Rumeur

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- Les mecs sont des chiens, dit Monse en posant son paquet de chips sur le tapis de la caisse.

- Amen, répondit Anita en levant les bras au ciel.

Elle savait à quoi la métisse faisait allusion. En un été, Monse avait grandi, enlevé ses bagues dentaires et pris des formes, au plus grand plaisir des yeux masculins de Freeridge. En deux, mois la petite fille avait laissé place à une très jolie jeune femme et les hommes aimaient le lui faire comprendre.

- Comment s'est passé ton été ? tenta Anita pour changer de sujet.

- Pas mal. J'ai enlevé mes bagues, regarde, dit-elle en serrant les dents.

- Et ses seins ont poussé !

- Jamal, coupa Ruby.

- Mais c'est vrai, je ne mens jamais ! se défendit-il 

Anita les regarda se disputer en souriant. Ces enfants lui rappelaient son adolescence, lorsqu'elle remarqua que les trois mousquetaires n'étaient pas au complet :

- César n'est pas avec vous ?

- On ne lui parle plus, répondit Jamal.

 - Pour quelle raison ? s'étonna Anita

Monse croisa les bras sur sa poitrine avant de répondre :

- Ils refusent de me le dire !

- Crois-moi, c'est pour ton bien, répondit Ruby.

La jeune fille leva les yeux au ciel, lorsqu'elle vit la fameuse impala rouge :

- Puisque vous ne voulez rien me dire ? dit-elle en s'avançant d'un pas déterminé vers la voiture.

- Vous ne la retenez pas ? s'enquit Anita en regardant la métisse se jeter dans la gueule du loup.

- Sûrement pas, Oscar me fait bien trop peur

Jamal s'avança jusque devant les portes du magasin et encouragea Monse :

- On assure tes arrières, cria-t-il avant de rajouter plus doucement, mais d'ici.

Anita secoua la tête, amusée par la situation : les garçons aimaient jouer aux grands frères protecteurs avec elles, mais lorsqu'une situation comme celle-ci se présentait, ils s'enfuyaient, la queue entre les jambes. Cependant inquiète – elle ne connaissait que trop bien Oscar et sa tendance au sarcasme – elle s'avança aussi et rejoignit Jamal et Ruby pour observer la scène de loin. Monse étant de dos, Anita ne pouvait grand-chose, mais lorsque la jeune fille croisa ses mains vers sa poitrine, Anita savait qu'Oscar lui avait fait la remarque de trop.  Son regard croisa celui du jeune homme, qui rigolait et arborait cet air arrogant qu'elle détestait tant. Après un signe de tête vers sa direction, la voiture continua son chemin, laissant Monse sur le bord de la route.

- Sérieusement, qu'est-ce qu'il s'est passé ? Demanda Anita

- César a dit à tout le monde qu'ils avaient couché ensemble cet été, dévoila Jamal.

Ruby soupira : 

- C'était un secret !

- Tu sais très bien qu'il ne faut rien me dire ! C'est plus fort que moi, les mots sortent tout seul, je ne peux pas les retenir.

- Vous devriez aller la voir, dit-elle avant de rentrer. 



La jeune femme adorait ces enfants. Mais parfois, ils pouvaient se comporter en total idiot. De vrais adolescents ingrats. Et à ce moment-là, César avait été le champion des idiots. Juste après son frère. En passant devant la maison des Diaz, Anita fit de son mieux pour ne pas prêter attention à Oscar qui fumait dans son jardin avec ses compagnons.  Elle ne voulait pas leur prêter attention mais les sifflements lancés par les Santos lui firent faire demi-tour. Lorsqu'elle vit César au près de son frère, elle fonça, tête baissée :

- Tu n'as aucune limite en fait, entraîner ton propre frère, ton sang, dans ta merde...

Oscar fit signe aux autres de rentrer. Elle le regardait droit dans les yeux, sans baisser le regard, la respiration rapide.

- Je le protège, contra-t-il, en espérant que seule cette remarque serait suffisante.

- En lui mettant une arme entre les mains ? Pas sûr que ce soit efficace...

- Efficace ou pas, je lui apprends à  survivre.  Personne n'a d'avenir ici. Tu as foutu le tien en l'air en décidant de rester, le mien a été foutu en l'air par ma mère et celui de Matéo a été ruiné ce soir-là, quand il a décidé de te rejoindre !

Anita n'osa plus parler. De frustration, Oscar passa sa main sur sa bouche, comme si les mots lui avaient échappé.

- C'est super de savoir ce que tu penses, dit-elle amèrement. 

- Nita, essaya-t-il de se rattraper.

- Va te faire foutre !

Anita - OMBOù les histoires vivent. Découvrez maintenant