18-Pdv Atla- Mésaventures

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Je soupire en m'emparant de mon couteau de travail. Le poisson pends mollement au bout de mes doigts lorsque je le fends en deux, le dépeçant de ses organes vitaux. Ce spectacle qui a le don d'en répugner plusieurs ne me dégoûte plus le moins du monde. Moi, il me rappelle mes proches.

C'est un de mes frères qui m'a tout appris de ce travail. Étant le plus jeune d'une fratrie composé d'une soeur et de cinq frères en me comptant, ma mère n'a jamais eu le temps de m'apprendre les bases de notre commerce familiale: la pêche. Un travail qui me laisse de marbre. Mais comme cette entreprise nous permet de vivre, je n'ai pas beaucoup le choix. Mais laissez-moi faire les présentations.

Ma mère, Atwali et mon père, Raskas, se sont rencontrés sur la mer. Deux passionnés de la canne à pêche et des aventures en eaux dangereuses. Ils ont vécu plusieurs années, heureux, ensemble. Assez, du moins, pour procréer. Le premier, Terwaki, était la perle rare de la famille: Doué, assidu, habile de ses mains et expert en crabes, mes parents l'adoraient. Il faisait leur fierté et le village entier chantait ses louanges. Inévitablement, cela attira l'attention des femmes, dont une du nom de Rel'lia. Le coup de foudre. Ainsi partit-il faire sa vie, sous les regards aimants de ses parents et les pleurs des plus jeunes. Revenant au gré du vent et des saisons.

Puis ils avaient eu Anli, le seul de la famille à être vraiment passionné par son travail. Il pouvait passer des heures rien qu'à parler de filets et de variétés de poissons. Souvent absent, on ne le voyait que lorsque les saisons de pêche était terminés.

Vint ensuite la seule fille, Aglia. Belle, douce, talentueuse. Elle adorait prendre soin de ses frères plus jeunes, l'oreille attentive de la famille. Elle avait une voix comme nul n'avait jamais vu et de nombreux prétendants à ses pieds. Malheureusement pour eux, elle est déjà prise par Tay'lung, un des meilleurs geurriers d'Awa'atlu. Une deuxième mère était née, remplaçant peu à peu la véritable génitrice de ce clan, qui se tuait au travail pour oublier la mort de Raskas, survenue peu après le départ de Terwaki. Une véritable force de la nature, cette Metkanyia là.

Le troisième fils, Loy, était taciturne, renfermé et un véritable poète dans l'âme. Ces contes défiait l'imagination et il adorait les partager avec le reste du monde. Rêveur, on le voyait toujours le regard perdu dans les méandres de son esprit. C'était lui qui nous avait tout appris du métier, comme mentionné plus tôt.

Puis, finalement, venait les jumeaux, moi, Atla, et Yurka, mon frère, né quelques instants avant moi. Nous avons tout les deux une préférence pour la gente masculine et Yurka est aussi turbulent, animé et désorganisé que je suis doux, passif et, je l'avoue enfantin. Nous travaillons tout les deux au commerce à tout les jours et nous entraidons lorsque nos âmes soeurs respectives viennent nous rendre visite. Justement, un bruit de pas m'extraie de ses réflexions.

Aujourd'hui, ce n'est pas Utmir qui vient à notre rencontre ( à la grande déception de Yurka), mais bien Lo'ang, le fils du chef dont je suis secrètement amoureux. Je suis si excité lorsque je le vois qu'une entraille de poisson manque de frapper mon jumeau en pleine tête.

-"Calme-toi, par pitié! Tu as une idée d'à quel point ce truc sent la mort ?! Au lieu de vouloir me tuer, tu devrais aller rejoindre ton beau guerrier" Me hurle Yurka, visiblement frustré.

-"Tu es juste jaloux que ce ne soit pas Utmir" Je réplique.

Cette phrase me vaut un "Déguerpis, sale garnement" accompagné de marmonnements inaudibles que je fais mine de ne pas entendre. À la place, je me jette dans les bras de Lo'ang qui me fait tourbilloner en riant aux éclats.

-"Ah! Je suis content de te voir aussi, Atla! Je venais te demander si tu voulais aller à l'arbre des âmes avec Tsireya, Kiri, Tuk, Ky'ira, Neteyam et moi"

Ses mèches turquoises et son sourire étincellent dans la lumière du matin. Comment pourrais-je lui refuser quoi que ce soit ?

-"Bien sûr que je le veux!" Je m'exclame en me saisissant de sa main.

Il me sourit de nouveau, fait un petit signe de la main au Yurka enragé qui découpe la marchandise avec une aura meurtrière et m'entraîne sur les quais. Nous parlons de tout et de rien en nous dirigeans vers les Ilus. Les autres nous saluent, et nous nous empressons tous de chevaucher nos montures. Comme il n'y en a pas assez pour tout le groupe, Tuk monte avec Kiri et moi avec Lo'ang. Je passe mes bras autour de ses hanches et la dernière chose que je vois avant que nous plongieons est le sourire malicieux de Ky'ira.

***

L'arbre des âmes a toujours été un lieu de légendes au sein de notre peuple. Il représente la voix de nos ancêtres et les conseils qu'ils nous provident en ce monde. J'adore faire le lien avec lui. À chaque fois, j'entends la voix de mon père me murmurer à l'oreille. J'ai presque l'impression de le connaître dans ces moments-là.

C'est donc sans plus tarder que je fais la connexion avec la plante. Je peux presque sentir Ewya à mes côtés. Dans un stade proche de la plénitude, j'ai l'impression de rêver. Ce n'est que lorsqu'on me secoue brutalement l'épaule que je reviens à moi-même.

-"Atla! Kiri a un problème!" Me hurle Lo'ang, paniqué.

En effet, cette dernière est prise de violentes convulsions et nous peinons à la remonter à la surface. Neteyam la dépose rapidement sur un Ilu est s'en va rapidement avec elle. Nous nous hâtons de rejoindre Awa'atlu également.

Une fois à destination, nous apprenons que Norm, un ami scientifique de Jake est venu pour ausculter Kiri et s'est rapidement fait écarter par Ronald, la chamane et cheffe de village. Personne n'est autorisé à entrer. Je m'assois aux côtés de Lo'ang et je n'ai qu'à croisé son regard pour savoir, que peu importe les circonstances, tout ira bien si il reste à mes côtés.

Lo'ak x oc Où les histoires vivent. Découvrez maintenant