36. Désespoir

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Alessandro

Après la mort mort d'Ayen, Léna s'est effondrée. Je la voyais immobile, sur le sol, entourée du sang de son ami, les yeux vides d'émotion et remplis de larmes.

J'ai dû reconduire Ethan chez lui, puis je suis revenu pour mia cara. Ethan est devenu furieux. Impossible de le calmer. Sa douleur n'arrangeait rien. Il s'est pris une balle au niveau du flanc. C'est très douloureux mais pas assez pour le faire taire. Durant tout le trajet du retour, il a pesté contre Léna. Il l'a insultée de tous les noms. J'ai pu constaté que son langage est très fleuri et il ne manque pas d'imagination. Mais un seul mot ressortait : « traître ».

Il considère mia cara comme une traîtresse.

Une fois qu'Ethan est rentré chez lui, je l'ai accompagné jusqu'à sa chambre et j'ai appelé un médecin spécial qui s'occupera de lui et qui gardera le silence.

J'espère que celui-ci repartira dans un meilleur état que le précédent. La dernière fois qu'Ethan a eu affaire au médecin de l'Ordre, il lui a cassé le nez et a perdu deux dents.

Pourvu que celui-là ne le mette pas en colère.

Je suis retourné à la boîte de nuit pour récupérer Léna.

Elle n'avait pas bougé. Son corps gisait à côté de celui d'Ayden.

Putain, Ethan aurait au moins pu l'accueillir chez lui.

Je l'ai prise dans mes bras et je l'ai allongée sur la banquette arrière de la voiture. Le cuir des sièges sera taché de sang mais c'est le cadet de mes soucis.

Léna est restée muette pendant tout le trajet. Et c'est ce qui m'inquiète le plus. Je crains qu'elle ne tombe dans le désespoir total et qu'elle ne se relève jamais.

Je l'ai amenée chez moi. Il y a une chambre d'ami alors elle pourra rester autant de temps qu'il faudra. Je l'ai assise sur le rebord de la baignoire de la salle de bain attenante à la chambre.

J'ai ensuite ramené une bassine d'eau chaude pour pouvoir nettoyer le sang séché. Je ne pense pas qu'elle soit en état de prendre un bain ou de se laver elle même. Elle est paralysée et fixe sans cesse un point imaginaire. Je nettoie ses bras, ses jambes, enfin son visage.

Il faudra qu'elle prenne un bain plus tard car il reste du sang dans ses cheveux. Mais pour ça, elle a tout le temps. Il faut qu'elle retire sa robe couverte du sang de son ami. Je n'ai pas de quoi la vêtir alors je lui ramène un peignoir. Ça devrait faire l'affaire, le temps que je lui trouve d'autres vêtements. Je quitte la salle de bain pour la laisser se changer. Après quelques minutes j'entre à nouveau.

Elle est assise sur le carrelage et ne bouge pas. J'ai l'impression qu'elle ne me voit pas. Qu'elle n'a pas conscience de son environnement. Elle doit encore assimiler ce qu'il s'est passé.

Je la soulève et la dépose dans le lit. Je recouvre délicatement son corps avec les draps.

De nouvelles larmes coulent de ses yeux. Je ne sais pas comment les arrêter, alors je les laisse couler.

Son ami a été tué devant ses yeux. Aucun mot ne peut la réconforter.

Elle ferme ses petits yeux pour essayer de dormir. Mais je doute qu'elle trouve le sommeil facilement. Je caresse doucement sa joue pour lui montrer que je suis là. Je reste quelques minutes puis je quitte la pièce.

Il lui faut du repos, beaucoup de repos.

***

Une semaine plus tard.

Léna a retrouvé sa voix. Elle me parle parfois, mais se cache dans le mutisme aussi vite. Elle quitte rarement sa chambre. Je dois souvent lui apporter son repas au lit. Il faut qu'elle mange même si elle ne veut pas. Elle ne doit pas maigrir davantage.

Son corps avait été mis à rude épreuve quand Ethan « s'occupait d'elle ». Ça fait deux mois qu'elle reprend un peu de poids, mais ce n'est pas suffisant pour retrouver sa masse d'origine.

Je dois parfois quitter la maison pour exécuter les ordres, mais je reviens le plus vite possible pour éviter de la laisser seule. Elle dort beaucoup, enfin, reste dans son lit et ne bouge pas avant quelques jours. Après, elle sort de la chambre pour déambuler sans but dans la maison.

La voir aussi perdue et achevée me pince le cœur. Mais je ne peux rien faire.

***

Léna

Aless toque à la porte, et entre deux secondes après.

— Je t'ai apporté le dîner. Tu n'es pas obligée de tout finir. Mais essaye de manger tout ce que tu peux, d'accord ? Pour me faire plaisir ?

Je n'ai pas envie de répondre. De toute façon, je n'y arrive pas. Prononcer rien qu'un mot me donne envie de pleurer.

— Je te laisse, Léna. Je reviens d'ici trente minutes pour débarrasser l'assiette.

Je n'ai vraiment pas faim. Je n'arrive pas à trouver l'appétit depuis une semaine. Je me force à manger devant Alessandro, mais je vomis mon plat dès qu'il ne me regarde plus.

Je me sens terriblement vide. Plus rien n'a vraiment de sens pour moi. Vivre n'a plus de sens. Sans Ayden, sans Ethan, sans joie, sans amour. Seulement la peine et le désastre.

Je n'arrive même pas à être en colère envers Ethan, alors qu'il m'a profondément blessé. J'aimerais ressentir une émotion, n'importe laquelle, pourvu que je me sente vivante.

Je repousse l'assiette qu'Aless m'a apportée et me replonge sous les draps. Je ne veux pas fermer l'œil. Aussitôt que mes paupières se ferment, je revois Ayden. Son corps gisant au sol dans une marre de sang. Son sang qui a coulé injustement. Il n'avait rien à faire dans cette histoire mais il a été pris à parti.

Qu'est-ce que j'aurais pu faire pour que les choses soient autrement ?

Je donnerai tout pour qu'il me revienne.

Alessandro entre pour débarrasser l'assiette comme il me l'a dit. Je le remercie intérieurement d'être à mes côtés quand il n'y a plus personne. Il est la dernière personne sur laquelle je peux me reposer.

Les heures défilent et je finis par fermer les yeux. La fatigue l'emporte et je tombe dans le monde des cauchemars.

***

Sweet Pain [Tome 1 & 2] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant