La justice empoisonnée (FR)

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LA JUSTICE EMPOISONNÉE

            Hiver fatal et cieux grinçants. Corbeaux capricieux et larmoyants. Tout a commencé des siècles auparavant. Un matin qui semblait être comme les autres. L'aube d'un nouveau jour, d'une nouvelle histoire, et du premier festival.

            Le souffle du vent fait gronder les murs de pierre, similaire à la levée d'une armée, aux bottes de fer écrasant la fragile terre. Au château du Pays, un soldat rompt le silence glacial.
             — Monseigneur, les voici, les couards que vous nous avez envoyés arrêter.
             Deux roturiers ploient le genou face à l'empereur de la dynastie : Charles VII. Fier de porter sa couronne, dévisageant – toisant avec toute son arrogance – ces individus depuis ses plus hautes marches, il élance sa voix dans la salle aux cents échos.
             — Il est flagrant que ces aigrefins périront d'une main pourpre, qu'il s'agisse de notre bourreau, ou de celle d'un quidam portant nos couleurs. Ils sont las d'être dérobés, cela va de soi, vous devez être châtiés. Voilà même que l'étonnement me gagne, quand je les vois daigner me regarder, de leur air nonchalant. Ils paient de mine. Chevaliers !
             Interpellés, les gardes en sa compagnie tapent leurs talons au sol, en position d'honneur.
             — Regardez leurs yeux pervers. Ne ressentez-vous point honte et perfidie ? Je ne m'étais pas trompé, ce sont des voleurs. N'importe qui a déjà tué tuera encore, et ce sera vous les victimes. Nul pardon ne pourrait vous être accordé.
             — Monseigneur, je–
             — Messieurs ? l'interrompt Charles. Qu'ouï-je ? Vient-il d'ouvrir son avaloir sans permission ?
             — Il l'a fait. répond un fidèle.
             — Qu'ils reposent aux geôles. Je n'ai point envie de ternir ma bonté pour de simples rats. Par ailleurs, Sir Jean.

            Un type sort de l'ombre et se précipite jusqu'aux pieds chaussés de luxe du roi.
             — Qu'en est-il de la quête des avocats ?
             — Monsieur Pierric Delaval a été franc. Elle doit périr, c'est une hérétique. Toutefois, il n'est point de votre côté. Bien qu'elle vous ait trahi, vous n'avez aucune chance d'être défendu par lui.
             — Il y tient, à cette affaire. grommelle le seigneur. J'entends. Il me faut un avocat au plus vite.
             — Hélas, tous vous renient. Vous avez beau être à notre tête, j'ai l'intime conviction que personne ne croit en votre innocence. Après tout, D'arce est celle qui vous connait le mieux. Son histoire tient la route, selon eux.

            Le serviteur esquisse cependant un sourire. Sa peau s'étire jusqu'à ses oreilles, dévoilant deux rangées de dents jaunies, décalées, et cariées.
             — En revanche, quelques perles cachées sont prêtes à vous défendre. Nous avons trois prétendants.
             — Parlez. somme le roi.
             — Il s'agit d'avocats égarés, servant aveuglément la justice pour gagner quelques pécules en retour, quand bien-même leurs clients ne demeurent pas fauchés. Ce sont d'honnêtes citoyens qui n'auront point crainte de plaidoyer en votre faveur.
             — Organisons un tournois.
             — Vos désirs sont des ordres, Monseigneur. accepte l'homme en s'inclinant.
            — Mon audience aura lieue dans trois mois. reprend Charles. Je veux le plus redoutable. Je ne dois pas échouer.

            À quelques lieux d'ici, se tient justement un procès, sur le point de débuter. Les bras croisés, les jambes également, la tête légèrement baissée pour voiler son visage dans la pénombre, un type observe tout le monde depuis ce banc.

            — La défense de Monsieur Renaud Gascogne ne s'est-elle toujours pas présentée ? demande un intendant.
            — Nenni. déclare son collègue huissier.
             — Diantre. soupire le premier. Dans quelques minutes sonnera la cloche de l'abbaye. À son retentissement, s'il n'arrive guère, l'accusé perdra son droit d'être représenté et sera immédiatement envoyé au bûcher.
             — A-Alors c'est une condamnation à mort ? marmonne un paysan plus loin, écoutant cette conversation.
            — Oui. répond un inconnu. On dit que c'est un procès pour meurtre.

Trial Festival : Les larmes de la justice Où les histoires vivent. Découvrez maintenant