Blé et chocolat

CHAPITRE 3

▶ NdA : La suite est là. J'espère que ça vous plaira :D

ILYSM.

◆◇▪◇◆

C'était certainement la première fois que Newt se levait avant son réveil. Il était toujours réveillé quand le téléphone se saisissait soudainement d'un air de jazz, mais on eût dit que seule la musique avait le pouvoir d'activer ses membres. Il désactiva l'alarme, et partit se doucher. Il regarda son emploi du temps : deux heures de latin, puis plus rien jusqu'au déjeuner. Newt souffla, énervé. Toutefois, il s'y attendait un peu, puisque l'an dernier, c'étaient les latinistes qui avaient eu le privilège des deux heures de sommeil supplémentaires. Il détestait occuper ce créneau, car il n'avait aucun ami en latin. Minho avait choisi MPS, Teresa et Alby anglais appliqué. Or, ces options-là et l'art plastique avaient lieu juste après le latin. Ils ne se croiseraient même pas.

En permanence, il trouvait toujours quelqu'un pour discuter (enfin, les autres profitaient de sa solitude pour venir lui parler), mais c'était passablement ennuyeux et gênant.

Il revêtit un pantalon beige et une chemise bleu foncé. Il descendit ensuite les escaliers doucement, pour atterrir dans une cuisine déserte. Il passa la tête dans le salon, lui aussi vide. Ses grands-parents dormaient. Newt s'allongea alors sur le canapé. Il n'avait absolument rien à faire : ni faim, ni fatigue ne se faisait sentir (étonnamment, au vu de son sommeil écourté et de son absence au dîner de la veille). Il n'avait pas encore de devoirs et ne pouvait se permettre d'écouter de la musique ou de regarder la télévision, afin de laisser sa famille profiter de son repos mérité. Il n'avait même plus envie de dessiner, après ses dernières œuvres nocturnes. Il fit alors une chose qu'il n'avait pas l'habitude de faire, et remonta chercher son téléphone. De nouveau affalé sur le sofa, il regarda ses messages. Il devait avoir en tout et pour tout vingt contacts enregistrés, mais des numéros non renseignés lui envoyaient régulièrement des déclarations d'amour, ou simplement des salutations. Il ne lisait même plus. Avait-il seulement déjà lu ?

Il supprima tous les messages provenant d'inconnus et les quatre-vingt-sept parties du monologue que Violette lui avait adressé durant les vacances d'été. Il n'y avait jamais jeté un coup d'œil.

Après ce nettoyage, il ne restait plus que les demandes d'aide en mathématiques de Minho, ses invitations aux fêtes « inratables », les banalités qu'il échangeait parfois avec Alby, et les photos que lui envoyait Teresa, passionnée de photographie, pour obtenir son avis. D'ailleurs, elle lui en avait soumise une la veille, vers vingt-deux heures. Newt téléchargea le fichier, et l'ouvrit ensuite. Il s'agissait d'un beau cliché en couleurs (Teresa abhorrait la mode du noir et blanc), qui avait été pris dans son jardin. On reconnaissait le portique rouillé où était pendue une balançoire brune, ainsi que la clôture en fer forgé, rongée par le lierre, qui bordait le carré de terrain entretenu de manière minimaliste. Teresa prenait beaucoup de photos à l'extérieur, surtout le matin et, quand elle le pouvait, le midi ou en début d'après-midi. Elle avait probablement capturé l'image avant d'aller au lycée.

Newt regarda plus attentivement son écran : le chien de son amie avait traversé le champ durant le temps d'exposition, puisque son corps fin, flou et effilé était visible, en mouvement. Le reste de la photo était parfaitement net. Newt retourna à sa conversation et répondit à Teresa : « J'aime bien ton jardin, et la photo. Ça a l'air triste et morose, vieux jeu et obsolète (je parle du paysage, t'inquiète), et ton chien renforce ça. On dirait qu'il fuit, et que c'est la seule chose qui ose bouger. Surtout que la balance qu'on s'attendrait à voir osciller est immobile ».

Une minute plus tard, Newt reçu la réponse de Teresa : « Sérieux ? Tu réponds aux textos maintenant ? Sinon, merci ! Et désolée pour les photos déprimantes, je crois que c'est la seule chose que je sais faire ».