Chapitre 12

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Martin.


— J'aurais jamais cru te voir à la tête d'une équipe, se moque Thibaut de l'autre côté du fil.

— Ne m'en parle pas ! soufflé-je rien que d'y penser.

Si on m'avait dit en début de saison : « Martin, tu vas t'occuper des jeunes », j'aurais certainement rigolé. Comme si quelqu'un aurait l'idée de me confier des gosses !

Accoudé au balcon de l'appartement, je savoure les quelques rayons de soleil encore présents. Les montagnes s'élèvent au loin. Elles se confondent presque avec le ciel bleu. J'aperçois quelques passants qui profitent du beau temps. Ils longent le Boulevard des Pyrénées, discutant entre eux, tandis que les sportifs les évitent et poursuivent leur course habituelle. Si les voitures ne se trouvaient pas là, le paysage aurait pu être magnifique. Sauf qu'elles étaient là et gâchaient l'ambiance.

— Avoue, t'as un peu apprécié ? me taquine-t-il.

Non. Pourquoi aimerais-je me retrouver impuissant face à des gosses qui ont de trop grosses attentes sur moi ? Je n'éprouve aucune motivation à poursuivre. La preuve étant : je n'ai même pas préparé leur entraînement pour ce soir. Je ne sais pas quoi leur enseigner de plus. Ils ont les bases, ils se débrouillent bien. Ils ont juste besoin d'un bon coach pour les mener à la victoire. Et ce n'est indéniablement pas moi.

— Et votre match ? fais-je pour changer de sujet.

— On a bien joué, il nous manquait seulement un certain arrière droit à la finition pour assurer notre succès.

Je rougis, honteux. Je sais qu'il ne dit pas ça méchamment ou pour me faire culpabiliser. Mais il n'a pas tort. Certes, je n'aurais peut-être pas changé la donne, mais la rencontre aurait pu se dérouler différemment tout de même.

— Il n'était pas là ? murmuré-je d'une voix à peine audible.

Je ne sais même pas pourquoi je lui repose la question alors qu'il me l'a déjà assuré samedi soir. J'imagine bien le sourire triste qui doit orner son visage en ce moment lorsqu'il me répond :

— Désolé, mec.

D'une certaine façon, je suis soulagé. Je ne l'avais pas raté. C'est un bon signe. Mais d'un autre côté, j'ai un pincement au cœur. Je devrais cesser de m'accrocher à cet espoir, il va finir par me bouffer de l'intérieur et pourtant, je continue d'y croire. À huit ans, c'est mignon. À vingt-deux, beaucoup moins.

— C'est idiot, non ? questionné-je après un petit silence.

— C'est normal, Martin. Tu l'idole. C'est ton modèle. C'est ton père. Il n'y a rien d'absurde à ce que tu l'attendes, même après tout ce temps.

— Je sais même pas s'il se souvient qu'il a une famille ici, soupiré-je.

— Et c'est pas en continuant de répondre aux provocations qu'il reviendra. Tu crois que c'est ce qu'il aimerait, que tu foutes tout en l'air pour des caprices ?

Qu'est-ce que j'en sais ce qu'il souhaiterait ! J'ai presque envie de lui hurler qu'il m'a abandonné le jour de mon anniversaire et qu'il n'en a rien à faire de moi. Sauf que Thibaut ne mérite pas ma colère. Il n'y est pour rien. Je suis certainement le responsable de son départ. Et je n'arrange pas la situation en agissant de cette manière, mais je n'arrive tout simplement pas à me contrôler. C'est plus fort que moi quand on l'évoque. Alors non, je n'ai pas la moindre idée de ce qu'il voudrait me concernant !

Je rentre dans l'appartement toujours en discussion. Je me laisse tomber sur le canapé et m'arrête sur un point fixe au plafond comme s'il me donnerait les réponses que je recherche. Thibaut parle seul. Je me contente de l'écouter. Il prend le temps de m'expliquer quelques exercices et des conseils pour gérer au mieux l'équipe. J'acquiesce et essaye de garder toutes les recommandations dans un coin de ma tête pour ce soir, alors que je pourrais tout simplement me les noter, mais non. Je préfère mettre à mal ma mémoire.

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