Assise sur le canapé du salon, j'observe cet appartement que j'occupe depuis maintenant quatre mois. Je le dois à Amy, l'infirmière qui s'occupait d'Ethan la nuit. Les premières semaines, elle n'osait pas trop m'approcher. Je restais au chevet de mon sauveur et faisais une chose que je ne me serais jamais cru capable de faire. Je prenais sa main entre les miennes.
Je ne supporte toujours pas le contact humain. Mais lui... c'est presque instinctif. N'ayant plus de moto, je prends le bus ou le métro pour me déplacer. Et j'évite au maximum les heures de pointe. Je préfère de loin circuler en soirée, quand la population est rentrée chez elle. J'ai testé une fois de prendre un bus en plein après-midi. Je crois que j'ai effrayé les autres voyageurs, quand je suis sortie en courant au premier arrêt.
A ce moment-là, je logeais dans des petits hôtels, qui ne demandent aucun papier contre un paiement en liquide. Il m'a fallu dans un premier temps aller récupérer l'argent que j'avais laissé à la bibliothèque de Mary, dans mon ancien quartier. Il s'y trouvait toujours, planqué dans une trappe dans le mur, derrière une étagère. J'ai voulu passer à mon ancien logement pour récupérer quelques affaires, mais j'ai vu que les équipes de Danny le surveillaient. Luca n'avait pas perdu de temps pour les prévenir.
Amy est venue vers moi à la fin juillet, trois semaines avant qu'Ethan ne sorte de son sommeil prolongé. Elle s'est approchée doucement, de la même façon qu'on approcherait un animal blessé. Elle m'a dans un premier temps donné des nouvelles d'Ethan. Me rassurant sur son état de santé et la suite de sa convalescence. Elle me laissait seule avec lui. Je restais seulement assise sur ma chaise, tenant sa main et observant son visage.
Et puis un soir, j'ai craqué. Les larmes ont coulé sur mon visage. De la même manière que la première fois que j'ai revu Ethan. Mais ce soir-là, il n'était pas là pour me soutenir. J'étais seule dans sa chambre à lui dire que j'étais désolée de l'avoir entraîné dans ma chute. Je lui assurais que dès qu'il serait rétabli, je sortirais complètement de sa vie et de celle de mes frères. Je n'apporte que le malheur à ceux qui me côtoient.
Et c'est à cet instant qu'Amy est arrivée dans la chambre. Elle s'est agenouillée à mes côtés et a pris mes mains dans les siennes. Elle m'a fait sortir de la chambre pour aller discuter à l'extérieur. Elle m'a demandé si j'étais la seconde victime de l'incendie dans lequel Ethan a été retrouvé. Après ma confirmation, elle m'a demandé où je logeais. J'ai juste haussé les épaules pour toute réponse. Quand elle m'a parlé d'aller chez des proches ou encore dans un foyer, j'ai répondu que je ne supportais pas de vivre avec quelqu'un.
Elle m'a alors parlé de son appartement qu'elle venait de quitter pour vivre avec son copain. Elle m'a proposé de lui sous-louer, le temps que son bail se termine. J'ai accepté en échange de son silence vis à vis d'Ethan. Je ne voulais pas que lui ou encore mes frères me retrouvent. Elle n'a pas cherché à connaître mes raisons. Quelques jours après, je m'installais dans cet appartement comprenant une chambre, une salle de bain, une grande pièce à vivre et une cuisine.
Je me suis sentie si perdue quand je suis entrée à l'intérieur. Les premiers jours, je restais dans le salon, à dormir dans le canapé. Et j'ai pris confiance. Jusqu'à réussir à dormir dans la chambre... sans mettre le matelas au sol. Au fil des jours, je prenais possession de ce logement qui me voyait renaître. Je découvrais une nouvelle vie. Je me reconstruisais loin de tous. Mais surtout, j'acceptais d'être toujours en vie. Les paroles que mon frère m'a glissées à l'hôpital, alors qu'il me croyait endormi, me revenait en boucle. Si tu ne veux pas vivre pour moi, fais-le pour la petite fille que tu étais.
Des coups sur la porte me stoppent de mes pensées. Je me lève du canapé et me dirige vers celle-ci. Un coup d'œil à travers le judas de la porte m'indique la présence d'Amy. Ce n'est pas la première fois qu'elle vient me voir. Je crois pouvoir dire que nous avons sympathisé. Enfin, j'essaye plutôt de ne pas l'effrayer par mon attitude. J'ouvre la porte et tente de paraître cordiale.
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La vengeance de Valentina [Terminée]
RomanceComment vivre quand on a vécu six années de son enfance en enfer ? Comment aimer un corps que des bourreaux ont détruit ? Valentina a 30 ans. La mort n'a pas voulu d'elle le jour de ses 14 ans. Devenue invisible de tous, elle sillonne pourtant les r...