Marie Scaron, c'est moi. J'ai quinze ans et ma meilleure amie, qui a, elle aussi, quinze ans, s'appelle Rebecca Bedford.
Étrangement, depuis qu'on a vaguement vu la Révolution française en CM2, elle fait une fixation sur ça. Enfin, sur la famille royale, pour être exacte.
Finalement, ce n'est peut-être pas vraiment une fixation. Rebecca appelle ça une révérence à la famille royale française. Alors qu'elle prétend que ce nom est dû au respect que nous devons à la famille royale, moi, de mon côté, je qualifie plutôt cela d'obsession.Jeudi 11 juin, à la sortie des cours.
- Hé Marie ! Tu m'écoutes ?
- Oui, oui, Rebecca, lui répondis-je sans entrain. Tu me racontais ta journée dans les jardins du château de Versailles avec ta correspondante qui était venue il y a quelques mois, dis-je un peu plus fort.
- Et...?Décidément, je détestais le fait que des personnes me parlent comme ça. J'avais l'impression de faire partie intégrante d'un interrogatoire.
- Et tu m'as aussi dit que tu aimerais suivre le chemin qui se trouve derrière la porte qu'a emprunté Marie Antoinette quand elle a tenté de s'enfuir lors de la Révolution.
- Il n'y a pas que cela.
- Quoi donc ?
- Tu n'aimerais pas, toi, toucher ou ne serait ce que frôler un objet que... Marie Antoinette, par exemple, elle seule, aurait touché ?
- Pas spécialement.
- Ah bon.Voyant qu'elle affichait une tête triste, je me forçais à sombrer dans l'hypocrisie. Même si je n'aimais pas faire cela. À personne et en particulier à ma meilleure amie. Alors je repris :
- Quoique... Peut-être, ce serait bien.
De nouveau d'humeur joyeuse, elle entreprit de continuer son récit. Qui, notez-le au passage, devenait de plus en plus un interrogatoire.
- J'ai vu dans une armoire qu'il y avait encore des robes... Elles pourraient appartenir à Marie Antoinette. Oh Marie ! J'aimerais tellement vivre comme eux, ne serait ce qu'une fois !
Cette fois, mon sourire se fit plus authentique. Une lueur brillante étincelait dans mes yeux : je la perçue moi-même.
- Jusqu'à quel prix aimerais tu essayer de faire ça ? demandais-je à Rebecca.
- Ma liberté, répondit-elle du tac au tac.
- Non, sérieusement, Reb'.
- Je suis très sérieuse.
- Ah oui ? Et tu comptes faire un trait sur la liberté de toute ta vie future ? insistais-je.
- Sûrement pas ! me répondit-elle, choquée.
- Alors, pendant combien de temps, environ ?
- Hum... Je pense que mon maximum serait trois mois.
- D'accord. Mais si... Si le danger était réel ? Je veux dire... Quelque chose de vraiment concret. Voudrais tu aller au bout de ton souhait ?
- Ça dépend, évidemment. Que veux tu dire par "réel" ?
- Je veux dire que si ça ne fonctionne pas, si on échoue, il ne nous serait pas impossible de terminer en prison.
- À perpétuité ?
- Sûrement pas ! répondis-je, amusée de la répétition de ses propres paroles.
- Je pense que oui, dans ce cas.
- C'est vrai ?
- Absolument. Ce n'est que de la curiosité, après tout.
- Et donc, même si ce n'est "que de la curiosité, après tout", tu tenterais.
- Ben, oui, c'est ce que je viens de te dire mais où tout cela nous mène t-il ?
- J'ai un plan.
- Je t'écoute.
- Il faut, par contre, que tu comprennes qu'on pourrait avoir de gros ennuis si on n'y arrive pas.***
- Wow... C'est risqué. Très risqué, commenta t-elle.
- Alors... C'est un non ?
- Sûrement pas ! Je veux être de la partie.
- D'accord alors ce soir, on met nos parents au parfum.
- Mais on ne va pas leur dire qu'on va à Versailles ! Imagine tout va bien, on ne va pas leur donner une raison de débarquer à l'improviste.
- Tu as raison. Tu dis à tes parents que tu passes le weekend chez moi, et moi je dis à mes parents que je le passe chez toi.
- D'accord. Euh... Il faudrait peut-être que je trouve le moyen d'éteindre les caméras de surveillance pendant qu'on... passe de l'autre côté de la barrière.
- C'est une bonne idée. Moi je m'occupe du plan et de ce qu'on emmènera avec nous. Rapporte ce que tu as trouvé demain, comme ça on pourra améliorer...
- Voire modifier notre plan, termina Rebecca.
- Exact. À demain !
- À demain, me répondit-elle en m'embrassant sur la joue.[Copyright, Tous Droits Réservés]

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Dans la peau d'une autre
Science FictionMarie Scaron, 15 ans, se retrouve prisonnière dans un corps et dans un espace temps qui n'est pas le sien. Elle essaye de tout faire pour retourner à l'intérieur de son corps, cependant ça n'est pas aussi facile dans un monde qu'elle connaît à peine...