Bleu Magnétique (EN PAUSE)

Chapitre 50

— Eh voilà ! Le retour de notre bien le plus précieux ! a lancé Pavel accoté contre un mur dans le couloir menant à ma chambre au manoir.

Quelques mètres plus loin, Marin, les mains dans le dos, me dévisageait.

Le premier frère affichait un air moqueur. Le second était impassible. Côme m'a fait un signe de la tête et s'est éclipsé. Noisette a voulu en faire de même, mais le Suprême l'a incitée à rester. « Dans les bons et les mauvais moments, la Précieuse doit demeurer aux côtés de sa protégée. »

— Noisette n'y est pour rien. C'est seule que j'ai pris la décision de sortir. J'ai exigé d'elle qu'elle m'accompagne.

La demoiselle, accrochée à la poche de mon gilet, a rétabli la vérité et est parvenue à voler un sourire à Marin.

— Alors, cette excursion ? a demandé le grand blond en se redressant. Vous êtes encore blafarde, mais je constate que la canne a disparu.

— Mouvementée, a lancé la Précieuse.

— Je n'aurais pas dit mieux, ai-je assuré en dépassant les deux Archanges pour entrer dans ma chambre.

— La nuit n'est pas terminée, a annoncé Marin.

— Il est tard.

— Ce n'est grave. Continue sur ta lancée et suis-moi. Nous parlerons de ta sortie au cimetière plus tard, a-t-il annoncé.

— Est-ce que nous allons rendre visite à Eleanor ?

— Non, ce n'est pas encore le moment.

— Dans ce cas, je n'irai nulle part, ai-je notifié très sûre de moi (en apparence, juste en apparence).

Pavel m'a applaudie alors que Marin, la main tendue, m'a fait signe de le suivre.

Il a ouvert la marche et j'ai compris que je n'avais pas d'autres choix que celui de me plier à ses desideratas.

Pavel, sur mes talons, m'a soufflé à l'oreille :

— J'y ai cru ! Vous commencez à devenir convaincante. Ce n'était pas gagné. Est-ce votre petite démonstration de force au beau milieu du cimetière de l'Église des Damnés qui vous a apporté force et confiance en vous ? Ou est-ce la présence de Côme, cet affreux cadavre sur pattes, qui a éveillé votre instinct de survie ?

— Vous êtes bien curieux, Pavel. Et la curiosité est un vilain défaut.

— La curiosité n'est qu'une de mes nombreuses imperfections. Sur une échelle d'un à dix, elle est à deux. Il y en a huit autres avant celle-ci.

— C'est rassurant.

— Je vais droit au but, contrairement au chasseur qui va vous balancer toutes ses sornettes sous forme de devinettes. Parfois, j'ai l'impression que nous avons un coach en bien être plutôt qu'un demi Archange : berk.

— Est-ce qu'une personne sur cette terre trouve grâce à tes yeux ? s'est informé un Marin pince sans rire en s'enfonçant dans les profondeurs du manoir.

— Bien sûr ! Je m'aime, a répondu Pavel.

— On ne l'aurait jamais deviné, a répliqué le Suprême qui franchissait un couloir sombre surveillé par deux gardes de pierre qui n'étaient pas postés là auparavant.

Leurs ailes nous barraient le chemin. Marin a incliné la tête et les soldats se sont avancés d'un pas avant de s'écarter. Leurs ailes semblables à des lames se sont repliées dans leur dos. Le bruit strident m'a volé un frisson.

La porte arrachée par Pavel avait été réparée. Il s'apprêtait à la rouvrir avec force et fracas quand Marin a plaqué sa main contre sa poitrine. Il a saisi le bouton tirage et a ouvert la porte le plus calmement du monde sous le regard ennuyé de son frère.