Je cours pour fuir ce parc. Je veux partir le plus loin possible. Il faut que je m'éloigne d'eux. Arrivée à côté de ma moto, je l'enfourche rapidement, passe mon casque et pars aussi vite que je le peux. Je fonce dans les rues de la ville et me dirige vers mon ancien logement. J'ai besoin de cogner, de me défouler... pour ne plus ressentir.
Dès que j'arrive devant mon ancien immeuble, je monte rapidement les étages et entre aussi vite que possible dans l'appartement. Je retire rapidement mon casque, mon blouson, mon flingue et mes boots, avant de passer mes gants. Et dès que je suis prête, je commence à envoyer des coups dans mon sac. Je cogne fort, je ne mets aucune retenue.
Il faut que j'arrive à faire disparaître le visage de Luca de mon esprit. Je ne veux plus voir son regard sur moi lorsque je me suis révélée devant eux. Je dois oublier ce que j'ai ressenti lorsque j'ai posé mes yeux sur lui.
Parce que ça fait mal, là où je n'avais plus souffert depuis tant d'années. J'ai mis tellement de temps à refermer les plaies béantes qui zébraient mon cœur. Je ne peux pas les laisser se rouvrir si près de mon but. Il ne peut pas revenir dans ma vie.
Pas maintenant... Ni jamais.
Pourtant, il y a longtemps, j'ai tellement rêvé de ce moment, où il reviendrait dans ma vie. Où je pourrai à nouveau le serrer contre moi, lui dire à quel point il me manque. Mais c'était avant. Aujourd'hui, c'est trop tard. Je ne me sens plus capable d'ouvrir mon cœur... même à mon frère.
J'ai trop peur de souffrir à nouveau.
Alors pour oublier son regard suppliant lorsque je le rejetais, pour oublier ses paroles qui me faisaient mal, je continue de frapper de plus en plus fort.
Mais rien n'y fait.
Il est toujours là, avec ses yeux bleus qui me donnaient tout l'amour qu'ils pouvaient. Je revois son visage blêmir lorsque je lui ai dit qu'il devait toujours me penser morte. Je sais que mes paroles l'ont blessé. Je sais qu'il ne voulait que me prendre dans ses bras... et une infime partie de moi le voulait aussi.
Lorsque je me suis redressée et que j'ai aperçu Luca, j'ai ressenti au fond de moi cette envie de me montrer face à lui. Je voulais reprendre possession de mon corps. C'est pour cette raison que j'ai retiré mes artefacts. Je crois qu'une petite partie de moi était prête à le faire revenir dans ma vie. Mais j'ai laissé Irina reprendre le dessus sur moi. Parce qu'elle sait que cette vengeance me bouffera toute ma vie si je ne l'assouvie pas. Elle est la partie la plus forte de mon âme. Celle sans laquelle il y a longtemps j'aurais mis fin à mes jours.
Et devant ce sac, ce n'est pas Irina mais Valentina qui frappe jusqu'à avoir les bras endoloris par les coups donnés. C'est la petite fille recroquevillée sur son matelas qui souffre de sa solitude, qui cogne toujours plus fort. Je suis à la limite des crampes tellement je frappe fort. Mais ses yeux ne me quittent pas. Son sourire lorsqu'il m'a vu puis la tristesse quand je l'ai rejeté continuent de danser devant moi.
Mais je finis par m'effondrer sur mes genoux au pied du sac. Les larmes reviennent de plus belle. Pourquoi ai-je si mal ? Pourquoi est-ce si difficile de l'oublier ? Pourquoi je ne peux pas refermer ces blessures qui se sont rouvertes ? Pourquoi ne suis-je pas capable de tenir la promesse que je me suis faite il y a si longtemps ?
***
Allongée sur mon matelas, je retiens les larmes qui me viennent. Aujourd'hui j'ai eu dix ans. Mais je n'ai ressenti aucune joie à célébrer cette première décennie. De mes neuf ans, je n'ai que très peu de souvenirs. Ou plutôt si, celui du fort mal de tête que j'avais le lendemain et la sensation étrange de ne pas sentir complètement mon corps. Les restes de ce qu'ils m'avaient administrée s'envolaient doucement.
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La vengeance de Valentina [Terminée]
Roman d'amourComment vivre quand on a vécu six années de son enfance en enfer ? Comment aimer un corps que des bourreaux ont détruit ? Valentina a 30 ans. La mort n'a pas voulu d'elle le jour de ses 14 ans. Devenue invisible de tous, elle sillonne pourtant les r...