Chapitre IV

55 5 1
                                    

Un avertissement et une surprise inattendue

Madame Suliman n'avait pas changé, elle était toujours Madame Suliman. Assise dans son fauteuil, elle attendait tranquillement l'arrivée de ses invités. Grande dame fière et impassible, Suliman n'aura jamais affiché de grandes émotions en public. Imperturbable et d'une maîtrise de toute circonstance, son visage ne laissait échapper aucune émotion. Même s'il était difficile de deviner ses pensées, elle ne semblait pas fâchée... bien qu'un curieux sourire en coin laissait planer le doute.

J'espère qu'elle n'a pas la rancune tenace, espéra secrètement Sophie en observant au loin la vieille femme.

Lorsqu'ils posèrent un pied dans la serre, le visage de la sorcière se fit un peu plus doux.

- Hauru, Sophie, c'est gentil à vous de vous être déplacés, se réjouit-elle. S'il vous plaît, prenez place. Nous avons beaucoup de choses à nous dire. Rassurez-vous, je ne vous veux aucun mal, assura-t-elle en voyant leurs mines déconfites.

Lentement, Hauru et Sophie prirent place dans les fauteuils qui leur faisaient face. Il restèrent tous deux silencieux, attendant qu'elle veuille bien évoquer la raison de leur venue.

- Merci d'être là, reprit Suliman. Il est si bon de vous revoir.

- C'est un plaisir partagé.

- Je t'en prie Hauru, ne te donne pas cette peine. Je sais à quel point je te mets mal à l'aise, surtout depuis là dernière fois, répondit-elle avec un sourire narquois.

Sophie la regarda d'un mauvais œil.

- C'est peu de le dire... vous vouliez le transformer en monstre ! Mais pour qui vous preniez-vous ?! bouillonna-t-elle.

- Pour une dame dont de grandes responsabilités incombaient, soupira-t-elle. Il nous faut parfois prendre des décisions difficiles. Je ne souhaitais pas transformer Hauru en monstre mais je n'avais guère le choix. Un sorcier dépourvu de cœur est une menace pour Ingary, il aurait facilement pu devenir comme la sorcière des Landes.

- Jamais ! s'offusqua l'ancienne chapelière.

- Doucement mon amour, répondit le jeune homme en posant une main sur son épaule.

- Elle ment ! Tu n'étais un danger pour personne, répondit-elle en jetant un regard furibond à Suliman.

- Il en était un et une guerre était en cours, je ne pouvais prendre aucun risque. Je lui ai offert le choix, se battre à nos côtés et être libéré de son maléfice ou refuser et œuvrer pour la cause.

- Combattre dans une guerre ou devenir un monstre... deux excellents options, répondit sarcastiquement Sophie en croisant les bras.

- Cette proposition avait au moins le mérite d'exister. J'ai longtemps espéré qu'il se batte à mes côtés, faute de pouvoir compter sur la sorcière des Landes... d'ailleurs, comment va-t-elle ?

- Elle se porte comme un charme, répondit Hauru. Elle a cessé ses mauvaises manières.

Sophie leva les yeux au ciel.

- Je t'en prie, c'est une femme adorable.

La sorcière avait l'air amusé par cette remarque.

- Vraiment ? Je suis surprise que vous défendiez celle qui vous a maudit.

- C'était une personne différente à l'époque, répondit l'intéressée sur la défensive.

- Peu importe, je suis contente de constater que la malédiction a été rompue et que tout est rentré dans l'ordre, continua la sorcière en observant les cheveux argentés de Sophie. Ou presque, ce sort a laissé une cicatrice magique sur vous.

Le Château ambulantOù les histoires vivent. Découvrez maintenant