bien plus grand, déclarait-il, lui était destiné.

- L'homme qui sent amené à diriger un peuple n'a pas le droit de dire : « Si vous voulez de moi ou si vous me le demandez, je coopérais." Non ! Il est de son devoir de devancer l'appel. L'homme qui est né pour être Empereur ne le devient pas par la force des choses, mais parce qu'il le veut. Conclu Theobald satisfait de lui.

Theobald était toujours passé pour un prince qui se refusait de rentrer dans des cases que la société bâtissait, mais cette intervention ce jour-là, avait fait de lui une figure nationale. Quelques jours plus tard, les prises de position de Theobald ne s'étaient pas arrêtées à la salle de réception, elle avait fait aussi la une des informations qui circulaient dans la capitale et même aux alentours du Royaume. Et surtout, ses harengs à cette réception avait enflammé l'aristocratie. Elles ont même eu raison du scepticisme de la Princesse Marianne, alors aspirante à être la Sainte de l'Empire. Restait cependant une personne et non la moindre, à convaincre: l'Empereur. Après quelques jours de réflexion, ce dernier allait rendre sa décision auprès du quatrième prince:

- Theobald. Commença l'Empereur.

- Oui, père ? Demanda Theobald.

- Où as-tu appris à faire de telles déclarations devant une foule avec une parfaite improvisation ? Demanda l'Empereur.

- Je ne sais pas. C'est sorti tout à coup. Et je ne regrette pas de l'avoir fait, j'assume ce que j'ai dit ce jour-là. Répondit Theobald.

- Tu as capté l'essence même d'un chef. Tu pénètres l'esprit de l'auditeur, tu en tires des leçons. Cela s'appelle le respect, Theobald, et pour cela, je vais t'accorder un souhait, et si je peux le réaliser, je le ferai. Proposa l'Empereur.

Face à de tels arguments, Balldor ne put dire grand chose. Elsis et Adelina non plus. Theobald avait enfin la possibilité de prendre l'avantage pour enfin changer l'histoire et préserver la vie d'Alyssa. Mais quel vœu formuler ? Il y avait tellement de possibilités, et en fonction de ce qu'il choisirait, le déroulement de l'histoire allait peut-être être différent. Theobald n'avait pas intérêt à se tromper. Et en réfléchissant, il su ce qui était le plus juste aussi bien pour lui que pour Alyssa:

- Je souhaites rencontrer le peuple en compagnie d'Alyssa. Même si j'ai peu de chance de vous succéder Père, je veux apprendre à connaître ces gens qui nous vénèrent et qui méritent notre reconnaissance. Et Alyssa aussi. Elle mérite aussi bien que moi ce souhait. C'est pour elle que je l'ai fait. Répondit Theobald.

- Ton choix est assez original, je suis d'accord pour l'exhausser. D'ici quelques jours j'organiserai une sortie pour vous deux auprès des habitants. Décida l'Empereur.

C'était la meilleure chose à faire. Pour Alyssa, la seule façon de se faire bien voir auprès du peuple était de s'attirer sa sympathie et quoi de mieux que de les rencontrer pour faire remonter leurs problèmes à l'Empereur. Mais bientôt, de nouvelles difficultés attendront le quatrième prince qu'il était bien décidé à surmonter.


Matta no Hikari no Naka deOù les histoires vivent. Découvrez maintenant