Chapitre 3

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Amian, 24 juin 19**

   "Ma très chère Violette,

Je t'écris dans l'urgence, comme tu  t'en doutes sûrement à la vue de cette lettre. Et je dois te dire qu'elle contient à la fois une mauvaise, et une bonne nouvelle. Je préfère commencer par la mauvaise tout de suite, pour ne pas te laisser plus longtemps dans le suspens...

Je ne vais pas pouvoir venir te rendre visite, comme ce que nous avions prévus. Et crois moi, cela me déchire le coeur. J'avais tout préparé : ma valise, mes tenue, un livre que j'aurais aimé te faire découvrir, et tant de chose que j'aurais aimé de dire de vive voix ! Je suis sûre que toi aussi, tu as dû faire le ménage, préparer ma chambre, et peut être as tu déjà cuisiné un de tes merveilleux petits plats pour moi. C'est aussi pourquoi je t'ai écris si avec tant de hâte. (D'ailleurs je te prierai de ne pas prêter attention à mon écriture peu soignée.) J'espère que tu reçois cette lettre assez tôt dans la matinée pour t'éviter de t'activer de trop, et de préparer ma venue en vain.

Je te promet que je vais essayer de venir dans l'été. Je te ferai savoir dès que possible quand je me sentirai de faire le voyage. Car vois-tu, la bonne nouvelle est un réel bouleversement dans ma vie et celle de mon mari !

Pour recontectualiser ce qui m'arrive, je me suis rendu compte la veille d'écrire mon ancienne lettre, soit il y a cinq jour, que je n'avais pas été indisposée ce mois-ci. J'avais un retard de une semaine... Mais je n'y ai pas prêté attention. J'ai l'habitude que ça m'arrive en été, avec les fortes chaleurs."

Je fis une pause dans ma lecture. Je crois que je savais ce qu'elle allait m'annoncer. Et il fallait que je prenne un temps pour encaisser toutes ces nouvelles informations. Prenant une grande inspiration, je tournais la feuille, étant arrivé en bas de la page, et me replongeais dans la lettre.

"Hier, j'ai été prise de douleurs, et de nausées. Ne voulant pas que la situation dure, comme je devais te rendre visite, je me suis rendu chez le docteur. J'étais très stressée. Mais, quand il m'a examiné, il en a déduit que j'étais sûrement enceinte !

Je n'y crois toujours pas. Le médecin m'a recommandé de me ménager, surout si je ressentais des douleurs et des gènes, comme les nausées. Il m'a donné tant d'instructions, et je dois maintenant me faire suivre par une sage femme. J'ai ma première visite en fin de semaine.

Oh, Violette, si tu pouvais entrer dans mon coeur et savoir ce que je ressentais ! En rentrant chez moi, je me suis effondrée. Cela de dechirais le coeur de ne pas pouvoir te rendre visite, mais j'étais si heureuse à l'idée d'attendre un enfant. J'aurais voulu le dire tout se suite à Jean, mais j'ai du attendre le soir, qu'il rentre du travail. Je suis très heureuse, et je voudrais que tu sois près de moi, pour que nous vivions ces moments ensemble.

J'ai hâte de voir mon ventre grossir. Mais j'ai si peur ! Être mère est une responsabilité immense, et un travail difficile. J'ai peur de ne pas être à la hauteur... Pour l'instant, je me rassure en me disant que le bébé est encore minuscule.

Je suis désolée de ne pas pouvoir te rendre visite, ma Violette. On se serait bien amusés, comme à notre habitude ! J'espère que tu ne t'es pas trop hâté à préparer ma venue en vain...

Je vais finir cette lettre maintenant, pour te l'envoyer au plus vite ! Prends bien soins de toi, jusqu'à ce que l'on se revoit. Je t'embrasse sur les deux joues, et je pense très fort à toi. Je t'écrirai encore, pour donner de mes nouvelles.

A très bientôt mon amie,

Juliette"

Je relevais la tête. Il me fallu un moment pour comprendre et assimiler ce que je venais de lire. Juliette, mon amie d'enfance, avec qui j'avais grandit et passé tant d'étapes dans la vie, attendait désormais un enfant. Cela me fit l'effet d'un choc, comme une grosse giffle sur les deux joues. Et elle m'avait parlé de bisous ? "Je t'embrasse sur les deux joues" Je n'avais jamais si peu ressenti son amour à travers une lettre.

Je me levais lentement, sans vraiment regarder vers où j'allais, ni sur quoi je posais les pieds. Je me retrouvais quelques minutes plus tard dans la cuisine. Grand mère était là. Elle me parlait, mais je ne parvenais pas à répondre. Juliette. Un enfant ? C'était si beau, si émouvant, innatendu mais tellement bienvenue ! Mon coeur debordait d'émotions, je me sentais submergée. Je n'arrivais même pas a comprendre ce que je ressentais.

D'un coup, je me sentis comme étouffant. Il me fallait de l'air. Vite. Et en grande quantité. Ma vue se brouilla. Je sortis en trombe de la maison. Le jardin n'étais pas suffisant. En cet instant, il me paraissait trop petit. J'avais besoin de plus grand. J'avais besoin de me perdre devant une étendue immense. Je voulais me sentir petite. Je voulais avoir tout l'espace pour moi.

Mes pas s'accélérèrent. Je deboulais le long des rues. Un cris sur ma gauche rententis. Je continuais ma course effrénée. Un aboiement dans mon dos resona. Les sons se perdaient et se confondaient. Les couleurs se mélangeaient, se troublaient. Tout était flou. Mes poumons étaient trop petits pour contenir l'air que je respirais.

Je me sentais courir si vite. Et bientôt, tout s'arrêta. Je m'arrêtais.

J'avais les pieds dans l'eau. J'étais arrivée à la rivière. Celle où Juliette et moi nous rafraichissions l'été. Celle au bord de laquelle on avait passé tant de bon moment.

Je respirais vite et fort. Le bruit de mes inspirations couvrait celui de l'eau. Je sentais mon coeur dans ma poitrine, comme si il était sur le point d'exploser, et je le sentais dans mon crâne, comme si il s'était dédoublé pour prendre la place de mon cerveau.

Cette situation dura un certain temps, que je ne pu définir. Une fois que je fus calmée. Je regardais autour de moi. Heureusement, il n'y avait personne. J'étais, comme très souvent, seule. Je me tenais là, au millieu de la rivière. Mes bottes étaient submergées par l'eau jusqu'au dessus des chevilles.

Je voulu faire quelques pas pour regagner la rive, mais mes jambes me lachèrent. Je me retrouvais donc assise là, le derrière mouillé, encore déboussolée. Qu'est ce qu'il m'étais arrivé ?

En reprenant enfin bien mes esprits, je réussi à me lever, non sans peine, et a sortir de la rivière. Une fois sur le bord, je m'alongeais sur le ventre pour me laisser sécher, et je me mis à réfléchir.

Bien sûr, j'étais heureuse pour mon amie. Comme elle, j'avais hâte que son ventre grossisse, que l'enfant naisse et grandisse. Je le voyais comme un neveu, comme l'enfant de ma soeur. Et c'est là que je compris peu à peu, observant l'herbe et les petites fourmies qui y couraient, que j'étais de nouveau derrières.

Encore une fois, je n'étais que l'amie qui n'avançait pas dans la vie. Je n'avais pas fait d'étude, contrairement à Juliette et à nos autres camarades de classes. Je n'étais pas partie du village. Je n'avais pas de travail, ou d'occupation précise. Je n'avais pas rencontré d'homme. Je n'étais pas marié. Je n'avais pas ma propre maisons. Et je n'attendais pas d'enfants.

J'avais l'impression de ne pas découvrir la vie comme tous les autres de mon âge. Un peu comme si j'étais restée bloquée à la fin de l'adolescence, et que ma porte sur la vie d'adulte ne s'étais pas ouverte. J'étais coincée entre des murs que je connaissaient trop bien, par coeur, et qui devenaient de plus en plus petits, sans que je puisse accéder à la pièce suivante, sans que je puisse évoluer.

Et je m'en voulais de me sentir jalouse, envieuse, immature. Car j'avais fais mes choix. J'avais décidé de ne pas quitter ma grand mère pour aller étudier en ville. J'avais décidé, en quelques sortes, de me fermer aux nouvelles rencontres. J'avais décidé de ne pas ouvrir la porte, et maintenant il était trop tard. Elle restera verrouillée à jamais.

Soleil, amour, étéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant