Chapitre 20

102 14 32
                                    


Axelle.


— Julien m'a dit que tu venais ce soir, c'est vrai ?

Étendue sur le canapé, je lève les yeux de mon ordinateur quittant un instant le monde des révisions. Mon père m'observe, attendant une confirmation. Impossible de savoir dans quel but il me pose cette question. Certainement que ma présence l'embête plus qu'autre chose, sinon jamais il ne m'aurait interrompu pour une annonce de moindre importance.

— Ouais, il veut que je l'aide à étudier les joueurs vu que je souhaite me spécialiser dans le sport.

Je reporte aussitôt mon attention sur le document ouvert. Mon regard se perd dans les lignes bien que mon cerveau n'enregistre aucun mot. C'est uniquement pour faire comprendre à mon père que je suis occupée, que je n'ai pas le temps pour son interrogatoire.

— L'équipe a besoin d'un bon suivi, poursuit-il.

— Non, jure ? soupiré-je.

— Je suis sérieux Axelle, ils doivent rester en forme.

— Je suis bientôt diplômée, je sais ce qui est correct pour eux. Ah, mais c'est vrai, je ne peux pas avoir mon mot à dire, je ne suis pas concernée malgré les recommandations de Julien.

— Tu sais bien, c'est pas ce que je voulais dire, essaye de se justifier mon père.

— Bien sûr que si, sinon pour quoi me demander si je viens ?

Le silence qui pèse dans la maison offre une confirmation à mes pensées. S'il me sortait l'excuse que je perturbe les joueurs, je n'aurais pas été surprise non plus. Je renifle et tente de ravaler mes larmes. Le fait qu'il n'ajoute rien, qu'il ne puisse pas contredire mes paroles me blesse. Je ne devrai pas être aussi touchée. Ce n'est pas comme si je ne le savais pas, après tout. Mais en avoir le cœur net, c'est plus dévastateur encore que les simples suppositions que j'ai eues jusqu'à présent.

— Axelle, commence mon père.

— J'ai pigé, pas besoin de m'expliquer. Quoi que je fasse, rien n'apparaîtra jamais assez bien, je l'ai assimilé. Comprend le Axelle, tu n'es pas une handballeuse, tu ne peux pas comprendre, l'imité-je.

Sans attendre une autre parole, j'embarque mon ordinateur pour rejoindre mon refuge avant de m'effondrer sur le sol. Appuyée contre la porte de ma chambre, mes genoux sont ramenés contre ma tête. Les sanglots se déversent tels des torrents. Je pleure au rythme de la pluie qui s'abat sur la fenêtre pendant que le vent rugit.

Le temps s'écoule lentement. Mon père réalise ses aller-retour habituels dans les escaliers. J'ai entendu ses pas s'arrêter un instant devant ma porte sans qu'il ne fasse rien, comme s'il restait aussi immobile que moi, déconnecté, avant de reprendre ses activités. À chaque passage près de ma chambre, je retiens mon souffle. Jamais il n'effectuera le pas de plus. Jamais il n'essayera d'entamer une discussion. Mais je ne peux m'empêcher d'y croire comme une enfant qui croit au père Noël.

Mon téléphone en main, sans réfléchir, je me rends sur mes messages. Le nom de Julien apparait rapidement. Par automatisme, j'écris un texto. Mes doigts tremblent alors que je le relis. Devrais-je vraiment lui envoyer que je suis indisponible ? Que je ne pourrais pas assister à l'entraînement, car je risquerais de perturber les joueurs ?

Non, il en est hors de question. Mon père ne veut pas de moi ? Ce n'est pas grave. Il lui reste deux semaines à supporter avant que je ne retourne à Barcelone. Il peut bien opérer un effort, d'autant plus que je ne comprends pas pourquoi il m'accuse des tensions récemment perceptibles dans son équipe. Elie en est responsable comme Martin. Surtout Martin.

Heart MatchOù les histoires vivent. Découvrez maintenant