☆ Soñar ☆

▪︎| Chapitre 3 |▪︎

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《 Le rêve est l'espérance de ce que la raison n'ose espérer 》

Eugène Marbeau

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▪︎| Ce voile cotonneux qui se dégrade dans une teinte d'un bleu aussi pur que les yeux d'un chaton. Ces volutes outremer qui se dessinent en suivant les courants ascendants de l'air aussi chaud qu'une pierre de lave. Les plumes blanchâtres qui se découpent délicatement sur ce fond de ciel lumineux.

Les prunelles perdues dans ce tableau simpliste, ma vision est quelquefois entrecoupée de mèches torsadées d'un blond aussi pur que les champs de blé. Mon esprit lui, est suspendu en dehors du temps, errant entre un trou noir d'où émane un appel mystérieux et une comète en fusion remplis de mines d'ambres étincelantes.

Depuis cette journée indescriptible vécue malgré moi la veille, je ne peux empêcher mes pensées de dériver sur un flux sans fin de questions inédites entourées d'une aura onirique.

Suis -je vraiment cette personne que l'on me dépeint depuis tout petit ? Ai-je vraiment envie de devenir celui que l'on veut que je sois ? Est-ce dans ce monde connu depuis ma naissance que j'ai envie de passer mes jours ? Suis-je dans l'obligation de suivre cette voie que ma famille emprunte depuis des générations ? Ai-je l'opportunité de choisir un chemin pour mon avenir ? Est-ce possible de rêver d'autre chose que de ce que l'on possède ?

Suivant la course du soleil vers son point culminant, mes neurones en effervescence, j'ai l'impression de découvrir la vie pour la première fois. La vraie j'entends, celle où tu réfléchis par toi même concernant les choix et les décisions qui la peuplent sans te reposer sur tes acquis. C'est tout autant terrifiant qu'excitant.

Dans ma tourmente nébuleuse, un questionnement persiste s'accompagnant d'un ennui mélancolique. Qu'est-ce que je fous là ? C'est sur ces dernières pensées que je conduis mon yacht en direction du port pour emprunter le chemin qui vient de s'ouvrir à moi.

Pieds à terre, mes pas me guident à travers les rues monochromes au carré dans le but de retrouver celles animées aux éclats colorées. C'est ainsi que je me retrouve envahi de cette sensation récemment découverte. Vivre !

L'odeur de cuisson d'un arepa, les cris joyeux de deux gamins derrière un ballon, cet étal de molas indigènes, la texture gélatineuse de la pulpe d'une grenadille fraîche, ce tag de la mère terre dévorant le pan d'un mur de sa végétation, ce musicien et son djembé rythmant une petite place, le goût indescriptible du lait d'avoine dans un verre en carton, ce petit vieux qui fume sa pipe sur le trottoir fissuré et cet accent si mélodieux tournoyant autour de moi.

Alors je me mets à imaginer un parallèle où la vie m'aurait placé là, dans ce monde-ci. Loin du luxe et de la richesse. Loin de l'abondance et de l'opulence. Loin de la facilité et de la complaisance. Loin de la solitude et du silence.

Ma vie, plusieurs l'on sûrement déjà rêvé. Mais est-ce mon rêve à moi ? Finalement, sommes-nous un jour satisfaits de nos origines, quelles qu'elles soient ?

Dans un flou intersidéral, la poussière noircissant mes pieds, je foule les rues dénotant de ma peau laiteuse face à l'ambiance locale. Et comme un instinct primitif, mon corps se met à surchauffer à l'entente de ce timbre rocailleux résonnant dans l'air. Pour finalement, s'embraser totalement lorsque deux ambres ardentes glissent dans mes iris verdoyants.

- Gringo ! Tu t'es encore perdu ?

Submergé par un flux de timidité, mes joues s'enflamment et mes yeux se fixent au sol. Sur les centaines d'habitants de ce quartier, il fallait que je tombe de nouveau sur lui. Est-ce de la malchance ? Mon esprit lui, m'insuffle l'inverse de façon traître et répétitive.

- Tu veux pt'être que j'te dessine une carte du coin pour retrouver ta tour d'ivoire ?

Quelque peu vexé d'être catégorisé ainsi, je relève la tête, une mine boudeuse sur le visage. Son rire rauque s'élève dans le vent, provoquant un frisson à mon corps fébrile. Mes yeux en profitent pour s'égarer sur l'énergumène qui se moque impunément de moi.

Ses cheveux semblables aux flammes d'un brasier s'accorde parfaitement avec sa peau concurrençant la couleur d'un café latte. La teinte inouï de ses iris est soulignée par de légers tracés d'un noir d'encre. Ses membres eux, sont couverts de motifs appartenant à une civilisations ancienne qui dénote avec son style grunge. L'ensemble créant l'exacte opposé de ma personne. Mais si... attrayant ?

Ayant repris un semblant de confiance en moi, je lui répond d'une voix faiblarde.

- Je ne suis pas perdu, merci. Bonne journée

Je tourne les talons pour marquer mon mécontentement mais mon cœur en a décidé autrement et se met à palpiter intensément lorsque qu'au loin, je l'entends m'interpeller une dernière fois.

- Tu sais où m'trouver. Si par hasard tu veux t'perdre loin d'ta réalité

Ses paroles tournant en boucle dans mon esprit torturé par les événements, je peine à en définir le sens. Ma nuit bercée par ce rêve étrange de renouveau, une certitude s'accroche, celle d'aller me perdre de nouveau dans les méandres d'une réalité lointaine.

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Depuis quelques levers de soleils déjà, je me retrouve donc à errer au milieu de la vie jusqu'à ce que le destin me fasse croiser de nouveau ses prunelles flamboyantes. Au fil des jours, ses yeux moqueurs se sont teintés d'intérêt et c'est à ses cotés que je découvre la ville avec un autre œil, celui d'un homme vivant.

Alyan

Ce nom hante maintenant mes nuits et harcèle mes journées. Et c'est avec une certaine satisfaction que j'arrive maintenant à le dénicher avant lui dans ce labyrinthe qui lui sert de repère.

Son monde, je l'apprends de ses mots crus et l'apprivoise de ses gestes brusques. Et pourtant, lorsque son attention chavire sur ma personne, c'est d'une tendresse enivrante qu'il me couvre.

Mon monde, je le déconstruis à coup de pieds salis par le chemin de la vie et l'inonde de couleurs provenant du fleuve de l'espoir. Celui qui est né de la beauté des rêves qu'il me conte.

Ai-je enfin le droit de rêver ce monde plus beau ? |▪︎

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