chapitre 1 : morphée

251 13 0
                                    

c h a p i t r e u n

J'écris pour tout déposer quelque part, pour gueuler toute la souffrance que j'garde. J'écris pour tout oublier quelques minutes. J'écris pour me sentir comprise. J'écris pour ne pas être seule, les mots accompagnent mes pensées. J'écris pour te raconter mon amour. J'écris pour éviter de crever.

3:35pm, sortie du lycée

J'étais assise sur un banc et j'avais placé mes écouteurs dans mes oreilles. Les rayons du soleil venaient taper mon visage, comme s'ils voulaient m'achever. C'est vraiment étrange, mais depuis ce soir-là au bar, cette fille que j'avais admirée, j'avais des millions de questions dans ma tête. C'était la première fois que je la voyais. Elle avait trop bu. Elle ne se souvient peut-être pas de moi.

Quand je l'ai vu et que je l'ai un peu plus observé, mon ventre m'avait lâché. Je ne sentais plus mes jambes et mes mains tremblotaient. Je l'avais, là, sous mes yeux, à ma portée. Mais elle s'est envolée. C'est la première fois que je considérais une fille ainsi. Une fille qui aurait pu me faire tomber à la renverse. Je l'avais senti. Mais croyez-moi, rien que la rondeur de son visage me faisait craquer. Les mimiques qu'elle n'avait cessées tout au long de la soirée avec ses doigts, ses petites mains, m'attendrissaient. La tristesse qu'on pouvait lire dans ses yeux était touchante et incertaine. Des flammes de joie passée y luisaient encore. Seulement en scrutant les traits de son visage, on pouvait deviner que la douleur restait encore et encore.

Je ne saurais pas dire quel âge elle avait. Elle paraissait sournoise mais craintive et naïve. Ses yeux étaient gonflés par la fatigue mais ses fossettes étaient toujours aussi bien dessiner que pour un bébé. Vraiment, j'aurais pu lui donner quinze comme dix-huit.

La peinture du blanc commençait à partir sous mes grat grat incessant. Il était à peine 16:00. J'étais fatiguée de la veille et de la nuit dernière où je n'avais pas fermé l'œil.

_ Alix !

Je me retournais et mon trio d'amour m'attendait. Dhelia, la seule fille des trois me faisait signe de les rejoindre. Aaron et Timéo frottaient la tête de la petite blondinette, consternée. Ils étaient toujours heureux. Ils étaient ma vie toute entière. Je n'avais qu'eux. Mes parents étaient restés à Paris, m'envoyant chez mon oncle pour mes études. « Les U.S. vont te changer de la France, tu verras les gens là-bas sont différents. » qu'ils disaient. C'est vrai que c'était cool. Il faisait beau et le lycée ressemblait aux lycées présentés dans les séries américaines. Alors je me suis installée là-bas, dans un appart' médiocre. Je l'aimais beaucoup. Mon oncle logeait à quelque pâté de maison de là où j'étais, au cas où.

J'avais rejoint mes amis, avec le sourire. Je ne voulais pas leur parler de la fille du bar. Je ne sais pas comment ils auraient réagis. On a marché et on s'est arrêter boire un verre.

8:00pm, appartement d'Alix

Je venais de sortir de la douche. Ce soir j'allais travailler au bar avec mon oncle. Je n'avais rien d'autre à faire, je n'y avais pas le cœur de toute façon. Dehors il faisait nuit et froid. La seule chose qui me rendait un peu plus positive, c'était l'euphorie des gens quand il recevait leur verre. Ou bien encore, l'odeur rustique des bières servies et du comptoir en bois.

11:15pm, bar Lem'On

Je venais d'affiler trois heures sans me poser une seule seconde. Les clients avaient inondés le bar, faute du match de football.

« J'peux y aller ? demandai-je à mon oncle.»

Un plateau rempli de verres dans les mains, et un ticket de caisse entre les lèvres il hocha la tête. Je défie le nœud du tablier que j'avais fait dans mon dos et je remis tous mes cheveux en arrière.

J'étais assise de l'autre côté du comptoir et je sirotais un diabolo en silence, sans broncher. Les cris et les rires des hommes et femmes derrière moi devenaient seconds. Je n'y prêtais plus attention. Je n'avais vraiment pas le moral ce soir. Je crois que ça devait se voir parce que mon oncle me regardait bizarrement et que je sentais le regard d'un client à ma gauche, assis à quelques mètres. Je fermai les yeux, alors. Je déteste que les gens me regardent quand je suis dans cet état, je trouve ça malsain ou innaproprié. Je déposais mon verre dans l'évier et sorti du troquet pour aller me coucher.

Le lendemain, 10:20am, lycée

Je poussais le battant des couloirs de sciences physiques pour me retrouver dans la cour. Les feuilles tournoyaient sous la puissance du vent. Tous les potaches du lycée se blottissaient les uns contre les autres. Je marchais pour rejoindra Dhelia et Tim quand Aaron me coupa la route. Il était blanc comme un linge. Son corps ne tenait même pas debout. Ses cheveux recouvraient ses yeux, mais je devinais leur couleur rouge sanguinolent.

« Aide-moi à sortir d'ici, j'étouffe, dit-il la voix saccadée.

_ Putain Aaron, j'ai cours là. Tu fais chier avec ta merde là. »

Je passai son bras par-dessus mon épaule et je nous dirigeai vers la sortie. J'espérais de tout cœur que mon oncle ne soit pas au courant de mes absences aux prochains cours.

Je tenais toujours Aaron fermement. Il était à moitié endormi mais je savais qu'il ferait attention à mes paroles.

« Aaron, ça fait la quatrième fois ce mois-ci. Putain, réveille-toi. Regarde dans quel état tu te mets. Depuis que..

_ Me parle pas de ça putain ! me coupa-t-il. Je sais que j'suis ridicule mais c'est le seul moyen pour que je me sente rien qu'un tout petit peu bien.

_ Mais putain, tu m'écoutes quand je te parle ? Bien sûr que je veux le meilleur pour toi. Mais le bonheur que tu t'apportes de cette manière va finir par te faire crever. Tu lis sur mes lèvres si tu veux, mais comprends que si tu continues, dans un an maximum tu nous abandonnes tous, Dhelia, Tim et moi.

Il se calma et je sentis qu'il relâcha tous ses muscles.

_ Je n'ai plus rien. Je vais passer pour un hypocrite mais, vous, je sais que jamais vous ne m'oublierez et que chaque premier dimanche du mois, vous viendrez sur ma tombe. Qui se bougera le cul appart vous ? Personne.

Je lâchai son bras, il faillit tomber mais se retint au tronc d'arbre qui était à proximité de nous. Je me reculais en le considérant avec de grands yeux et une mine de dégoût.

_ C'est donc là que tu te replies ? La drogue et la mort. Si tu n'y mets pas du tien, je vais avoir beaucoup de mal à te sortir de cette merde.

Des larmes attaquaient cruellement ses joues. Il était clairement en très mauvais état.

_ Viens Aaron, je te raccompagne chez toi, t'en as assez vu pour aujourd'hui.

Ses membres chancelaient à chaque pas qu'il faisait. Arrivés au seuil de son portail, je pressai le code du bâtiment. Nous prîmes l'ascenseur, une fois rentrés chez lui, je le déposai dans son lit. Il tremblait comme une feuille. Je lui enlevai son blouson et passai mes doigts dans ses cheveux pour lui dégager le visage, transpirant. Je m'asseyais sur le rocking chair et me couvris d'une laine qui traînait en attendant que Morphée vienne le chercher.

Fall from the skyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant