Scène première
Agamemnon et l'assemblée des chefs
Agamemnon, douloureux
O noire destinée, ô toi funeste jour !
Que la ville de Troie soit détruite toujours !
Aux premiers rets de l'aube, alors que le soleil
Baignait les étendues de ses rayons vermeils,
Achille, presque dieu, héros inégalé,
L'invulnérable enfant de Thétis et Pélée,
Devant nous tous partit, consumé par les flammes,
Homme parmi les dieux, âme parmi les âmes.
Et nul guerrier n'eût cru qu'au sein d'une bataille
On pût l'abattre, lui, du haut d'une muraille,
Et que par un seul trait guidé divinement
On pût percer le cœur d'un homme aussi vaillant.
Pâris ! prince troyen, fils cadet de Priam,
Que ne puis-je en ton sein porter ma fière lame !
Maudits soient ta lignée, ta race et tes enfants !
Que ta robe à jamais soit tachée de ce sang !
Malheur à toi, Pâris, qui d'un enlèvement
Fit naître tant d'horreur et tant d'embrasements ;
Et que d'un même sort, d'une même manière,
On te tue d'une flèche – infâme meurtrière !
Car qui d'un crime ignoble inaugure une guerre
N'a de place assurée qu'au tréfonds des enfers.
Mais cessons à présent de nous trop lamenter,
Car d'une mort injuste un nouveau roi est né !
Achille, puisses-tu régner sur l'Asphodèle
D'un esprit plein de sens, sans fougue ni querelle ;
Que ta tête toujours soit ceinte et couronnée ;
Que nulle ombre ne soit de ton ordre épargnée ;
Que tu puisses un jour accomplir cet hymen,
Uni d'un même amour avecque Polyxène.
O brave Péléide, ô toi brave guerrier,
Faste soit ton royaume et ton éternité !
Aujourd'hui qu'Hellespont est recouvert de fleurs
Je sens dedans mon sein trois fois meurtri mon cœur ;
Et celui-ci ne fut que bercé par les cris
Et les gémissements de tout une patrie.
Ah ! je me sens faillir... Qu'on me vienne au secours,
Sur moi tombe le poids des larmes et des jours !
(Agamemnon tombant, les chefs viennent le soutenir)
Arcas !
Scène II
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Ajax - Tragédie
PoesiaTragédie rédigée en alexandrins en trois actes sur le thème d'Ajax.