Comptine du vieil enfant

Tic-tac, tic-tac,

Grand-mère s'en va marcher au lac

Tic-tac, tic-tac,

Mais elle est partie sans son sac.

Dans son sac, il y avait,

Des bouées et des jouets,

Elle aurait pu se sauver

Si elle l'avait emmené.

Tic-tac, tic-tac,

Grand-mère s'en va marcher au lac

Tic-tac, tic-tac,

Mais elle est partie sans son sac.

Quand dans l'eau elle est tombée,

Un garçon s'est avancé,

Il a bien voulu l'aider

Mais au jeu elle a échoué.

Tic-tac, tic-tac,

Grand-mère est partie sans son sac,

Tic-tac, tic-tac,

Et elle s'est noyée dans le lac,

Tic-tac, tic-tac...

Comptine ancienne.

La plage était calme, en cette journée de mai, tandis que les enfants jouaient au foot avec une méduse échouée. Ils n'étaient pas surveillés par leurs parents, mais par deux maîtres-nageurs qui n'omettaient pas de tenir à l'œil le remous discret de la bleue et ronde baie. Ce faisant, les deux hommes laissaient dans le sable d'éphémères empruntes, tout en discutant de choses et d'autres :

-C'est bizarre quand même, déclara le premier, un grand blond à l'allure de surfer dont le polo blanc enjolivait les formes.

-De quoi ? répondit le second qui serait en tous points le jumeau du premier s'il n'était pas pourvu d'une épaisse tignasse brune tressée.

-Eh bien, un bateau à voile - par exemple un sloop ou... un voilier -, eh bien il va plus vite si le vent le touche dans le dos, mais de biais. Alors qu'intuitivement, on penserait qu'il faudrait que le vent soit en plein dans le dos pour que la vitesse soit optimale.

-Ah ouais ? Comment tu le sais ?

-Je suis allé dans un musée hier et c'était écrit sur un panneau. On voyait clairement que le top, c'était quand le bateau avait le vent de biais.

-Dans le dos mais un peu à droite ?

-Ou un peu à gauche. Imagine le bateau serait une rose des vents qui pointe vers le nord, eh bien il faudrait que ça souffle en sud-sud-est ou sud-sud-ouest.

-Ah ça m'étonnes. Ça dépend peut-être du type de bateau aussi, non ?

-Je sais pas, peut-être... Enfin oui, après, un bateau sans voile, ça ne va pas s'appuyer sur le vent.

-Certainement. Quoi que. Je suis pas très calé en terme de bateaux, je préfère les arbres, la nature. Peut-être que les voiles ça fonctionne un peu comme des feuillages.

Le jeune homme tressé s'arrêta net, le regard plongé vers la baie, comme pour mettre de l'ordre dans ses idées les plus profondes. Son collègue se tourna vers les enfants et souffla dans son sifflet :

-Faites attention avec la méduse, leurs tentacules peuvent sévèrement vous brûler !

Subitement, il fit volte-face et faillit trébucher en tirant de son sifflet un bruit ridicule. Il était sûr qu'une main l'avait touché.