Midjourney Island

Chap 4 : Âmes

Amélie, Sam, Mica et Lolita étaient coincés. Derrière eux, le viel homme qui les avait tellement surpris s'approchait en trottinant.

-Veuillez m'excuser, mes chers, mon intention n'a jamais été de vous effrayer ! Enfin si, elle l'a été... Mais je me rends maintenant compte que c'était une grave erreur, et je vous prie de m'excuser. À vrai dire, j'en suis très reconnaissant à ce bon vieux Alex de vous avoir retenus ici. Sans lui, je me serais attiré les foudres de tout l'équipage au moins pour les 100 ans à venir ! Voyez-vous, nous-

-Arrête donc ton discours de sénile, vieux fou, et va chercher le cap'taine. Dis-lui de venir avec au moins 10 hommes !

L'homme rondouillet qui bloquait la porte s'exprimait d'une voix grave et claire, et son ton était sans appel. Les quatre prisonniers étaient pétrifiés. Aucun d'entre eux n'osait faire le moindre geste, prononcer le moindre mot. Le pirate les toisait d'un air sérieux, les sourcils froncés. Il était chauve, une grande balafre lui fendait l'œil droit mais, plus important encore, il était lui aussi de cette même couleur bleutée, transparente, fantomatique. Pourtant le bois craquait sous ses pas, et il ne faisait aucun doute qu'un coup de sa part serait bien réel.

Des pas précipités se firent entendre. Une horde d'hommes à l'allure décidée s'approchait à grands pas. Le pirate qui guidait le groupe, un corsaire d'une quarantaine d'années, semblait être le chef. Il s'arrêta devant les quatre adolescents, et baissa la tête vers eux (bien que Mica fasse exactement la même taille que lui).

-Bonjour, très chers, et bienvenue à Midjourney Island. Je comprends tout à fait que vous soyez effrayés, au vue de l'accueil qui vous a été fait. (Il prononça cette phrase d'un ton glacial, avec un regard appuyé en direction du vieillard.) Cependant, il faut que vous sachiez que nous ne vous voulons rien de mal. Vous comprenez, nous sommes ici depuis de longues années, et un peu de compagnie serait pour nous une véritable bénédiction !

La langue de Samuel se délia enfin.

-Vous êtes... des fantômes ?

-DES FANTÔMES ?! Ah ça non, sûrement pas !

C'était le vieillard au comportement enfantin qui avait pris la parole.

-Les fantômes ne sont que des ombres sans matière ! Ils sont juste bon à observer sans rien faire ! Ils traversent tout, flottent et ne servent absolument à rien ! Nous, nous sommes des ÂMES ! Nous pouvons être touchés, soulever des objets... Nous avons un corps, simplement... Nous sommes morts, et nous ne pouvons pas quitter l'île. C'est compliqué, je sais. C'est une longue histoire. En fait, nous sommes m-

-ASSEZ !

Le chef avait crié si soudainement qu'Amélie sursauta et lâcha un petit hoquet de surprise.

-Nous sommes des pirates, continua-t-il, qui avons fait naufrage sur cette île. Pour des raisons que nous ignorons, nous y sommes coincés sous la forme d'âmes. Les journées sont longues ici et nous vous serions gré de passer nous voir de temps en temps. Tenez, je vais vous présenter à l'équipage, d'accord ? Vous verrez, il y a des jeunes de votre âge !

À ce stade de la conversation, les quatre amis auraient préféré refuser, mais ils avaient bien trop peur des représailles pour s'y risquer. Le capitaine avait un couteau enfoncé dans le cuir de sa ceinture et, sans nulle doute, il avait déjà beaucoup servi.

Les adolescents furent donc présentés au reste de la bande, dont des jeunes souriants très enthousiastes de leur présence. Ils découvrirent également que le vieux pirate bavard s'appelait Jod, et que le chef s'appellait Franklyn, prénom dont ils se seraient volontier moqué si il n'avait pas été porté par un corsaire à l'air menaçant.

Dans un coin de la salle, le capitaine discutait avec son second.

-Je n'y croyais plus.

-Moi non plus Franklyn, moi non plus...

-Jak va être servi.

Un sourire carnassier découvrit les dents du pirate.