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CHAPTER ||2

__Emmy__

  La récréation vient de sonner et je suis comme à mon habitude avec Alice. Elle a retrouvé un de ses amis qu'elle a rencontré pendant les vacances. C'est bien pour elle.
Il nous propose d'aller rejoindre son groupe de garçons et Alice accepte sans réflexion. De mon côté je ne donne pas d'objection. De toute manière à quoi cela servirait ? Après tout ce n'est que qu'une personne banale qui veut rejoindre ses amis, mais la différence c'est que nous l'accompagnons. Nous arrivons devant deux garçons.

"Voici Alice, nous nous sommes connues pendant les grandes vacances et sa meilleure amie Emmy" nous présenta Aaron.

Pas de commentaires sur ma présentation et tant mieux. Alice lui a sûrement parler de moi. Mais moi, je ne lui ai pas encore parler. Si je lui adresse la parole un jour.

"Enchanté" répond un des deux de ses amis.

Nous lui répondons, Alice très gaiement et moi plus timidement. Je ne sais même pas si ils m'ont entendu. Je reste là à écouter la conversation sans dire un mot et sans lever mes yeux rivés du sol. C'est un moment beaucoup trop intimidant. Des personnes nouvelles qui viennent nous parler. Alice m'a pourtant déjà répété que personne n'allait me mordre et que je pouvais parler. Mais ma petite voix m'en empêche. Je ne peux pas parler dans ce genre de situation quand je suis avec des inconnus. Je sais à peine à quoi ressemblent les deux amis de Aaron. Je les regarderai peut-être la prochaine fois que nous les croiserons.

  Je préfère alors, au bout d'un moment, me détacher de la conversation et me concentrer sur les personnes autour de nous. Elles sont plutôt nombreuses. Et beaucoup d'élèves circulent dans les couloirs. Certains s'arrêtent, d'autres repartent. Certains rigolent, d'autres râlent de ne pas avoir des professeurs qu'ils aiment. Est ce qu'ils me regardent ? Est ce que je suis bizarre ? Pourquoi m'observent-t-ils tous ?

                                 ~~~

  Cela fait trente minutes qu'elle me pose des questions et que je ne parle pas comme à chacune de mes séances depuis deux ans. Des heures entières d'enfer que je dois supporter chaque semaine.

"Je sais que c'est difficile pour toi de parler mais si tu ne mets pas un peu d'efforts à ses séances je n'arriverai pas à t'aider." Me répète pour la troisième fois Mme. Rizzo depuis la semaine dernière.

"Je n'ai pas besoin d'aide." Est la seule phrase que je sors depuis le début. Et cela est vrai. L'aide qu'on m'apporte je ne la prendrai pas. A quoi cela va servir ? Ma vie sera toujours un échec et un calvaire. Pourquoi essayer de m'aider ? Ma psychologue continue son monologue jusqu'à la fin de l'heure.

"Encore une séance où tu ne me réponds pas. J'espère qu'un jour tu auras ce déclic."
Est la dernière phrase qu'elle me dit avant que la séance ne se termine.

  Comme à chaque fois je prends le bus pour rentrer chez moi. Et m'assois à l'arrière pour éviter tous regards.
Pourquoi s'obstine-t-elle sur des séances qui n'ont aucun sens ? Il faut regarder la réalité en face. Rien n'a changé depuis la première fois. Mais depuis deux ans je retourne quand même la voir à cause de l'obligation de ma mère qui croit que je parle. Comment lui dire que sa fille chérie autrefois pipelette ne parle presque plus à personne ? Je pense qu'elle ne l'acceptera jamais de toute manière.  Je comprends bien qu'elle veut m'aider. Mais rien ne servira. Il faut regarder la réalité en face. Je suis destinée à vivre dans le malheur.

  Lorsque j'arrive chez moi, je me dirige instantanément vers ma chambre, je m'enferme dans celle-ci. Je m'assois par terre et ne bouge plus. Mes genoux sont resserrés sur ma poitrine que je serre plus près de moi. Ma tête me fait mal, je suis épuisée, je suis fatiguée, mes pensées se divulguent de plus en plus vite, je n'arrive plus à penser à ma respiration qui s'accélèrent. J'angoisse dans mon propre corps. Un corps qui me fait vivre un enfer. Des perles d'eau se déversent le long de mes joues. Mon corps tremble à ne plus en pouvoir.