chapitre 5: COMME DANS UN MAUVAIS REVE

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Depuis plus d'une heure, tante Farma était restée coite, assise sur sa natte de prière dans son salon.



Elle égrenait son chapelet sans grande conviction, fixant un point imaginaire de son esprit



En réalité ses pensées étaient ailleurs tout autant que son cœur était lourd de chagrin.



Voilà plus de deux mois que Sonia était partie avec Alma et depuis, la vie n'avait plus été la même dans sa maison.



Elle avait mis à la porte de chez elle l'unique fille de sa sœur décédée et qui la lui avait confiée en mourant.



Elle avait failli à sa promesse pensa t-elle.



-ay man fou sama ndiaboot gui nek ? (Où se trouvent mes enfants ?)


Souffla t-elle douloureusement en se tenant la tête entre les deux mains quand le tonnerre gronda fortement en ce début de soirée de mois d'octobre, accompagné d'un éclair aveuglant.



Oui il pleuvait encore fortement sur Dakar. Surtout ces derniers jours, de violents orages faisaient frémir plus d'un. On était au mois d'octobre oui, période durant laquelle, les pluies ne sont pas aussi fréquentes mais cette année, il n'avait pas beaucoup plu jusqu'en octobre où le ciel s'était étrangement déchaîné, pleuvant presque tous les jours.



Ce qui avait provoqué l'inquiétude et la consternation dans le monde paysan car il était clair que leur récolte de cette année allait beaucoup en pâtir.



Et à chaque fois qu'il pleuvait à boire debout comme ce soir, Farma ne pouvait s'empêcher d'avoir le cœur serré.



Elle n'avait aucune nouvelle de sa nièce, aucune. Elle aurait voulu l'appeler, la voir ou savoir au moins dans quoi elle était.



Est-ce qu'elle allait bien ? Est-ce que Alma allait bien ? Est-ce qu'elles avaient mangé ? Où dormaient-elle ? Comment faisait-elle pour y arriver ?



Tant de questions qu'elle se posait quotidiennement avant que la dernière ne la renvoie à ce jour où elle avait découvert le véritable visage de sa nièce, une prostituée qui se vendait sans vergogne alors que tout le monde la croyait intègre et sérieuse.



Cette dernière pensée chassa quelque peu ses inquiétudes et elle se leva pour aller dans sa chambre.



Elle saura se débrouiller comme elle sait le faire. Se convainc t-elle.



Mais son cœur était lourd, sa conscience la pesait et elle se demandait sans cesse pourquoi elle ne l'appelait pas.



-demain à la première heure, sans hésiter, je le fais.



-tu as dit quelque chose Farma ? Demanda tonton Alassane, couché sur le lit.



Elle avait pensé à haute voix sans même le sentir.



-rien Alassane...rien



Comme hier, comme avant hier, comme tous les autres jours en allant au lit, elle se promettait de les appeler tout en ayant la conviction qu'elle ne le fera jamais.





SONIA


J'adore la pluie. Elle m'apporte paix du cœur et sérénité absolue.



Tout autant, j'aime moins les éclairs et tonnerres qui l'accompagnent quelques fois, comme ce soir. Ça me faisait atrocement peur.



La plupart du temps quand il pleut, je me mets au lit, prends ma fille tout contre moi et mets un oreiller sur nos têtes pour ne pas voir les éclairs ou entendre le tonnerre.

SONIAOù les histoires vivent. Découvrez maintenant