Article 7 : Seuls les gardes personnels de la HRSC et la milice sont autorisés à porter des armes à feu. Toute personne en possession illégalement arrêtée sera arrêtée.
Lorsque je me réveille, beaucoup sont déjà debout, sur le pied de guerre, peut-être n'ont-ils pas réussi à fermer l'œil de la nuit. Ils remballent leurs sacs comme ils le peuvent, avec leurs mains tremblantes et l'apesanteur faisant voler le bout des couettes. Je m'extirpe comme je peux du mien et m'applique à le rouler pour essayer de penser à autre chose qu'à la mission qui nous attend. Cela ne marche évidemment pas et le tambourinement dans ma poitrine accélère peu à peu. Je commence à angoisser de la mission qui nous attend. Je sais qu'il ne nous reste plus que quelques heures jusqu'à la station HRSC mais que ces heures seront malgré tout les plus longues de ma vie avec le peu de patience que j'ai et le stress qui me ronge.
Je n'ai besoin de rien, sauf de chaussures confortables pour courir, si bien que je suis prêt rapidement. J'empoche ma statuette renard qui j'espère, me portera chance. Je vais me poster devant la grande vitre du poste de commandement. Je regarde les étoiles pour m'apaiser, comme d'habitude. Quand j'étais petite, on me disait que ces lumières étaient les esprits de mes ancêtres ou de mes proches partis trop tôt. Même si je sais à présent que ce ne sont que des boules de gaz, je m'imagine que ma mère m'observe depuis leurs lueurs. Je pense que c'est pour cela que j'aime tant les regarder.
Je suis sûr qu'elle sera fière de moi après cette journée. Elle en reste bouche bée depuis les étoiles. Même ma mère, féroce pirate de l'espace, n'a jamais tenté de pénétrer dans la station HRSC. À vrai dire, c'est mission impossible. C'est même du suicide. Je soupire.
Je suis prête pour ça, nous sommes tous prêts. Ce n'est pas le moment de se décourager.
Alors que j'observe le vide qui s'étend devant moi, j'aperçois un petit éclat gris perdu dans l'horizon. Je plisse les yeux pour mieux voir cette apparition soudaine. Après une brève hésitation, j'en suis sûr. C'est bien la station HRSC qui flotte au loin. Nous sommes presque arrivés.
J'appelle en criant tout l'équipage. Ils se rassemblent autour de moi pendant que je leur montre la base du doigt. L'excitation et la pression montent d'un coup. C'est la dernière ligne droite. Je repense tout de suite à mon plan, à mes instructions. Droite, droite, gauche... Ces trois mots m'accompagneront tout au long de ma mission.
Une boule douloureuse appuie contre mon ventre, menaçant de me faire rendre mon repas de la veille. Je me concentre pour la faire partir. J'inspire, j'expire, je dois me détendre, rester calme et d'un sang-froid à toute épreuve. Si je panique je risque de tout faire échouer.
Mon père doit sentir mon malaise car il s'approche de moi. D'un simple regard, il me demande si tout va bien. Je hoche la tête malgré la station qui se rapproche à toute vitesse.
Un membre de l'équipage enclenche le brouilleur d'ondes. À partir de cet instant, tout le monde se tait. Nous sommes concentrés sur notre mission. Nous fixons au loin la tâche grise, qui n'a plus vraiment la taille d'une tâche. C'est le moment de savoir si nous avons fait un bon investissement en achetant ce gadget au marché noir. La tension est à son comble, j'ai les phalanges blanchies et des arcs de cercle dessinés par mes ongles dans ma paume à force de serrer les poings.
Lorsque nous entrons dans le périmètre de sécurité indiqué par notre radar, nous retenons tous notre souffle. Au bout de quelques instants, personne ne nous a demandé de décliner notre identité par radio. Le soulagement est perceptible, même si cette petite étape est la plus facile d'entre toutes.
Nous nous dirigeons tous vers la grande porte du vaisseau, que nous n'ouvrons que lors de la mission dans des stations. Elle est plus grande, c'est donc plus facile de transporter des marchandises. Plus facile aussi pour rentrer rapidement en cas d'imprévus...
D'un claquement de doigts, je tombe sur le sol dur du vaisseau. Nous sommes entrés dans le champ gravitationnel de la station. Je frotte mes chevilles endolories par ma chute et essaie de me relever sur mes genoux tremblants. Seulement quelques jours ont passé depuis que la gravité a arrêté de fonctionner, mais mon corps en ressent les effets comme si je ne m'étais pas mise debout depuis plus d'un mois.
Je m'entraîne à marcher, à trottiner, pour être à l'aise tout à l'heure. J'accélère le protocole de rééducation d'au moins quelques jours, mais je dois être prêt dans quelques minutes. Les conditions ne sont pas optimales pour notre réussite, mais j'espère avoir la chance de notre côté. Je ne vois pas ce qu'il se passe dehors mais notre pilote doit être en train de chercher un garage où se poser.
Léandros s'approche de moi d'un pas encore maladroit et tremblant sur ses jambes à peine remises. Le voyant d'habitude si sûr de lui, cela me fait sourire. Il s'adosse au mur et me regarde.
- Je te fais rire ?
- J'imagine que oui, je réplique d'un air faussement hautain.
- Je crois que tu ne t'es pas vu essayer de courir.
Il me répond cela avec un sourire narquois, me rappelant comment il était encore il ya peu de temps, malicieux et drôle.
- Tu es prête ?
- Oui.
Je remarque qu'il a réussi à me faire penser à autre chose qu'à la mission pendant quelques instants. Des pas résonnent dans le vaisseau, se rapprochent de nous. Il s'agit de mon père.
- Nous allons nous poser, préparez-vous à l'ouverture de la porte.
Léandros perd son sourire et me regarde, comme s'il essayait de percer mon âme. Il m'attrape par la nue et m'embrasse. Je passe mes mains dans ses boucles brunes. Je ferme les yeux, savourant cet instant hors du temps. Mes lèvres contre les siennes et ma main dans ses cheveux. Je fais complètement abstraction des autres, qui doivent sûrement nous regarder.
La porte s'ouvre et descend doucement pour se poser contre le sol du garage. Je tiens toujours Léandros. Ma poigne est ferme, comme si je ne voulais pas le laisser partir. Alors que je le lâche, ma main bute contre quelque chose de caché dans la poche de son pantalon. Je regarde et vois la garde d'un pistolet qui en dépasse. Comment s'en est-il procuré un ?
Il surprend mon regard et pose brusquement la main sur l'objet. De son autre main sur mon menton, il me relève la tête, me forçant à l'observer lui. Il me chuchote à l'oreille :
- En cas d'urgence.
Puis il me lâche et cherche Izequiel parmi l'équipage. Alors que tout le monde descend sur la station il se retourne et articule silencieusement :
- Bonne chance.
Il n'attend pas de réponse et part en courant, avec un léger bouillonnement, Izequiel sur ses talons.
VOUS LISEZ
Terra-Bis
Science FictionDepuis que sa mère n'est plus là, Léonades vit en paria sur le vaisseau de son père. Elle voyage à travers l'espace pour fuir le gouvernement, responsable de la mort de nombreux hors-la-loi comme elle. Mais alors que tout allait bien pour elle, auss...