Chapitre 5

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14 JUILLET - 09H37

PALERME

Livia

Mes doigts effleurant les draps en lin de l'hôtel particulier, je regardais les toiles qui encombraient la chambre, ce petit français était définitivement l'être le plus intriguant qu'il m'eut été donné de rencontrer. Toutes les toiles représentaient une femme, ou plutôt, le corps d'une femme sans visage. Toutes, sauf une, elle représentait un couple, la femme présente sur le portrait souriait, une main posée sur un ventre déjà bien arrondit, l'homme quant à lui la regardait avec adoration, je me demandais si...

-Livia, m'interrogea Alessandro ?

-Oui ?

Il tira complètement la toile qu'il observait vers la fenêtre pour avoir une vue d'ensemble, il semblait perturbé par la vision que lui offrait l'œuvre.

Avançant tranquillement vers lui, je me stoppais net lorsque j'aperçu entièrement la toile, me laissant sans voix.

-Tu crois que c'est...toi, interrogea mon frère ?

Tous deux ahuris par la vision que nous offrait la peinture, j'eu du mal à répondre :

-Tu as déjà vu des yeux aussi verts que les nôtres ? Et la coupe est...

-Il t'a représenté nue...entendis-je la voix chevrotante d'Alessandro.

-Sandro, je ne suis pas nue, je suis couverte de...

-De narcisses, me coupa-t-il.

Il n'y avait aucun doute possible, c'était moi qu'il avait représenté sur cette toile. Entièrement en noir et blanc, excepté les deux billes vertes qui représentaient mes yeux. Mais ce qui me soufflait le plus ce n'était pas la justesse dont il avait fait preuve pour choisir la couleur de mes yeux mais les centaines de narcisses qui recouvraient mon corps. Comment diable, avait-il pû choisir cette fleur-là ? Est-ce qu'il savait qui j'étais? Est-ce qu'il savait...?

Afin de respirer je reculais, je voulais reprendre mes esprits, mais lorsque j'eu une vue d'ensemble sur la pièce ma tête se mit à tourner. L'ensemble des tableaux ne représentait pas une femme, ils me représentaient moi. L'unique variation avec le dernier tableau semblait être le visage, avant hier je n'avais pas de visage pour lui. En revanche, par je ne sais quel miracle sur chacun des tableaux au moins une narcisse apparaissait.

Les dates figurant sur les toiles m'amenèrent à penser qu'il existait entre le petit français et moi des liens bien plus étroits que je n'aurais pu l'imaginer.

-Livia, il faut que nous fouillions le reste de l'appartement, ils ne vont pas tarder à rentrer.

Je hochais la tête en guise de réponse et me rapprochais des autres chambres, au total : cinq.

Cinq chambres occupées ?

-Alessandro, je croyais qu'ils n'étaient que quatre ?

Les sourcils froncés et la bouche pincée de mon frère me permirent de comprendre que quelque chose nous avait échappé.

-Vieni fiore mio vale la pena andarsene, m'intima mon frère.

Je remarquais alors des photos, certaines de Pia ou encore Andrea dans les rues palermitaines et quelques-unes de moi, sur celles-ci apparaissait constamment Alessandro.

Puis j'aperçu les photos des meurtres, un grand nombre.

En les voyant étalées sur la table, la réalité me frappa, je renfermais une violence sans pareille lorsque j'explosais. Je réalisais qu'au sein de la nuit je laissais s'exprimer une part de moi que je muselais lorsque le soleil se levait.

La testa di MoroOù les histoires vivent. Découvrez maintenant