Nous, prostitués

9. Miroir brisé

Azarael

Les rideaux de rouge pourpre tombent de la scène et dévoilent celle ci dans une atmosphère tamisée, les lumières installées le long du bord éclairent le bois sombre et apportent une couleur rouge au décor. Sur cette plateforme, une barre en fer se dresse face au public et au centre Hageshi, les yeux fermés et sa bouche entrouverte, il dégageait toute la sensualité qui enrobait la pièce, il était resplendissant. Durant sa représentation, mes yeux étaient rivés sur lui et je sentais au fond de moi le désir de le rejoindre pour embrasser ses courbes, me rapprocher de sa peau et redécouvrir chaque parcelle de celle ci avec mes lèvres, avant de clore cette envie avec les siennes qui se joignent. Ma peau se dresse et j'y ressens de légers picotements qui font que mes sens me réveillent de mon doux rêve , je me sens comme une proie en pleine traque et je ne connaissais pas l'identité de mon chasseur. A l'opposé de la salle, on m'observait penser tout bas ce que chacun voulait par tout les prix en lançant des billets verts sur l'estrade. Malgré le spectacle de Hageshi devant moi qui s'élançait prendre les billets froissés pour les glisser dans son costume avant de continuer son numéro, je choisis de savoir sur qui je tombe cette fois ci, en sachant que le danseur m'ayant protéger la dernière fois faisait sa chorégraphie sur scène. Le fusil dirigé en ma direction, celui qui le détient croise mon regard au parfait moment comme si cet hasard était bien calculé. Aucun instant ne peut me laisser penser au doute, il me veut. Ayant pris de la hauteur par rapport à la pièce sur une estrade, un homme à la carrure imposante était installé dans un canapé assez large. La seule chose me permettant de le discerner dans cette obscurité teintée d'un rouge harmonieux était le contraste de sa cigarette allumée diffusant une fumée verte opaque dans l'air, tout ce que je voyais était sa bouche ou son regard établissant un lourd message que je préfère éviter. Pendant que je le regardait, des hommes au torse dénudé s'approchaient de lui et donnaient l'argent tombant des mains des spectateurs avides de plaisir, ce qui me fit penser que c'était sans doute le patron de cet endroit lugubre. Avait il peur que je vole une part de son business avec ma présence ?

Reprends toi Azarael, tu délires sans doute c'est juste le patron de Hageshi.

Juste le patron de Hageshi, Edward a fondé cette entreprise il y a maintenant 5 ans avec en tête ce danseur, sa mascotte depuis le début de la création de sa pornographie. Je ne sais pratiquement pas grand chose de lui à part quelques recherches sur son compte Instagram et celui de Hageshi pour le connaître, ils me semblent tout deux si mystérieux. J'ai la sensation que le monde du sexe est plus difficile ici qu'au virtuel et les mœurs de ce pays sont si différents de là où je viens. Cette nouvelle vie commence depuis à peine un mois alors que j'ai quitté les États Unis dans l'action et me voila plongé dans un nouvel environnement où tout semble plus élevé avec une perpective que je n'ai pas atteinte avec Hageshi qui m'apprends à monter de nouvelles marches. Est ce que c'est une bonne chose de m'être séparé de mes vieux démons pour décider de vivre avec des nouveaux ? Pourtant Hageshi me semble être quelqu'un de bien dans ce monde si cruel où nous sommes tout deux des victimes de cette société où l'on doit survivre avec nos corps pour tenter de vivre dans un bonheur si dur à atteindre. Tout me semble si faux, les miroirs montrant mon reflet maintenant me font découvrir une nouvelle personne. Tout est un changement avec lequel s'accompagne un apprentissage pour que je vive avec, et ma confiance s'accorde à ceux qui peuvent m'apporter les bonnes leçons.
La soirée se termine sur ses notes, les spectacles se dévoilent devant nous tout le long avant de se finir, faisant disparaître la magie de la nuit avec les performances de tout ses artistes, j'ai bu quelques verres offerts par certain clients m'ayant reconnu dans ce studio pourtant si grand que l'on a du mal à discerner certaines personnes de la foule. Légèrement alcoolisé, j'attends Hageshi à ma place afin de lui remettre mes félicitations, et ma surprise fut, lorsque ce dernier arrive devant moi avec Edward, son fameux patron. Les lumières de la salle étant toutes rallumées pour créer une ambiance moins intime, je découvre enfin son visage autre part que sur mon téléphone. Ses yeux verts émeraudes maquillés d'un liner, ses joues tracées habillées d'une peau sombre et son petit grain de beauté sur le coin de sa joue gauche près de son œil, tout était identique. Ce soir il portait une tenue noire, composée d'une chemise aux trois premiers boutons déboutonnés, d'une veste de costard foncée et d'un pantalon gris, sans doute en soie vu sa brillance.