L'éloge du poisson suicidaire

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Premier mois,

Tout va bien,

Ma maîtresse s'occupe de moi,

Me donne de son temps,

Je suis bien,

Comme un roi heureux.


Premières vacances,

Elle m'emmène avec elle,

Je ne m'inquiète pas,

Même si le chat est là,

Et veut me manger tout entier,

Il se lèche les babines,

Je me frotte les nageoires,

Ma maîtresse est ma sauveuse.


Les mois se suivent,

Je ne revois plus le chat, ce chenapan,

Je mange bien,

Je vis bien,

Je suis fan de musique,

Jazz, Rock, Classique,

Et même d'une série morbide,

Je ne crains rien,

Ma maîtresse m'aime,

Et est là pour moi.


Puis viennent les grandes vacances,

La déprime se fait sentir,

Je perd mes repères,

Elle m'abandonne à deux inconnus,

Certes adorables mais pas comme elle,

Je ne la vois plus qu'une fois par semaine,

Elle me lave, me change mon eau,

Me souris, ne se doute de rien,

Le temps est trop long,

Je n'en peux plus,

Elle m'aime,

Mais elle m'a oublié,

Moi, et mon nom qui ne m'appartient pas,

À ce nom d'acteur qu'elle m'a donné,

Je n'en puis plus,

Je ne supporte plus,

Ces vacances, c'est trop long,

Si je ne puis être avec elle,

Je ne serais avec personne d'autres.


C'est décidé, je saute,

Demain matin,

Première heure.


Ci-git Pratt, poisson rouge adoré de sa maîtresse, retrouvé mort sur le carrelage de la cuisine de ses grands-parents. Il était 7h du matin. Les investigations de recherche ont indiqué qu'il s'est suicidé en sautant de son aquarium, disposé sur le buffet, par amour...et par inconscience. Sa maîtresse est inconsolable et nous a confié qu'elle ne l'oublierait jamais.


Histoire tirée de fait-réel. Poème dérisoire et caricatural. Si cela vous a plu...

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Recueil de poèmesWhere stories live. Discover now